Prévenir la violence sexuelle dès l'enfance

Prévenir la violence sexuelle dès l'enfance
La violence sexuelle peut toucher les enfants de tous les âges et de tous les milieux. En parler tôt avec votre enfant aide à la prévenir.


La violence sexuelle peut toucher les enfants de tous les âges et de tous les milieux. Pour prévenir ce genre de violence, le mieux est de commencer à en parler avec votre enfant dès son plus jeune âge. Voyez comment aborder le sujet avec lui.

Qu’est-ce que la violence sexuelle?

Le terme violence sexuelle comprend toutes les formes de violences (physiques ou psychologiques) qui se manifestent de manière sexuelle. Il s’agit par exemple de gestes comme :

  • Attouchements
  • Baisers à caractère sexuel
  • Masturbation, pénétration ou tentative de pénétration
  • Comportements exhibitionnistes (ex. : montrer ses organes génitaux à un enfant)
  • Comportements voyeuristes (ex. : demander à un enfant de se déshabiller devant soi ou espionner un tout-petit qui prend son bain)
  • Utilisation de photos ou de vidéos d’enfants aux fins de pornographie infantile
  • Harcèlement sexuel en ligne pour obtenir par exemple des images ou des contacts de nature sexuelle

Au Québec, 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 10 disent avoir été victimes de violence sexuelle avant l’âge de 18 ans. En réalité, ces chiffres sont probablement plus élevés, puisque la violence sexuelle n’est pas toujours dénoncée, en particulier lorsqu’elle touche les enfants.

Ce type de violence est le plus souvent commis par une personne proche de l’enfant. Selon des données recueillies auprès de la clientèle de Marie-Vincent, un organisme qui soutient les jeunes victimes de violence sexuelle, environ 99 % des enfants agressés sexuellement connaissaient leur agresseur. Dans 70 % des cas, il s’agissait d’un membre de la famille immédiate ou élargie.

Intervenir tôt pour prévenir la violence sexuelle

Il est important de commencer tôt à prévenir la violence sexuelle, car les tout-petits sont particulièrement vulnérables à cette forme de violence. Voici pourquoi :

  • Les enfants dépendent des adultes qui prennent soin d’eux.
  • Ils apprennent à faire confiance à l’adulte et à lui obéir.
  • Ils sont facilement manipulables.
  • Les tout-petits n’ont pas la capacité de reconnaître la violence sexuelle.
  • Ils n’ont pas les mots pour nommer ce qu’ils vivent.

Afin de prévenir la violence sexuelle, il faut parler de sexualité avec votre enfant dès son plus jeune âge. Cela instaure un climat de communication et d’ouverture. Vous lui montrez ainsi que vous êtes à l’aise de recevoir ses questions et ses confidences à ce sujet. Votre enfant comprend qu’il peut parler de sexualité avec des adultes de confiance.

À mesure qu’il grandit, adaptez les informations que vous lui donnez en fonction de son développement et des nouvelles expériences qu’il vit, à la garderie ou à l’école par exemple. Vos efforts de prévention doivent se poursuivre durant l’enfance et l’adolescence. C’est en répétant que vous vous assurez qu’il a bien appris et compris vos messages de prévention.

Comment parler de sexualité avec votre enfant?

Pour parler de sexualité avec votre enfant et faire de la prévention, vous pouvez utiliser des situations du quotidien et enseigner des notions simples de respect. Voici comment.

Favorisez une éducation à la sexualité saine

Profitez, par exemple, du moment du bain pour parler de la diversité des corps. Enseignez les mots justes à votre enfant pour désigner toutes les parties du corps, y compris les parties intimes, soit « pénis » au lieu de « zizi » ou « fesses » plutôt que « foufounes ». Connaître les mots justes lui permet d’être bien compris par les autres, surtout s’il vit une situation problématique en lien avec la sexualité.

Si votre enfant vous pose des questions sur la sexualité, répondez avec des mots simples et adaptés à son âge. N’hésitez pas à faire appel à des ressources ou à des livres sur le sujet pour trouver les mots pour en parler.

Pour en savoir plus, consultez nos fiches : Parler de sexualité avec son enfant et Parler de sexualité avec son enfant d’âge scolaire.

Encouragez les relations égalitaires

Enseigner tôt à votre enfant l’égalité entre toutes les personnes est une bonne façon de prévenir la violence sexuelle. Favoriser des relations égalitaires entre les filles et les garçons, par exemple, aide votre enfant à être plus ouvert à la diversité et à l’inclusion. Cela l’amène aussi à développer des relations saines avec les autres et à entretenir, plus tard, des relations amoureuses respectueuses.

