Bientôt la fin des exposés oraux au 1er et au 2e cycle du primaire

Bientôt la fin des exposés oraux au 1er et au 2e cycle du primaire
Bientôt la fin des exposés oraux au 1er et au 2e cycle du primaire
À la rentrée 2026, les exposés oraux traditionnels seront chose du passé au 1er et au 2e cycle du primaire.

20 octobre 2025 | Les élèves du 1er et du 2e cycle du primaire ne devraient plus avoir à préparer d’exposés oraux à compter de l’année prochaine. En effet, ce genre d’exercice n’est pas prévu pour eux dans le nouveau programme d’enseignement du français qui sera implanté à la prochaine rentrée scolaire en 2026.

Le ministère de l’Éducation a annoncé récemment avoir complètement révisé son programme d’enseignement du français pour les élèves du primaire et du secondaire. Une version provisoire est actuellement à l’essai dans une cinquantaine de classes à travers le Québec et le nouveau programme sera implanté partout dès l’automne 2026.

Cette révision propose notamment des changements importants en ce qui concerne la manière d’enseigner la communication orale. Christian Dumais est professeur titulaire de didactique du français à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et expert de l’enseignement et de l’évaluation de l’oral. Il nous a accordé une entrevue pour faire connaître aux parents les principaux changements qui attendent les élèves du primaire l’an prochain.

La communication orale au premier plan

Dans le nouveau programme, la communication orale est au cœur de l’enseignement du français. Toutefois, plutôt que de miser sur des exposés oraux préparés à la maison, il mettra de l’avant la communication orale spontanée. « On veut amener les élèves à parler de différentes façons en lien avec ce qui se passe dans leur quotidien pour les aider à communiquer au jour le jour », souligne Christian Dumais.

Le professeur de l’UQTR trouve intéressant que le nouveau programme s’éloigne de l’exposé oral pour les élèves de la 1re à la 4e année du primaire. « Ce n’est pas interdit qu’une enseignante l’utilise, mais ce n’est pas ce qui est encouragé, précise-t-il. L’exposé oral comme activité d’apprentissage est proposé seulement à partir de la 5e année dans le nouveau programme. »

Ainsi, le programme propose de travailler des éléments concrets comme amener les élèves à saluer les gens, à faire une demande, à donner leur point de vue, à exprimer leur besoin, à mettre des mots sur leurs émotions, à se parler pour régler un conflit et à poser une question.

« Pour moi, c’est un gros plus, mentionne Christian Dumais. Avant de prendre la parole officiellement devant un groupe, un enfant doit être capable d’échanger dans les situations du quotidien avec différentes personnes. Développer les bases de la communication orale, c’est ce qui lui permet de mieux fonctionner en classe et en société. Par exemple, un élève doit être capable de dire qu’il n’a pas compris quelque chose et de poser une question pour bien avancer dans ses apprentissages. »

Place au jeu!

Pour favoriser les apprentissages en français, le nouveau programme prévoit aussi accorder du temps de jeu aux élèves, notamment en 1re et en 2e année. Il s’agit pour Christian Dumais d’une bonne façon de créer une continuité avec la maternelle et de favoriser la transition d’une approche par le jeu vers une approche plus scolaire.

Le professeur en didactique ajoute que les apprentissages passent encore beaucoup par le jeu à cet âge. Les jeux de rôle notamment favorisent le développement du langage et du vocabulaire. « Quand des enfants jouent à faire des personnages, ils mettent en pratique des mots qu’ils ont appris, mais surtout ils prennent plus de risque avec le langage parce que ce n’est pas nécessairement eux qui parlent, mais leur personnage », dit-il.

Il note aussi que jouer à faire semblant est l’occasion pour les enfants de tester des registres de langue pour ajuster leur façon de parler à différentes situations. Par exemple, à travers le jeu, les enfants peuvent simuler des situations où ils parlent à un bébé, à un adulte ou à un médecin et ajuster les mots utilisés au registre de langue, par exemple en utilisant un langage familier ou soutenu.

Enseigner la communication orale autrement

Selon ce que Christian Dumais comprend du nouveau programme, la communication orale pourra être travaillée plusieurs fois par jour à travers des situations et des activités variées.

