Garderie: éducateurs recherchés

Garderie: éducateurs recherchés
Garderie: éducateurs recherchés
Il y a encore peu d’hommes éducateurs dans les garderies du Québec. Pourquoi et comment en attirer davantage?

1er mai 2023 | Les temps ont bien changé depuis les débuts du système de garde québécois à la petite enfance dans les années 1970. Pourtant, une chose a peu évolué : le nombre d’hommes éducateurs. Que faire pour en attirer davantage?

« La société est rendue à un point où on ne doit plus poser la question à savoir si un homme ou une femme peut exercer un métier. Il faudrait que notre milieu évolue en même temps que la société », croit Dominique Germain, professeur en techniques d’éducation à l’enfance au Collège Montmorency. En effet, la percée des hommes en service de garde reste timide.

Selon des données du gouvernement du Québec datant de juin 2022, les hommes ne constituent qu’à peine 2 % du personnel éducateur (2,3 % dans les CPE, et un maigre 0,6 % dans les garderies en milieu familial). « En 1990, j’étais étudiant à la technique, et on était sept garçons. Je n’ai pas vu ça souvent », remarque d’ailleurs Dominique Germain, qui est aussi impliqué dans le Comité québécois pour la mixité en éducation à l’enfance. Depuis, il a souvent enseigné à des cohortes exclusivement féminines, mais il note un léger regain d’intérêt depuis les deux dernières années.

Attirer les garçons et les garder

Salaires peu élevés, manque de modèles, préjugés à défaire… Les barrières pour les garçons qui décident de choisir le métier d’éducateur sont nombreuses. Malgré une société de plus en plus égalitaire, les soins aux enfants sont encore perçus comme « féminins ». « On a longtemps vu ce métier-là comme quelque chose de naturel pour les femmes », souligne le professeur en techniques d’éducation.

Et encore faut-il que les garçons persévèrent. « Ils voient qu’ils sont dans un monde de femmes et ils partent. On doit les encourager », ajoute-t-il. Christophe Dupéré, étudiant en troisième année à la technique en services de garde, le confirme : « On est deux garçons dans ma cohorte. Au début, on était plus nombreux, mais plusieurs ont abandonné. »

Des préjugés à défaire chez les parents

Il y a aussi encore des préjugés à défaire auprès des parents. Certains, qui ne sont pas habitués à voir des hommes éducateurs, font des commentaires ou ont des réticences, surtout lorsqu’il est question de soins d’hygiène comme le changement de couche. « J’ai développé une grande transparence, par exemple : toujours avoir une porte d’ouverte si je conduis un enfant aux toilettes », affirme Louis-Marie Ouellet, qui travaille en service de garde depuis 1979. Celui-ci constate que la peur est aujourd’hui moins présente, mais il continue tout de même à garder cette transparence.

« On doit sensibiliser les familles et faire preuve d’empathie », conseille de son côté Nathan Dratler qui est éducateur depuis 13 ans. Toute personne travaillant en service de garde doit par ailleurs se soumettre à une vérification des antécédents judiciaires.

Ce sont surtout les familles venant d’ailleurs, au sein desquelles les hommes ne s’occupent traditionnellement pas des enfants, qui sont les plus hésitantes. « On les situe dans le contexte, on explique », affirme Louis-Marie Ouellet. Il invite pour sa part les parents réticents à rester dans son local pour observer comment il fonctionne, le temps qu’ils soient à l’aise.

Heureusement, les mentalités évoluent. « Les pères sont de plus en plus impliqués dans la vie familiale », observe Dominique Germain. Louis-Marie Ouellet l’a aussi bien remarqué : « Il y a 40 ans, j’appelais rarement les pères lorsque les enfants étaient malades. Aujourd’hui, c’est systématique. »

Les collègues femmes peuvent aussi montrer de la résistance. Comme elles ont porté à bout de bras ce métier, elles peuvent réagir lorsque, par exemple, on demande d’ajouter le titre « d’éducateur » à celui d’éducatrice dans les offres d’emploi. « On ne veut pas nier le passé non plus. Ce sont les femmes qui ont développé ces services, mais il faut se tourner vers l’avenir », explique Dominique Germain, qui soutient que les jeunes hommes doivent se voir dans la profession pour s’y intéresser.

Une diversité d’approches

Mais pourquoi est-ce important d’avoir davantage d’éducateurs dans nos services de garde? « Un milieu mixte est un milieu riche », affirme Dominique Germain. « Chacun amène son grain de sel. C’est complémentaire et enrichissant pour l’enfant », poursuit Nathan Dratler.

Cette différence plaît aussi aux parents. « On propose des activités qui sont typiquement moins féminines, et non organisées », avance Christophe Dupéré. Les éducateurs offrent également une figure d’attachement différente.

En voyant des hommes s’occuper des enfants, ces derniers comprennent que tous peuvent s’occuper d’eux, peu importe le genre. « On casse les stéréotypes », résume Nathan Dratler.

 

Catherine Couturier – Équipe Naître et grandir

Naître et grandir

Photo : GettyImages/FatCamera

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