L'apprentissage de l'humour

L'apprentissage de l'humour
Déjà, tout petit, l’enfant fait preuve d’humour. On peut l’aider à développer ce précieux atout.


Les parents sont toujours heureux de voir le premier sourire de leur bébé et, quelques semaines plus tard, de l’entendre rire. Puis, c’est ensuite à leur tour de rire de ses plaisanteries, car le sens de l’humour commence à se développer très tôt. Être capable d’aborder la vie et les problèmes avec humour est d’ailleurs une belle qualité à acquérir pour un enfant.

Qu’est-ce qui fait sourire et rire les enfants?

  • Dès sa naissance et jusque vers 6 semaines, le bébé peut sourire. Ces sourires sont cependant des réflexes. En effet, ils ne sont pas faits consciemment. Ce sont plutôt des sourires physiologiques de bien-être que le bébé peut faire après la tétée ou quand il vient de s’endormir. C’est ce que l’on appelle « sourire aux anges ».
  • C’est entre 6 et 8 semaines qu’apparaît le premier sourire que le bébé fait en réaction à quelque chose qui se produit dans son environnement. Ce sourire conscient est habituellement une réaction à la vue du visage de ses parents. Par exemple, l’enfant sourit parce qu’il imite ses parents qui lui sourient. Par ailleurs, ses sourires expriment le plaisir de les voir et d’être avec eux.
  • Vers 4 mois, le bébé commence à rire. Parmi les choses qui peuvent le faire rire, il y a les chatouilles légères, les drôles de mimiques, les grimaces, les sons comiques, le jeu de la « bibitte qui monte, qui monte, qui monte… », etc. À cette étape, les rires sont surtout provoqués par les stimulations qui lui viennent de ses sens, soit la vue, l’audition ou le toucher.
Rire en famille permet de renforcer les liens qui unissent parents et enfants.
  • Vers 8 ou 9 mois, le jeu de « coucou » l’amuse beaucoup. Le bébé rit lorsqu’il entend « coucou » et voit la personne réapparaître, car cela confirme ce qu’il pensait : la personne est toujours là, même lorsqu’il ne la voit plus. Il commence à comprendre que les objets et les gens existent toujours, même s’ils ne sont pas visibles.
  • Vers 1 an, il rit devant un comportement inattendu, par exemple si papa essaie de mettre un chapeau de bébé ou si maman marche à quatre pattes à ses côtés.
  • Vers 2 ans et demi ou 3 ans, avec le développement du langage, les mots suscitent désormais les rires du tout-petit, surtout lorsque le mauvais mot est utilisé pour désigner un objet. Par exemple, le parent dit : « Je vais aller chercher ton chapeau » et il revient avec une couche qu’il tente de lui mettre sur la tête. Les gros mots ou le fameux « pipi et caca » le font aussi beaucoup rire.
  • Vers 4 et 5 ans, l’enfant a déjà commencé à regrouper les choses en fonction de différentes catégories (ex. : les animaux) et de sous-catégories (ex. : ceux qui volent, ceux qui courent). Ainsi, un tout-petit peut trouver très drôles des situations qui ne respectent pas ces catégories. Par exemple, l’idée d’une girafe bleue qui vole dans le ciel ou d’un homme tout habillé qui prend son bain peut faire bien rire un enfant.
  • Vers 6 et 7 ans, l’enfant comprend mieux les jeux de mots et les devinettes. Il découvre alors que les mots peuvent avoir plusieurs sens et il s’amuse avec ceux-ci. Par exemple, il peut trouver cette devinette bien drôle : « Que dit une maman baleine à son petit qui bouge trop? “Cétacé” (c’est assez). » À cet âge, un enfant rit également des gestes maladroits des autres, tels que s’enfarger dans ses lacets, débouler les escaliers et renverser son jus.

Comment évolue le sens de l’humour chez l’enfant?