L’enseignante ou l’enseignant peut par exemple lire une histoire et discuter avec les élèves des personnages et de l’intrigue. Une causerie peut aussi être organisée sur des sujets proches des enfants (ex. : est-ce que mon meilleur ami doit toujours penser comme moi?, est-ce qu’on a le droit de manger de la neige?). « L’idée est de trouver une question qui suscite la réflexion et qui donne l’envie aux enfants de donner leur point de vue, explique Christian Dumais. Ça peut se faire en équipe de 2, 4, 6, etc. »

Pour exercer la capacité d’écoute des enfants, l’enseignante ou l’enseignant peut demander à un enfant de décrire son Noël de rêve à un élève. Ce dernier doit ensuite dire ce qu’on lui a raconté à un autre élève qui n’a pas entendu. Les comptines et les chansons sont aussi intéressantes pour pratiquer la prononciation et le volume de la voix.

D’autres activités peuvent servir de tremplin vers l’écriture et à la lecture. « Par exemple, on donne 4 images à un groupe d’enfants et on leur demande de les placer dans l’ordre de leur choix pour raconter une histoire, indique le professeur. Les enfants doivent échanger leurs pensées, exprimer leurs idées, négocier, argumenter pour finir avec une histoire à raconter. » L’enseignante ou l’enseignant peut ensuite proposer d’écrire l’histoire ou de mettre quelques phrases sous les images. « J’ai étudié ce genre d’activité en classe pour des travaux de recherche et je peux dire que ce sont souvent les enfants qui demandent à écrire leur histoire, confie Christian Dumais. C’est vraiment intéressant de constater ici que c’est grâce à l’oral que les élèves trouvent la motivation d’écrire. »

Les inquiétudes des parents

Certains parents peuvent s’inquiéter du fait que leur enfant ne s’exercera pas avant la 5e année à faire des exposés oraux devant la classe. Ils pensent que cet exercice, déjà stressant pour plusieurs enfants, pourrait l’être encore plus s’il n’est pas pratiqué plus tôt. Au contraire, estime Christian Dumais. Le nouveau programme donnera souvent la chance aux élèves de se pratiquer à l’oral au lieu de limiter l’exercice à deux exposés de 3 minutes par année. Les élèves vont s’habituer à poser des questions, à parler en petits groupes, à donner leur avis, à raconter une histoire dans leurs mots, etc. « En ayant souvent la chance de se pratiquer à communiquer oralement dans différentes situations, les élèves risquent de se sentir confiants et compétents rendus en 5e et 6e pour des communications plus formelles comme les exposés oraux », mentionne-t-il. Il ajoute que souvent l’exposé oral à préparer à la maison devient un devoir de parents. « Comme ce ne sont pas tous les parents qui s’impliquent ou qui maîtrisent le français au même niveau, ça crée des inégalités dans l’évaluation des compétences des élèves. En ramenant les activités orales en classe, tous les enfants partent plus égaux. »

Pratiquer la communication orale à la maison

Christian Dumais a quelques conseils à donner aux parents pour favoriser les compétences orales de leur enfant à la maison. Il n’est pas question ici d’activités scolaires ni de préparer un exposé oral. Il s’agit plutôt de bonnes habitudes à prendre au quotidien comme :

  • Parlez avec votre enfant au lieu de parler à votre enfant. Vous pouvez lui demander de vous raconter des choses et de vous expliquer son idée. Par exemple, dites-lui : « Est-ce que quelque chose t’a fait rire aujourd’hui? » ou « Comment aimerais-tu qu’on s’y prenne pour construire cette cabane? »
  • Offrez-lui l’occasion de donner son avis et de mettre des mots sur ses émotions. Par exemple, demandez-lui : « Pourquoi tu ne veux pas aller chez ta cousine? », « Comment tu te sens? » ou « Est-ce qu’il y a quelque chose qui te fait de la peine? »
  • Laissez-lui le temps de réfléchir avant de vous répondre.

Plus votre enfant prendra l’habitude d’échanger avec vous à propos de tout, plus il sera facile pour lui de participer aux discussions à l’école et de développer ses compétences en communication orale.

Pour en savoir plus :
Ministère de l’Éducation du Québec

Julie Leduc – Équipe Naître et grandir

Naître et grandir

Photos : GettyImages/kali9 et FatCamera

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