Bien qu’on en parle encore peu, certains pères vivent difficilement l’arrivée d’un enfant.Longtemps tabou, le sujet de la dépression post-partum chez les nouvelles mères est abordé de plus en plus dans les médias. Malheureusement, on parle encore très rarement des pères qui vivent difficilement l’arrivée d’un enfant.
Un père sur 10 touché
En 2019, des chercheurs chinois ont analysé les études disponibles sur la dépression paternelle pendant la grossesse et après l’arrivée du bébé. La dépression toucherait ainsi près de 10 % des pères pendant la grossesse. Cette proportion serait de 14 % pendant le premier trimestre. Après l’arrivée de l’enfant, ce serait environ 9 % des pères qui souffriraient de dépression, plus particulièrement entre 3 et 6 mois après la naissance.
Selon Robyn Horsager-Boehrer, médecin à l’Université du Texas Southwestern, les pères souffrant de dépression peuvent vivre des symptômes similaires à ceux des mères comme de la fatigue ou des changements d’appétit. Cependant, ils risquent moins d’exprimer des émotions comme de la tristesse. Certains hommes vont plutôt démontrer de la colère, de l’irritabilité, une baisse de motivation, des maux de tête ou de ventre et de la difficulté à se concentrer. L’abus de substance comme l’alcool ou les médicaments est aussi fréquent.
Les facteurs de risque
Plusieurs études indiquent que la dépression de la mère augmente le risque du père d’en souffrir lui-même. On estime d’ailleurs que la moitié de ceux dont la conjointe est dépressive présentent eux aussi des symptômes de dépression.
Des études ont également mis en évidence d’autres facteurs pouvant nuire à la santé mentale d’un père. Par exemple, s’il se sent exclu de la relation entre la mère et l’enfant ou s’il n’est pas satisfait de la relation conjugale, cela peut affecter son état d’esprit.
Les pères qui ont de la difficulté à s’adapter à leur nouveau rôle sont aussi plus vulnérables tout comme ceux qui manquent de sommeil ou qui ont un bébé prématuré ou avec des besoins particuliers. C’est également le cas des hommes anxieux par rapport à leur situation économique et de ceux qui ont déjà connu des problèmes de santé mentale dans le passé.
Des conséquences sur le développement
Malheureusement, il est difficile pour les hommes dépressifs d’obtenir de l’aide, car l’attention de leur entourage est souvent entièrement dirigée vers leur conjointe. Par exemple, une étude réalisée à l’université McGill en 2015 révélait qu’à peine 23 % de ces pères ont parlé de leurs sentiments à quelqu’un et que 35 % d’entre eux auraient aimé le faire, mais se sentaient inconfortables ou ne savaient pas vers qui se tourner.
Certaines associations comme l’Académie américaine de pédiatrie insistent d’ailleurs sur la nécessité de reconnaître aussi les pères vivant une dépression et de ne pas s’intéresser seulement à la santé mentale de la mère.
Le psychiatre américain, Jonathan R. Scarff, souligne pour sa part que la dépression chez le père peut avoir des conséquences négatives sur l’enfant. Ainsi, des études ont révélé que les pères dépressifs sont moins sensibles à leur bébé et peuvent même faire preuve d’hostilité à son égard.
C’est ainsi que la dépression paternelle pourrait influencer le développement des tout-petits. En effet, lorsqu’un père est dépressif, son enfant a plus de risque de vivre des problèmes émotifs, comportementaux ou sociaux. Reconnaître la dépression paternelle est donc primordial autant pour ces hommes que pour leur famille.
La faute aux hormones?
Les pères aussi vivent des bouleversements hormonaux pendant la grossesse, souligne Jonathan Scarff. Ces changements aideraient les pères à former un lien plus fort avec leur enfant. Par exemple, la réduction de la testostérone diminuerait l’agressivité et favoriserait une réponse plus chaleureuse aux pleurs du bébé. Cependant, ces fluctuations auraient été associées aux symptômes dépressifs. |
Pour connaître les symptômes, les causes et les traitements possibles, consultez nos fiches sur la dépression prénatale et la dépression post-partum.
Sources : Journal of Affective Disorders, Montreal Gazette, Pediatrics et Innovations in clinical neuroscience
Mise à jour le 5 avril 2022
Publiée originalement le 8 octobre 2015
Photo : iStockphoto/BigPappa