Le pouvoir infini... des écrans

Le pouvoir infini... des écrans
Par Julie Fortier, Rédactrice en chef, Naître et grandir
L’association que font les fabricants de produits pour bébés entre « écrans et jeunes enfants » est préoccupante.

« Même le calme en voiture ». C’était le message d’une publicité publiée dans un journal gratuit il y a quelques années. On y voyait une tablette électronique - sur laquelle défilait un dessin animé - accrochée sur le dos du siège avant du passager et les petites jambes d’un très jeune enfant assis dans un siège d’auto.

En une image, cette publicité démontrait comment les écrans s’infiltrent maintenant partout. Elle envoyait aussi le message que « pour avoir la paix », pourquoi ne pas mettre votre enfant devant un écran?

L’association que les publicitaires et les fabricants de jouets ou d’accessoires pour bébés font naturellement entre « écrans et jeunes enfants » est préoccupante. Comme si les appareils mobiles étaient devenus un indispensable dès la petite enfance, alors que l’on sait que mal et trop utilisés, ils peuvent nuire au développement d’un enfant.

Accrocher les bébés

Bien sûr, les écrans font maintenant partie du quotidien des familles et peuvent être utiles. Ils peuvent toutefois devenir facilement envahissants. Les sollicitations sont en effet nombreuses pour les familles : les chaînes télé pour bébé, les applis annoncées à la fin d’émission pour les tout-petits, les vidéos conçues pour les jeunes enfants sur YouTube, les tablettes ou téléphones intelligents pour bébé et leurs supports pour pouvoir les fixer partout…

Ces produits facilitent d’ailleurs l’utilisation des écrans et font augmenter le temps que les tout-petits y passeront dans une journée, souligne l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) dans un rapport. « De plus, ils contribuent à créer l’illusion qu’il est normal pour l’enfant de passer plusieurs heures de sa journée devant un écran », peut-on aussi lire.

Agir maintenant

S’assoir devant un écran est tellement devenu « normal » que le nombre d’heures que les enfants y passent inquiète grandement plusieurs experts qui parlent même d’un problème de santé publique. Et la pandémie n’a fait qu’empirer les choses.

En 2022, le gouvernement du Québec a publié une première stratégie sur l’utilisation des écrans et la santé des jeunes. Elle vise à « favoriser la santé globale » des enfants et des jeunes de 2 à 25 ans. Cette stratégie prévoit des mesures concernant, entre autres, la promotion de saines habitudes de vie et d’un usage équilibré des écrans.

Comme parents et adultes intervenant auprès des enfants, nous pouvons agir au quotidien pour favoriser un mode de vie plus sain en limitant l’exposition aux écrans. Les experts s’entendent pour dire que les bonnes habitudes avec les écrans doivent commencer en bas âge. Bien qu’il s’agisse d’un défi important pour les familles, il existe aujourd’hui plusieurs ressources pour les aider à encadrer l’usage des écrans à la maison (voir ci-dessous).

De même, il y a maintenant des directives plus claires sur l’usage de la télévision et des autres écrans dans les services de garde éducatifs à l’enfance, que ce soit dans une installation ou dans un milieu familial. Ainsi, l’utilisation d’un écran en milieu garde doit être lié au programme et ne pas dépasser 30 minutes par jour, et leur usage est interdit auprès des enfants de moins de 2 ans. Dans les écoles publiques, l’éventuelle interdiction du cellulaire en classe est un autre pas dans la bonne direction.

Nous devons aussi nous questionner sur le temps que nous passons comme parent sur nos téléphones lorsque nous sommes avec nos enfants (phénomène appelé technoférence). Lorsqu’un parent utilise souvent son téléphone en présence de son tout-petit, cela peut avoir un impact sur son développement et nuire au lien d’attachement parent-enfant, selon une récente synthèse de l’INSPQ. N’oublions pas non plus que nous sommes un modèle pour nos enfants et que l’usage que nous faisons de nos écrans n’y échappe pas.

Quelques chiffres…

  • Avant 2 ans, un tout-petit ne devrait pas être exposé aux écrans et il ne devrait pas y passer plus d’une heure par jour de 2 à 5 ans, recommande la Société canadienne de pédiatrie (SCP).
  • Plus de 25 % des parents d’enfants de 0 à 5 ans trouvent difficile d’encadrer l’usage que fait leur enfant des écrans C’est près de 46 % des parents dans la catégorie 6 à 11 ans, selon l’enquête québécoise sur la parentalité 2022.
  • Durant la pandémie, une recherche menée en Nouvelle-Écosse auprès de 315 enfants qui avaient 3 ans ½ au début de l’étude a révélé qu’ils passaient en moyenne 3,5 heures par jour devant les écrans.
  • Selon une étude albertaine menée en 2018 auprès de 2 441 mères et leur enfant : à 2 ans, les enfants passaient en moyenne 2,4 heures par jour devant un écran, 3,6 heures à 3 ans et 1,6 heure à 5 ans, lors de l’entrée à l’école.
  • En 2016, les enfants de 3 à 4 ans passaient en moyenne 2 h par jour devant les écrans, selon des données de Statistique Canada.
  • Dans des études analysées par l’INSPQ, les parents ont rapporté passer de 14 % à 23 % du temps d’éveil de leur enfant sur leurs appareils mobiles.

Sources  : SCP, Institut de la statistique du Québec, Université de Sherbrooke, JAMA Pediatrics et INSPQ

Ressources pour les parents sur le web

Vous trouverez sur ces différents sites de l’information sur le temps d’écran chez les enfants, des outils pratiques, des vidéos et des activités à faire sans écran.

Pour les parents

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Mise à jour le 6 septembre 2023
Publiée originalement le 17 octobre 2019

Naître et grandir

Photos : GettyImages/lisegagne

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