En contrepartie, les relations d’inégalité laissent la porte ouverte à des rapports de force et de pouvoir qui peuvent mener à de la violence.

Pour en savoir plus, consultez notre fiche : Enseigner l’égalité aux tout-petits.

Montrez-lui le respect de l’intimité

Dès l’âge de 3 ans, vous pouvez commencer à parler d’intimité à votre enfant. Indiquez-lui les parties de son corps qui sont intimes et qu’il ne doit pas montrer ni toucher en public. Expliquez-lui qu’il a le droit de se retrouver seul, lorsqu’il s’habille ou qu’il va à la toilette, et qu’il peut alors fermer la porte de la salle de bain ou de sa chambre. Il apprend ainsi la notion de respect de son corps et de son espace personnel.

Dites-lui aussi de respecter l’intimité des autres en cognant à la porte avant d’entrer dans la salle de bain, dans une chambre ou dans une pièce où se trouve une personne qui se change.

Pour en savoir plus, consultez notre fiche : La pudeur chez l’enfant.

Apprenez-lui à s’affirmer et à mettre ses limites

Enseignez à votre enfant qu’il a droit à sa bulle, soit un espace autour de lui pour se sentir bien. Expliquez-lui que sa bulle peut être grande ou petite et changer d’un moment à l’autre, selon la personne avec qui il se trouve. Dites-lui de faire respecter sa bulle et de respecter celle des autres. Montrez-lui aussi les bonnes façons de s’affirmer pour mettre ses limites. Au lieu de frapper ou de crier, il peut mettre ses mains sur ses hanches ou devant lui en disant : « Non, je ne veux pas », « Je n’aime pas ça », « Arrête » ou « Recule ».

Respectez aussi les limites de votre enfant. S’il n’a pas envie de faire un câlin ou de donner un bisou à un ami ou à un membre de la famille, acceptez son refus. Ne forcez pas les marques d’affection. Votre enfant comprend ainsi qu’il a le droit de mettre ses limites, même avec les personnes qu’il aime.

Pour en savoir plus, consultez notre fiche : L’enfant qui n’aime pas les bisous.

Aidez-le à gérer ses émotions

Pour s’affirmer, votre enfant doit apprendre à reconnaître et à parler de ses émotions. Il a besoin de votre aide pour y arriver. Commencer tôt cet accompagnement pour l’aider à mettre des mots sur ce qui se passe dans son corps, dans sa tête et dans son coeur. Un enfant qui gère ses émotions réagit mieux aux différentes situations de la vie. Il a aussi de meilleures relations avec les autres.

Pour en savoir plus, consultez notre fiche : Apprendre à l’enfant à gérer ses émotions.

Reconnaître les gestes inacceptables et y réagir 

Dès l’âge de 3 ans, votre enfant est en mesure de comprendre qu’il y a des gestes que les adultes n’ont pas le droit de faire en sa présence, même s’il s’agit de personnes qu’il aime et qu’il connaît. Voici comment vous pouvez aider votre enfant à identifier les gestes inacceptables et à y réagir.

  • Apprenez-lui les gestes que les adultes n’ont pas le droit de lui faire. Par exemple toucher ses parties intimes, les regarder, les embrasser, les filmer, les prendre en photo ou encore lui montrer des vidéos qui montrent les parties intimes. Dites à votre enfant que cette règle s’applique même s’il trouve ça drôle, que c’est une personne qu’il aime qui agit de la sorte ou que cette personne lui dit que c’est un jeu ou un secret.
  • Précisez-lui que pour des questions de santé ou d’hygiène, c’est possible qu’un adulte touche son corps. Par exemple, quand il reçoit des soins de santé par un médecin ou une infirmière en présence d’un parent de même que quand il a besoin d’aide pour se laver ou pour s’essuyer à la toilette.
  • Montrez-lui comment réagir en cas de gestes inacceptables. Dites à votre enfant que si une personne tente de toucher, de regarder, d’embrasser ou de filmer ses parties intimes, ou qu’elle lui présente des vidéos montrant les parties intimes, il doit dire « non » et quitter la pièce pour aller en parler avec un adulte de confiance.
  • Faites-lui comprendre que c’est la faute de l’adulte, si des gestes inacceptables se produisent ou sont déjà arrivés. Dites-lui que ce n’est pas de sa faute.
  • Identifiez avec votre enfant les adultes de confiance autour de lui. Expliquez à votre enfant qu’il s’agit d’une personne avec qui il se sent bien, qui l’aide quand il a un problème et, surtout, qui respecte sa bulle. Aidez votre enfant à nommer plusieurs adultes de confiance pour lui, dans votre famille et votre entourage.

