La mélatonine n’est pas la première solution à envisager pour traiter les problèmes de sommeil d’un enfant.
16 janvier 2023 | Votre enfant a de la difficulté à s’endormir ou il se réveille souvent la nuit et vous pensez lui donner des suppléments de mélatonine? Cette solution n’est vraiment pas la première à envisager pour l’aider à trouver le sommeil. Un expert explique pourquoi.
La mélatonine est une hormone qui a une influence bien connue sur le sommeil. « Il s’agit d’une hormone naturelle produite par le cerveau, explique Roger Godbout, psychologue et chercheur au Laboratoire du sommeil de l’Hôpital en santé mentale Rivière-des-Prairies. Cette hormone est produite quand il fait noir et elle informe l’ensemble de notre corps que c’est la nuit. »
La sécrétion de mélatonine envoie des signaux qui nous encouragent à dormir la nuit et à être éveillé le jour. Notre corps a toutefois besoin d’autres signaux pour s’endormir. Par exemple, il faut avoir été éveillé pendant plusieurs heures. « Même si la mélatonine peut contribuer à se sentir endormi, elle n’est pas un somnifère, insiste Roger Godbout. Elle est plutôt considérée comme un supplément alimentaire. »
Pas un remède miracle pour le sommeil des enfants
Selon le psychologue, il faut être prudent avant d’utiliser des suppléments de mélatonine avec les enfants. Ces suppléments ne seront d’aucune utilité si la cause des problèmes de sommeil n’a pas été identifiée. « Par exemple, la mélatonine n’est pas la solution si l’environnement de sommeil est trop bruyant, illustre-t-il. De la même façon, elle ne rendra pas l’enfant qui ne veut pas aller au lit plus autonome. »
Plusieurs raisons peuvent expliquer pourquoi un enfant ne s’endort pas facilement ou se réveille souvent. Des problèmes physiques peuvent par exemple nuire au sommeil, comme la douleur, les pipis au lit, les allergies, la constipation, le reflux gastrique, les problèmes respiratoires, etc. « Avec un enfant qui a un trouble de sommeil, il faut essayer de voir s’il y a quelque chose qui ne va pas, ajoute le psychologue. Cela peut nécessiter un examen médical. »
Des causes psychologiques comme l’anxiété, la peur et le stress peuvent aussi être à l’origine des difficultés liées au sommeil, ajoute le chercheur. Voici des pistes à explorer selon lui : « Est-ce que mon enfant éprouve de l’anxiété? Est-ce qu’il fait des cauchemars ou est-ce qu’il a peur du noir? Est-ce qu’il vit des difficultés à l’école ou de l’intimidation? »
Miser sur les bonnes habitudes de sommeil
« Avant d’avoir recours à des suppléments de mélatonine, il y a donc bien d’autres choses à faire », souligne le psychologue. Il recommande de commencer par analyser les habitudes de sommeil de votre enfant dans un journal. Il s’agit de noter l’heure à laquelle votre enfant se couche de même que les moments où il dort et se réveille. Vous pouvez aussi y inscrire des éléments particuliers comme un repas spécial, une nuit à l’extérieur, une maladie ou un conflit familial. Tenir ce journal pendant 2 ou 3 semaines permet d’avoir un portrait plus clair de la situation et de ce qui peut nuire au sommeil de votre enfant.
Vous pouvez ensuite mettre en place des mesures qui favorisent le sommeil à commencer par une routine du soir calme pour aider votre enfant à s’endormir. Avant le dodo, « ce n’est pas le temps de lui faire faire l’avion ou de lui parler des activités du lendemain puisque cela risque de l’exciter », rappelle Roger Godbout.
Le psychologue suggère également de limiter les conversations sur des sujets stimulants ou inquiétants pour votre enfant dans les 30 minutes qui précèdent l’heure du coucher. Les écrans sont aussi à éviter une heure avant le dodo, de même que les livres dont le contenu pourrait troubler votre enfant, précise Roger Godbout. Pour obtenir d’autres conseils pour aider votre enfant à bien dormir, consultez notre fiche Le sommeil: aider son enfant à s’endormir.
Quand envisager la mélatonine?
Si les difficultés de sommeil persistent malgré les bonnes habitudes, la mélatonine pourrait être envisagée. « Si le parent a bien aménagé l’environnement de sommeil, qu’il a instauré une bonne routine du soir et qu’il a écarté les causes médicales, la mélatonine peut alors s’ajouter au reste pour réussir à mieux dormir », remarque Roger Godbout.
Il est toutefois recommandé de consulter un médecin ou un professionnel de la santé avant de donner des suppléments de mélatonine à votre enfant. La prudence est de mise, car peu d’études ont été réalisées pour connaître les effets de la mélatonine chez les enfants. « Ce sont aussi de petites études et on ne connaît pas les effets à long terme », souligne le chercheur.
Autisme et mélatonine
Roger Godbout précise que « la mélatonine peut être utile lorsque le système naturel de production mélatonine d’un enfant ne fonctionne pas très bien, comme c’est le cas pour certains troubles neurodéveloppementaux. »
La recherche montre en effet que les suppléments de mélatonine peuvent aider le sommeil des enfants qui vivent avec un trouble du spectre de l’autisme. Certaines études avancent aussi que la mélatonine pourrait être bénéfique pour le sommeil des enfants avec un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.
Le chercheur, qui a réalisé une revue des études publiées au sujet de l’utilisation de la mélatonine pour améliorer le sommeil des jeunes autistes, mentionne qu’il y a peu d’effets secondaires pour ces enfants. « Nous n’avons pas noté d’effets secondaires importants sauf dans quelques cas extrêmement rares où le rôle de la mélatonine n’était pas clairement démontré. »
Garder la mélatonine hors de la portée des enfantsLa mélatonine est parfois vendue sous forme de jujubes. Les enfants peuvent alors croire qu’il s’agit de bonbons. Selon des données publiées dans La Presse, « dans les deux dernières années, le Centre antipoison du Québec a noté une augmentation de 50 % de l’exposition à la mélatonine chez les enfants, avec 480 cas en 2019, 660 en 2020 et 720 en 2021 ». Dans la quasi-totalité des cas, les conséquences ont été légères. Cependant, comme n’importe quel produit du genre, la mélatonine doit être conservée hors de la portée des enfants. |
Kathleen Couillard – Équipe Naître et grandir
Photo : GettyImages/ Ivan-balvan