Contrairement aux adultes, les tout-petits peuvent rire 20 fois de suite de la même blague, car la répétition les rassure et les aide à prévoir certaines situations pour mieux s’en amuser.
  • Vers 18 mois, l’enfant commence à jouer à faire semblant. Par exemple, il fait semblant de nourrir sa poupée en lui donnant une cuillère de soupe imaginaire. Il détourne ensuite l’usage des objets en plaçant, par exemple, un bol de plastique sur sa tête pour faire croire que c’est un chapeau ou en utilisant une brosse à cheveux en guise de téléphone. C’est la naissance du sens de l’humour. Pour trouver amusant ce changement de fonction, l’enfant doit toutefois connaître la fonction première des objets.
  • Vers 2 ans, il comprend et utilise de plus en plus de mots. Il rit lorsqu’on inverse deux mots, par exemple lorsqu’un chat est appelé un chien. De même, il rit si on lui dit, par exemple : « Savais-tu que mon chien miaule? » Cela représente le deuxième stade de l’humour. Pour savoir si votre tout-petit a atteint le deuxième stade, montrez-lui l’image d’un chien et dites-lui en souriant : « Regarde le beau chat! » Si votre enfant sourit aussi, c’est qu’il a compris que c’est un jeu. S’il semble surpris, c’est qu’il en est encore à l’étape d’apprendre le nom des choses.
  • Vers 3 ans et demi, il aime imaginer des situations comiques. À cet âge, il trouve drôle de relier deux choses ou concepts qui ne vont pas ensemble (ex. : des vaches qui volent dans le ciel, maman qui saute d’un gratte-ciel à l’autre pour éviter le trafic, une auto qui peut rouler sous l’eau pour aller observer les poissons, du gâteau au chou-fleur).
  • Vers 4 et 5 ans, l’enfant aime jouer avec les mots. S’amuser à faire des rimes, surtout si elles sont ridicules, l’aide à découvrir la complexité du langage. Le parent peut ainsi jouer en commençant une phrase que l’enfant devra terminer par une rime, par exemple : « Je m’en vais au magasin… pour acheter des raisins! »
  • Entre 6 et 8 ans, il répète les blagues ou les devinettes racontées par les adultes. Cela lui permet de comprendre peu à peu que les mots peuvent avoir plusieurs sens et qu’il existe différentes façons d’être drôle. C’est ce qui le mènera plus tard, soit vers 10 à 12 ans, à utiliser des formes plus diversifiées d’humour, telles que l’ironie et le sarcasme.

À quoi sert le sens de l’humour?

Un enfant qui a le sens de l’humour est plus confiant. Cela peut l’aider à surmonter sa timidité et mieux réagir s’il se fait taquiner par d’autres enfants. Au lieu de se battre ou de se retirer dans sa bulle, l’enfant utilise l’humour pour se faire accepter et avoir des amis.

Avoir un bon sens de l’humour aide le tout-petit à prendre la vie du bon côté et à dédramatiser les difficultés qu’il rencontre. Par exemple, l’enfant qui a un bon sens de l’humour peut décider de rire de certaines situations plutôt que de se fâcher ou de réagir de façon agressive. Par ailleurs, les enfants qui ont un bon sens de l’humour sont reconnus comme étant plus optimistes et ayant une meilleure estime de soi.

De plus, rire peut diminuer le stress et certaines peurs. Ainsi, un tout-petit qui n’arrive pas à mettre son chandail pourra dire en riant : « Maman, je crois que la laveuse a fait rapetisser mon chandail! » au lieu de se mettre en colère, ce qui diminuera la tension. De même, la peur du tonnerre, par exemple, peut diminuer si l’enfant s’imagine qu’il s’agit de coups frappés sur un tambour.

Chez l’enfant, l’humour est aussi associé à la créativité qui permet, en combinant de façon novatrice des idées ou des objets, d’envisager une situation de différentes façons ou de trouver plusieurs solutions à un problème.

Enfin, l’humour est aussi une occasion de partager un moment de plaisir et de rire avec d’autres. En effet, l’humour n’est possible que si l’on est en présence et en interaction avec d’autres personnes.

Comment développer le sens de l’humour chez l’enfant?

La famille est un endroit idéal pour apprendre à devenir drôle. La première chose à faire pour stimuler le sens de l’humour de votre tout-petit est d’être drôle vous-même, car il développe beaucoup son sens de l’humour par imitation.

Développer le sens de l’humour d’un enfant, c’est lui donner un atout qui l’accompagnera tout au long de sa vie.

Par ailleurs, vos réactions aux grimaces ou aux blagues de votre enfant ont une grande influence sur le développement de son sens de l’humour. En effet, si vous ne riez jamais des pitreries de votre enfant ou s’il est puni dès qu’il expérimente des choses, il y a peu de chance qu’il continue à vouloir faire rire.

Le sens de l’humour d’un tout-petit se développe en fonction des réactions de son entourage. Vous êtes son meilleur public. Pour cette raison, n’hésitez pas à rire de ses blagues, même si vous ne les trouvez pas toujours drôles.

Il ne faut pas pour autant rire à toutes ses blagues puisque certaines peuvent être inappropriées. Il vous revient ainsi de le guider dans cet apprentissage de l’humour en lui précisant que certains mots peuvent choquer des personnes ou les blesser.

De même, abordez les petits problèmes de la vie (ex. : vêtement taché, vase cassé, recette manquée) avec humour et montrez à votre enfant que vous êtes capable d’en rire. Ainsi, votre enfant découvrira que tout le monde peut vivre des échecs. Votre réaction l’aidera par ailleurs à prendre avec humour ses propres déceptions.