À partir de l’âge scolaire

  • Expliquez à votre enfant la différence entre les bons et les mauvais secrets. Dites-lui que les bons secrets sont ceux qui créent de la joie, comme une fête surprise. Expliquez-lui que les mauvais secrets sont ceux qui créent de la peine, de la honte, de la culpabilité, du malaise ou de la peur. Ceux-ci ne doivent pas rester secrets. Rappelez-lui que les secrets qui concernent les parties intimes sont toujours de mauvais secrets et qu’il doit en parler à un adulte de confiance.
  • Expliquez-lui l’importance d’écouter sa petite voix intérieure pour l’aider à reconnaître les signes qu’il se trouve dans une situation à risque et qu’il doit se protéger.

Quand le parent n’est pas à l’aise avec le sujet…

Il peut arriver qu’un parent se sente mal à l’aise de parler de sexualité avec son enfant. Cela peut être dû à un manque d’éducation à la sexualité, au fait que le sujet était tabou dans sa famille ou à une mauvaise expérience sexuelle.

Si c’est votre cas, respectez vos limites. Vous pouvez vous tourner vers des ressources d’aide, telles que Premières ressources – aide aux parents ou le site Web de l’organisme Marie-Vincent, pour améliorer vos connaissances et trouver des outils pour en parler avec votre enfant. Pensez également à emprunter des livres sur le sujet à la bibliothèque (voir nos suggestions de livres pour enfants dans la section des ressources).

Si votre enfant vous pose une question à laquelle vous n’avez pas la réponse, dites-lui que vous allez y penser et lui en reparler plus tard. N’oubliez pas de le faire parce que votre enfant attendra la réponse!

Même chose s’il vous pose une question qui vous met mal à l’aise. Prenez le temps d’y penser. Essayez de comprendre le besoin derrière sa question. La réponse que votre enfant cherche peut être moins complexe que vous ne le croyez. Renseignez-vous pour lui revenir avec une réponse. Au besoin, demandez à un adulte significatif pour votre enfant d’en parler avec lui et assistez à la conversation.

Parent victime d’agression sexuelle…

Si vous avez subi de la violence sexuelle dans votre enfance, il est possible que vous ne soyez pas à l’aise de parler de sexualité avec votre enfant. Vous pourriez craindre que votre enfant vive lui aussi de la violence sexuelle ou percevoir certains comportements sexuels plus graves qu’ils ne le sont réellement. Si c’est votre cas, n’hésitez pas à contacter un professionnel de la santé spécialisé en violence sexuelle (ex. : psychologue, sexologue, médecin, travailleur social). Vous pouvez également contacter le centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS), l’organisme Info-aide violence sexuelle ou la ligne Info-Social 811 pour obtenir des services d’aide et d’accompagnement.

Quand s’inquiéter?

Même si vous mettez en garde votre enfant contre la violence sexuelle, il est de votre responsabilité de la prévenir. N’oubliez pas que la majorité des cas de violence sexuelle sur des enfants sont commis par des gens qu’ils connaissent. Ne fermez donc pas les yeux s’il y a des attitudes ou des comportements de la part de votre entourage qui vous mettent mal à l’aise.

Demeurez à l’écoute de votre enfant. S’il vous parle d’une situation de violence sexuelle, croyez-le et agissez pour l’en protéger. Soyez aussi attentif aux comportements de votre enfant, car certains peuvent être le signe qu’il est victime de violence sexuelle. Par exemple :

  • votre enfant a peur d’une personne en particulier;
  • il a des blessures aux organes génitaux;
  • il a des objets ou de l’argent dont vous ne connaissez pas la provenance;
  • il régresse sur certains aspects comme la propreté ou le sommeil;
  • il s’isole, fait de l’anxiété, montre des signes de dépression;
Aucun comportement n’indique hors de tout doute qu’un enfant est victime de violence sexuelle, mais il faut être attentif à certains signes.
  • il a des comportements agressifs.

Des comportements sexuels préoccupants ou problématiques méritent également votre attention. En voici quelques-uns :

  • Votre enfant a un comportement sexuel tellement fréquent, comme s’autostimuler à tout moment de la journée, qu’il néglige ses autres activités.
  • Il oblige les autres enfants à poser des gestes de nature sexuelle.
  • Il utilise la menace, le chantage ou la contrainte pour forcer d’autres enfants à faire ou à subir des gestes sexuels.
  • Il en sait trop sur la sexualité pour son âge ou reproduit des gestes de sexualité adulte (ex. : il connaît les contacts oraux génitaux, il introduit des doigts ou des objets dans son vagin ou son rectum ou dans ceux d’autres enfants, il simule des rapports sexuels avec sons et gestes).
  • Il réagit par des gestes sexuels chaque fois qu’il vit des émotions désagréables. Par exemple, il baisse les pantalons des autres lorsqu’il est en colère ou il a besoin de s’autostimuler lorsqu’il est contrarié pour se calmer.

