L’enquête longitudinale Grandir au Québec offre des données sur l’expérience des parents qui ont eu un enfant pendant la pandémie.
14 mai 2024 | Comment se sont déroulés la grossesse et l’accouchement des mères qui ont eu un bébé en 2020-2021? Comment les parents ont-ils vécu l’arrivée de leur enfant pendant la pandémie? Des données de la vaste étude Grandir au Québec présentées au 91e congrès de l’Acfas apportent des réponses à ces questions.
La 2e édition de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec (ELDEQ), aussi appelée Grandir au Québec, vise à identifier les facteurs qui contribuent au développement et au bien-être des enfants. Cette enquête de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) suit et observe une cohorte d’enfants nés entre le 1er octobre 2020 et le 30 septembre 2021. Comme ils sont nés pendant une pandémie, marquée notamment par des confinements, l’ISQ a voulu documenter l’influence de cet événement sur l’expérience des parents durant la grossesse et l’accouchement.
Les parents ont vécu de l’isolement et du stress
Les premières données de l’étude, recueillies auprès de 4 703 familles alors que les bébés avaient environ 5 mois, montrent que certains parents se sont sentis isolés et seuls. « La moitié des mères et le tiers des pères ont dit que la pandémie avait eu des effets négatifs sur leur santé mentale », a indiqué Amélie Lavoie, professionnelle de recherche à l’ISQ, lors d’une présentation des faits saillants de l’étude au congrès de l’Acfas.
L’enquête révèle que les mères de 29 % des bébés ont ressenti de l’isolement ou de la solitude durant la grossesse. Ces sentiments se sont poursuivis après la naissance de l’enfant pour les mamans de 22 % des bébés. Les pères ont aussi indiqué avoir souffert d’isolement ou de solitude durant la grossesse (15 % des bébés) et après la naissance de l’enfant (11 % des bébés). Plusieurs parents ont mentionné que leur famille et leurs amis n’ont pas pu venir les voir ni les aider à la maison après la naissance de leur enfant.
Le niveau de stress des parents a aussi augmenté de manière importante en raison de la pandémie pour les mères de 21 % des bébés et les pères de 15 % des bébés. Les parents d’environ 15 % des bébés disent que cet événement a eu un impact négatif sur leur relation de couple. Toutefois, ceux d’environ 20 % des bébés ont mentionné que la pandémie a amélioré leur conciliation famille-travail ou leur relation de couple.
Suivis de grossesse et naissances
L’enquête a aussi permis de récolter des données sur les services utilisés pendant la grossesse et la naissance des bébés de l’étude. Voici les principaux résultats :
- Les mères d’environ 42 % des bébés mentionnent que certains rendez-vous de suivi se sont déroulés au téléphone ou en ligne en raison de la pandémie. Celles de 15 % des bébés ont dit que des rencontres ont été annulées ou reportées. Environ 27 % des bébés ont une mère qui s’est dite préoccupée par ces répercussions.
On compte environ 1,7 % des bébés dont la mère n’a pas pu manger suffisamment pendant la grossesse en raison d’un manque de nourriture et d’argent. Les mères d’environ 4,9 % des bébés ont bénéficié d’un programme de soutien alimentaire.
- Les mères de 25 % des bébés ont suivi des cours prénataux. La proportion est plus élevée chez les bébés premiers-nés (48 %) que chez ceux dont la mère a d’autres enfants (6 %). « Parmi les mères qui ont suivi des cours prénataux, la plupart les ont suivis en ligne », a précisé Amélie Lavoie.
- 94 % des bébés sont nés en présence de leurs deux parents. « On compte très peu de mères qui n’étaient accompagnées par aucune personne de leur entourage durant l’accouchement. C’est une situation qui concernait 2,3 % des bébés », a ajouté la professionnelle de recherche.
- 39 % des bébés nés à l’hôpital y sont restés une journée après leur naissance et 32 % y sont restés deux jours. Environ 1,8 % des bébés nés à l’hôpital sont retournés à la maison moins de 24 heures après leur naissance.
- 70 % des bébés nés en maison de naissance sont rentrés à la maison moins de 24 heures après leur naissance et 26 % ont eu un séjour postnatal d’une journée.
- Les parents de 72 % des bébés n’ont pas pu recevoir de visite de leur famille ou de leurs amis à l’hôpital ou à la maison de naissance.
De bonnes habitudes malgré la pandémieLes mères d’environ 38 % des bébés ont pris quotidiennement de l’ acide folique trois mois avant et pendant la grossesse, alors que celles de 23 % des bébés en ont pris tous les jours, mais seulement durant la grossesse. La vaste majorité des bébés de l’étude (88 %) n’ont pas été exposés à l’ alcool. Les mères de 92 % des bébés n’ont pas fumé la cigarette durant la grossesse. La consommation de cannabis par la mère à un moment ou un autre de la grossesse touche environ 2,3 % des bébés. |
L’expérience des pères pendant la pandémie
L’enquête Grandir au Québec s’est aussi intéressée aux répercussions de la pandémie sur l’expérience des pères. Voici quelques effets rapportés :
- Les pères d’environ 53 % des bébés n’ont pas été autorisés à accompagner la mère lors des rendez-vous de suivi de grossesse.
- Ceux d’environ 41 % des bébés n’ont pas été autorisés à accompagner la mère lors des échographies.
- La presque totalité des pères a pu assister à l’accouchement de leur enfant. « Les pères de seulement ont 1 % des bébés étudiés n’ont pas été autorisés à accompagner leur conjointe pour l’accouchement en raison de la pandémie », a indiqué Amélie Lavoie.
- Les pères de 6 % des bébés ont indiqué qu’ils n’ont pas pu passer autant de temps qu’ils l’auraient souhaité au lieu de naissance.
Depuis quelques mois, l’ISQ a rendu publiques plusieurs données de l’étude Grandir au Québec qui documentent l’environnement dans lequel grandissent les bébés. Pour en savoir plus, consultez nos textes :
L’ISQ prévoit publier bientôt un autre rapport de données de l’enquête. Il portera notamment sur les pratiques parentales, l’engagement paternel, la relation coparentale et les habitudes de vie des parents des bébés de la cohorte.
L’étude Grandir au Québec est réalisée grâce au soutien financier de la Fondation Lucie et André Chagnon*, du ministère de la Famille, du ministère de la Santé et des Services sociaux, du ministère de l’Éducation, du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale, du Conseil de gestion de l’assurance parentale ainsi que de l’ISQ. Plus de 30 chercheurs-experts des domaines d’intérêt pour le développement des jeunes enfants collaborent à l’étude. |
Source : L’expérience périnatale des parents, Institut de la statistique du Québec
Julie Leduc – Équipe Naître et grandir
*Naître et grandir est financé par la Fondation Lucie et André Chagnon.
Photos : GettyImages/ArtistGNDphotography et Phynart Studio