Trop de mamans souffrent en silence

Trop de mamans souffrent en silence
Par Julie Fortier, Rédactrice en chef, Naître et grandir
La dépression post-partum touche de 15 à 20% des nouvelles mères. Ça peut être votre amie, votre sœur, votre voisine, votre collègue… ou vous.

Imaginons un instant cette situation qui pourrait très bien vous arriver. Lors dune de vos promenades, vous croisez au parc cette maman avec qui vous avez sympathisé l’automne dernier. « Comment ça va? » « Comment va bébé? » Vous vous racontez les nuits, les dents, les boires, les poussées de croissance…

Pendant quelques instants, cette maman avec qui vous parlez se sentira bien, presque normale. Cependant, ce qu’elle ne vous dira pas, c’est qu’en vérité, elle est toujours de mauvaise humeur et fatiguée, qu’elle se sent inutile, presque vide à l’intérieur. Elle n’osera jamais l’avouer : plus rien ne l’intéresse, pas même son bébé. L’air frais lui fait un peu de bien, mais en général depuis qu’elle est maman, elle trouve la vie très difficile.

Cette mère qui présente plusieurs symptômes de dépression post-partum peut être votre amie, votre sœur, votre voisine, votre collègue… La dépression touche de 15 à 20 % des mères. Sur les quelque 82 000 femmes qui accouchent chaque année*, c’est plus de 13 000 qui en souffriront. De ce nombre, environ 7 % présenteront des symptômes importants de dépression au cours des 3 premiers mois suivant l’accouchement; et 19 %, des symptômes légers ou modérés.

En parler, un premier pas

Malheureusement, ayant peur de passer pour une mauvaise mère, bien des femmes se taisent. D’autres se rendront compte après coup qu’elles ont souffert de dépression. C’est ce qui est arrivé à notre chroniqueuse, Catherine Goldschmidt, après sa première grossesse. Comme elle le dit si bien dans ce texte touchant, si elle avait su…

« Si j’avais su, j’aurais parlé. Si j’avais su quel nom portait mon ennemie, je me serais battue contre elle. Je me serais inscrite à des activités malgré l’hiver. Je me serais confiée à mon médecin. J’aurais rencontré plus souvent d’autres parents. Bref, j’aurais trouvé des alliés pour m’aider à profiter pleinement de ma nouvelle vie de maman. Lors de mes deux autres congés de maternité, je suis restée à l’affût des symptômes et, croyez-moi, la petite sournoise est restée sur le palier! »

L’effet COVID-19

Selon certaines études, près de la moitié des cas de dépression maternelle ne seraient pas diagnostiqués ou traités. Nancy Verreault, psychologue qui a fait son doctorat sur la dépression post-partum, déplore aussi que les symptômes dépressifs souvent observés durant la grossesse sont encore peu traités. En effet, plus du tiers des femmes qui font une dépression post-partum commenceraient à avoir des symptômes pendant qu’elles sont enceintes. Des mesures préventives prises durant la grossesse pourraient diminuer le risque de dépression après l’accouchement, souligne la psychologue.

À ne pas perdre de vue non plus : le stress causé par la pandémie de COVID-19. Le premier confinement aurait eu un effet important sur la santé mentale des femmes enceintes, selon une étude entreprise en 2020. La proportion des femmes enceintes québécoises suivies dans cette étude rapportant des signes de dépression était alors de 40 %. Selon la chercheuse du CHU Sainte-Justine qui a lancé cette étude, Annick Bérard, il est important de se soucier davantage de la santé mentale des femmes enceintes, non seulement pour elles, mais aussi pour la santé du bébé à naître.

Être soignée…

Tout comme les autres problèmes de santé mentale, la dépression prénatale et post-partum doit être traitée. Le soutien social des amis, des parents ou des groupes d’entraide est certes essentiel, mais il se peut que cela ne suffise pas, affirme Nancy Verreault. Il est donc important d’en parler avec un médecin ou un psychologue.

Le traitement proposé dépendra de l’importance des symptômes et des problèmes de santé mentale de la mère avant sa grossesse. Une psychothérapie pourrait être recommandée. Certaines auront peut-être aussi besoin d’antidépresseurs pour quelque temps, ajoute la psychologue.

Mais peu importe la démarche choisie, il est important de savoir que plus la dépression est détectée tôt, plus il sera facile d’en guérir.

*Donnée estimée à partir des données provisoires de l’ISQ sur les naissances simples et multiples en 2020.

 

Mise à jour le 24 janvier 2022
Publiée originalement le 19 mars 2015

Naître et grandir

 

Photo : GettyImages/ljubaphoto

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