Des idées pour développer l’humour de votre enfant au quotidien

  • Au moment de mettre une couche à votre bébé, mettez-la plutôt sur votre tête, puis faites semblant de la chercher partout : « Mais où est cette couche? Qu’est-ce que j’ai bien pu en faire? » (Dès 6 mois.)
  • À table, tendez un objet (ex. : verre, cuillère) à votre enfant en faisant semblant de vouloir lui donner. Dès qu’il tend la main pour le prendre, éloignez-le brusquement en chantonnant : « Non, non, non! » Recommencez en souriant. Après quelque temps, c’est probablement lui qui vous fera cette même blague. (Dès 8 mois.)
  • Lors d’une promenade en poussette, demandez à votre partenaire de la pousser et placez-vous devant votre enfant. Marchez devant lui à reculons en grimaçant et en poussant de petits cris de peur comme s’il voulait vous écraser. Laissez la poussette s’approcher de vous et sautez sur le côté au dernier moment. (Dès 12 mois.)
  • Avant de lire une histoire, dites à votre enfant qu’un mot interdit va se glisser dans l’histoire durant votre lecture. Dès qu’il l’entend, il doit le répéter et crier : « Non! » Lisez l’histoire normalement et, sans prévenir, remplacez un mot par le mot interdit, par exemple : « Prout! » (Dès 2 ans.)
  • Amusez-vous avec votre enfant à jouer avec les mots (ex. : faire des rimes ou jouer à découvrir le mot, comme un animal, auquel pense l’autre en lui posant des questions). (Dès 3 ans.)
  • Inventez une histoire à plusieurs. Par exemple, papa dit la première phrase, l’enfant ajoute sa phrase, puis c’est au tour de maman, et ainsi de suite. Le résultat sera souvent surprenant et bien drôle. (Dès 3 ans.)
  • Lisez des livres et écoutez des films avec votre enfant et observez les situations qui le font rire. Vous apprendrez beaucoup en discutant avec lui de ce qu’il trouve tout particulièrement drôle (un geste, une parole, une situation), pourquoi il trouve cela drôle et ce que les personnages auraient pu faire autrement. Ces informations pourraient vous être utiles si votre enfant se trouve dans une situation où l’humour pourrait l’aider à surmonter une difficulté ou une frustration, par exemple. Vous pourriez alors lui dire : « C’est frustrant que tu ne puisses pas jouer avec ce jeu, mais te rappelles-tu ce que Max avait fait dans le film lorsque cela lui était arrivé? » (Dès 5 ans.)

À retenir

  • Le sens de l’humour apparaît vers 18 mois et prend différentes formes en fonction de l’âge de l’enfant.
  • Les parents ont un rôle important à jouer dans le développement de l’humour chez leur enfant.
  • Avoir un bon sens de l’humour est très utile, entre autres pour prendre la vie du bon côté, pour dédramatiser les difficultés ainsi que pour diminuer le stress et certaines peurs.

 

Naître et grandir

Révision scientifique : Diane Dubeau, professeure au Département de psychoéducation et psychologie de l’Université du Québec en Outaouais
Recherche et rédaction :Équipe Naître et grandir
Mise à jour : Mai 2018

 

Photos : iStock.com/princessdlaf et GettyImages/olesiabilkei et diane39

 

Ressources et références

Note : Les liens hypertextes menant vers d’autres sites ne sont pas mis à jour de façon continue. Il est donc possible qu’un lien devienne introuvable. Dans un tel cas, utilisez les outils de recherche pour retrouver l’information désirée.

Livres pour les enfants

  • GRAVEL, Élise. Une patate à vélo. La courte échelle, 2016, 30 p. (0 à 4 ans). www.groupecourteechelle.com
  • GERVAIS, Bernadette et Francesco PITTAU. C’est dingue! Gallimard Jeunesse, coll. Giboulées, 2009, 28 p. (3 à 6 ans). www.gallimard-jeunesse.fr
  • FEIFFER, Jules. Aboie, Georges! L’école des loisirs, Collection Pastel, 2000, 33 p. (3 à 6 ans). www.ecoledesloisirs.fr
  • PEF. La belle lisse poire du prince de Motordu. Gallimard Jeunesse, 2010, 44 p. (3 à 7 ans). www.gallimard-jeunesse.fr
  • PASQUET, Jacques (texte) et Manon GAUTHIER (illustrations). Coucou bébé ! Éditions de l’Isatis, 2011, 24 p. (Vers 4 ans). www.editionsdelisatis.com
  • RAMOS, Mario. Mon ballon. L’école des loisirs, collection Pastel, 2012, 48 p. (6 à 8 ans). www.ecoledesloisirs.fr

Livres pour les parents

  • BEAUCOURT, Cécile. 100 façons de faire rire un bébé. Larousse, 2011, 128 p.
  • FORTIN, Bruno. Vivre avec humour. CPF, 2007, 140 p.
  • HALLOWELLL, Edward M. L’enfance du bonheur. Aider les enfants à intégrer la joie dans leur vie. Les Éditions de l’Homme, 2004, 304 p.
  • HUMBEECK, Bruno et Maxime BERGER. L’humour pour aider à grandir. Les Éditions Mols, 2008, 136 p.
  • JOURDAN-IONESCU, Colette. « L’humour comme facteur de résilience pour les enfants à risque et leur famille », Bulletin de psychologie, no 510, 2010, p. 449-455. www.cairn.info
  • VINIT, Florence. Docteur Clown à l’hôpital. Une prescription d’humour et de tendresse. Éditions du CHU Sainte-Justine, collection Univers Parents, 2010, 88 p.

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