Comment prévenir la grossophobie dès l'enfance?

Comment prévenir la grossophobie dès l'enfance?
Comment prévenir la grossophobie dès l'enfance?
Voyez comment favoriser une image corporelle positive et prévenir la grossophobie avec votre enfant.

27 février 2023 | Il n’y a pas que les adultes qui se préoccupent de leur apparence. Très tôt, les enfants peuvent juger leur image et celle des autres. Il est donc important de favoriser une image corporelle positive et de prévenir la grossophobie avec les enfants. Mais comment s’y prendre?

La question du poids et de l’apparence préoccupe bien des gens. Selon un sondage mené en 2022 pour l’organisme ÉquiLibre auprès de 1 800 personnes âgées de 14 ans et plus, 62 % des répondants souhaitent maigrir, peu importe leur poids, et 44 % disent que leur poids les rend malheureux. Mais saviez-vous que certains tout-petits commencent aussi à s’inquiéter de leur apparence dès l’âge de 3 à 5 ans?

L’apparence et le poids font partie des principales causes d’intimidation à l’école.

« Ne pas aimer son apparence peut entraîner une relation malsaine avec les aliments, réduire l’estime de soi en plus de mener à l’anxiété, à la dépression et à l’isolement, » a fait valoir Andrée-Ann Dufour-Bouchard, nutritionniste et cheffe de projets pour ÉquiLibre, lors d’un symposium sur la grossophobie et l’image corporelle tenu en ligne le 16 février dernier.

La grossophobie et ses manifestations

La grossophobie, c’est l’ensemble des comportements, des réactions, des gestes, des commentaires et des préjugés qui discriminent, pénalisent et dévaluent les personnes grosses. C’est penser par exemple que les personnes grosses manquent de volonté, ont de mauvaises habitudes de vie, ne peuvent pas être belles ou en santé parce qu’elles sont grosses.

Très tôt, les enfants peuvent intégrer ces messages parce qu’ils les entendent autour d’eux. L’industrie du divertissement transmet aussi des messages grossophobes qui peuvent les influencer. « Les personnages gros que ce soit dans les dessins animés, les films ou les émissions pour enfants sont souvent associés à la méchanceté, la paresse ou à un manque de courage, mentionne Édith Bernier, auteure du livre Grandir sans grossophobie, favoriser une image corporelle saine chez nos enfants (Trécarré). Ce ne sont pas eux les héros. »

En revanche, la minceur est souvent associée aux bons personnages et à des caractéristiques positives. Cela amène les enfants à préférer les silhouettes minces. « Déjà à partir de 8, 9 ou 10 ans, il y a des petites filles qui ont internalisé que la beauté passe par la minceur et que le secret pour l’atteindre c’est de faire des diètes », souligne l’auteure.

Édith Bernier ajoute que la grossophobie se manifeste aussi à travers le jugement des parents qui ont un enfant gros. « Un parent qui a un enfant gros passe souvent pour un mauvais parent, un parent qui ne fait pas faire d’exercices à son enfant et qui laisse son enfant être élevé par la télé. » Cette stigmatisation amène les parents à ressentir de la honte et de la culpabilité. Cela peut aussi affecter négativement la relation parent-enfant.

Grossophobie, obésité et santé

Un préjugé courant quand il est question de lutte contre la grossophobie, c’est de dire que l’on fait ainsi la promotion de l’obésité. « Bien sûr que non, dit Édith Bernier. Prévenir la grossophobie, c’est faire la promotion du respect pour les personnes de toutes les grosseurs. » Cela ne se fait pas au détriment de la santé. « Tout le monde, peu importe son poids, tire des bénéfices à être actif et à manger sainement », poursuit-elle. Si un parent s’inquiète pour la santé de son enfant, il est important d’aller consulter. Lors du symposium, plusieurs conférenciers ont rappelé que le poids était une composante parmi d’autres pour déterminer l’état de santé d’une personne. « Il faut arrêter de perpétuer l’idée que chaque personne est entièrement responsable de son poids. Le corps n’est pas aussi malléable qu’on nous le laisse croire, a indiqué la psychologue Stéphanie Léonard, conférencière au symposium. Plusieurs facteurs hors de notre contrôle influencent notre poids. » Elle rappelle l’idée d’accepter la diversité corporelle. « On n’est pas censés avoir tous le même corps et rentrer tous dans le même moule. »

 

Conseils pour favoriser une image corporelle saine et prévenir la grossophobie

Sachant que l’image corporelle se construit dès la petite enfance et que les préjugés s’installent tôt, vous avez un rôle à jouer pour accompagner votre enfant. Voici quelques attitudes gagnantes.

  • Évitez de dire du mal de votre apparence ou d’associer les aliments au poids. Essayez aussi de faire la paix avec votre propre corps, acceptez-le et appréciez-le.
  • N’acceptez pas que des gens de l’entourage de votre enfant fassent des commentaires sur son poids ou son alimentation. « Vous pouvez expliquer que vous ne voulez pas que votre enfant construise son estime de soi sur son apparence ou développe une relation malsaine avec la nourriture », dit Édith Bernier. Elle fait d’ailleurs partie des professionnels qui ont créé une lettre que les parents peuvent remettre à leur médecin pour lui demander de ne pas parler du poids et de l’apparence physique de leur enfant devant lui.
  • Utilisez le mot gros comme un qualificatif descriptif neutre et présentez le poids comme une caractéristique physique et non comme un indicateur de valeur. Parlez de poids comme vous parlez de la longueur des cheveux ou de la couleur des yeux d’une personne.
  • Parlez avec votre enfant des stéréotypes qu’il voit sur les écrans. « Demandez-lui s’il trouve ça normal que les personnages gros soient souvent méchants, poursuit l’auteure. Demandez-lui s’il pense que c’est comme ça dans la vraie vie aussi. »
  • Amenez votre enfant à prendre conscience que chaque personne est unique, et que la diversité est normale et agréable. