Pandémie et développement des tout-petits: que sait-on 2 ans plus tard?

Pandémie et développement des tout-petits: que sait-on 2 ans plus tard?
Pandémie et développement des tout-petits: que sait-on 2 ans plus tard?

Cette nouvelle fait partie de nos archives. Il se peut que son contenu ne soit pas à jour.


Comment la pandémie de COVID-19 a-t-elle influencé le développement des enfants?

27 avril 2022 | La pandémie de COVID-19 a profondément modifié le quotidien des tout-petits. Comment ces changements ont-ils influencé leur développement? Le point sur une question qui préoccupe les parents et les experts.

Pendant la pandémie, les enfants ont vécu des bouleversements et des changements de routine. Ils ont perdu des occasions de jouer, de socialiser et d’apprendre. Puisque les premières années sont une période très importante dans le développement, des chercheurs se sont penchés sur les effets possibles de cette situation.

Sylvana Côté, directrice de l’Observatoire pour l’éducation et la santé des enfants, mène d’ailleurs des travaux subventionnés par les Fonds de recherche du Québec pour mieux comprendre les conséquences de la pandémie sur le développement des tout-petits.

Quels effets sur le développement?

« Nous avons encore peu de données québécoises », indique Sylvana Côté. Ailleurs dans le monde, certaines études indiquent que la pandémie a nui aux apprentissages des enfants d’âge préscolaire, souligne-t-elle.

Par exemple, selon une étude réalisée au Rhode Island, les enfants nés pendant la pandémie ont des scores moins élevés que ceux nés avant lorsqu’on évalue leurs habiletés verbales et motrices de même que leur performance dans des tests cognitifs.

Des chercheurs new-yorkais ont également remarqué que les bébés nés pendant la pandémie obtenaient de moins bons résultats à l’âge de 6 mois lors de l’évaluation de leur motricité globale, de leur motricité fine et de leurs habiletés sociales.

Par ailleurs, après avoir analysé différentes études préliminaires sur le sujet, des chercheurs de l’Illinois ont conclu que la pandémie avait mené à une augmentation de certains comportements problématiques chez les tout-petits comme l’inattention, l’irritabilité, la peur, la tendance à s’accrocher, la dépression, l’anxiété et les symptômes de stress post-traumatique.

Selon des scientifiques australiens, les effets négatifs de la pandémie de COVID-19 sur les enfants seraient semblables à ceux observés lors d’autres épidémies dans le passé.

Des chercheurs américains sont toutefois arrivés à des résultats rassurants en comparant des enfants de différents groupes d’âge. Ces chercheurs ont aussi observé des résultats un peu plus faibles pour la résolution de problèmes chez les enfants de moins de 6 mois et pour la communication chez les enfants de 6 mois et 12 mois. Cependant, lorsqu’ils se sont intéressés à l’ensemble des enfants, la pandémie ne semblait pas avoir eu d’effets négatifs sur eux.

Une augmentation des inégalités?

Selon Sylvana Côté, les études montrent que les effets dépendent toutefois de l’environnement de l’enfant. « Par exemple, des parents ont dû aller travailler à l’extérieur dans des situations stressantes, souligne-t-elle. Ces conditions sont moins favorables à l’épanouissement des enfants. »

Au cours de leur étude, les chercheurs du Rhode Island ont d’ailleurs noté que les enfants provenant de milieux défavorisés étaient les plus affectés. Au contraire, un milieu favorisé semblait diminuer les conséquences négatives de la pandémie.

Selon les scientifiques de l’Illinois, les enfants qui vivent dans un environnement chaleureux et sécurisant peuvent davantage développer leur résilience que ceux qui sont déjà exposés à la négligence ou à la maltraitance. Par ailleurs, les parents qui sont stressés en raison de leur travail ou de difficultés financières peuvent avoir plus de difficultés à interagir avec leur enfant.

Dans leur analyse, les chercheurs australiens ont conclu que la pandémie pourrait augmenter ainsi les inégalités sociales. « C’est la principale inquiétude que nous avons concernant l’impact de la COVID-19 », confirme Sylvana Côté.

Et les masques?

« On ne sait pas beaucoup de choses sur les effets des masques », remarque Sylvana Côté.
Selon une expérience réalisée au Massachusetts auprès de bébés âgés de 5 à 19 mois, le masque porté par la mère ne nuirait pas à ses interactions avec son enfant, probablement parce que les bébés se fieraient à d’autres signaux comme le regard, la voix, la posture et les gestes de leur mère pour communiquer avec elle.
Une étude réalisée au Wisconsin montre aussi que les enfants pourraient très bien reconnaître les émotions de la personne en face d’eux, même si celle-ci est masquée. Le masque ne nuirait donc pas aux interactions sociales.
« Selon les experts, le masque pourrait poser un risque pour certains enfants qui ont des difficultés au niveau de l’apprentissage du langage, note Sylvana Côté. Cependant, chez les enfants en général, rien ne démontre qu’il faut s’inquiéter. »

Éviter les effets à long terme

« Tout le monde a vécu des perturbations dans son quotidien pendant la pandémie, souligne Sylvana Côté. On ne peut pas s’attendre à ce qu’il n’y ait pas de conséquences. Cependant, ce sont les effets négatifs qui persisteraient dans le temps qu’il faut surveiller. »

« Pour la vaste majorité des enfants, leurs mécanismes de résilience, d’adaptation et de flexibilité feront en sorte qu’ils passeront assez bien à travers », remarque Sylvana Côté.

Selon la chercheuse, il est toutefois important de mettre en place des filets de sécurité pour les enfants qui ont vécu des perturbations plus importantes. « Il faut renforcer les systèmes qui sont déjà en place, par exemple l’accès à des services d’éducation préscolaire de qualité », insiste-t-elle.

De leur côté, les parents peuvent essayer de maintenir autant que possible une bonne routine familiale comme faire de l’exercice physique de façon régulière, adopter de saines habitudes d’utilisation des écrans et favoriser de bonnes nuits de sommeil. « Il est aussi important d’être à l’écoute de son enfant et de ne pas hésiter à parler avec son médecin ou l’éducatrice de son enfant en cas d’inquiétude », ajoute Sylvana Côté.

Sources : medRixv, Journal of the American Association of Nurse Practitioners, The Medical Journal of Australia, JAMA Pediatics, Journal of the American Association of Nurse Practitioners, The Lancet pre-print, PLOS One

 

Kathleen Couillard – Naître et grandir

Naître et grandir

 

Photo : GettyImages/SolStock

Partager