Si votre enfant montre l’un ou l’autre de ces comportements, consultez un médecin, le CLSC, un sexologue ou la ligne Info-Santé 811.

Si vous croyez que votre enfant, ou un enfant de votre entourage, est victime de violence sexuelle, contactez la direction de la protection de la jeunesse (DPJ) ou la police (911).

À retenir

  • Les enfants sont particulièrement vulnérables à la violence sexuelle parce qu’ils dépendent des adultes, qu’ils sont manipulables et qu’ils manquent de mots pour parler de ce qu’ils ressentent.
  • L’éducation à la sexualité et la promotion des relations saines et égalitaires sont de bons moyens de prévenir la violence sexuelle auprès de votre enfant.
  • Vous avez la responsabilité de protéger votre enfant : il faut consulter si des comportements vous inquiètent et dénoncer si vous pensez que votre enfant a été victime de violence sexuelle.
Naître et grandir

Révision scientifique : Joëlle Grenon et Jessica Martin, chargées de projet et formatrices, Marie-Vincent
Recherche et rédaction :Équipe Naître et grandir
Mai 2024

Photos : GettyImages/Marc Elias, monkeybusinessimages, damircudic

Ressources et références

Note : Les liens hypertextes menant vers d’autres sites ne sont pas mis à jour de façon continue. Il est possible qu’un lien devienne introuvable. Dans un tel cas, utilisez les outils de recherche pour retrouver l’information désirée.

Pour les parents

  • CENTRE D’AIDE AUX VICTIMES D’ACTES CRIMINELS (CAVAC) : organisme qui offre des services de première ligne aux victimes d’acte criminel, à leurs proches ainsi qu’aux personnes témoins d’un acte criminel. cavac.qc.ca
  • CENTRE D’AIDE ET DE LUTTE CONTRE LES AGRESSIONS À CARACTÈRE SEXUEL (CALACS) : organisme qui offre des services d’aide, de soutien et d’accompagnement aux victimes d’agression sexuelle ainsi qu’à leurs proches. calacsca.qc.ca
  • CYBERAIDE.CA : centrale canadienne de signalement des cas d’exploitation et d’abus sexuels d’enfants sur Internet. cyberaide.ca
  • INFO-AIDE VIOLENCE SEXUELLE : service d’écoute et de référence pour toutes les personnes touchées par la violence sexuelle (victimes, proches, intervenants). 1 888 933-9007 ou infoaideviolencesexuelle.ca
  • LEMAY, Julie. L’éducation à la sexualité : de la naissance à la préadolescence. Montréal, Éditions La Presse, 2023, 264 p.
  • MARIE-VINCENT. Prévention chez les tout-petits : éduquer pour protéger. marie-vincent.org
  • ROBERT, Jocelyne. Parlez-leur d’amour et de sexualité : l’éducation sexuelle, ça presse! Montréal, Éditions de l’Homme, 2018, 256 p.
  • ROBERT, Jocelyne. Te laisse pas faire : les agressions sexuelles expliquées aux enfants. Montréal, Éditions de l’Homme, 2019, 128 p.
  • SAINT-PIERRE, Frédérique et Marie-France VIAU. L’enfant victime d’agression sexuelle : comprendre et saisir. Montréal, Éditions CHU Sainte-Justine, 2010, 240 p.

Pour les enfants

  • COMITYS. Le consentement expliqué aux enfants (vidéo). comitys.com
  • DUFRESNE, Rhéa et Geneviève DESPRÉS. La bulle de Miro. Montréal, Fondation Marie-Vincent et Éditions Les 400 coups, 2018, 48 p. cdn.marie-vincent.org
  • ESPACE GASPÉSIE-LES-ÎLES. Mon corps, mes droits! Saint-Lambert, Dominique et cie, 2020, 48 p.
  • GRAVEL, Élise. C’est mon corps! Markham, Scholastic Canada, 2022, 32 p.
  • KALÉIDOSCOPE : banque de livres destinés aux enfants de 0 à 12 ans et qui abordent des sujets liés à l’éducation à la sexualité et à l’inclusion, comme l’égalité des genres, l’affirmation de soi, la diversité sexuelle et de genre. kaleidoscope.quebec
  • SERRANO, Lucia. Ton corps t’appartient. Montréal, Crackboom, 2022, 40 p.

 

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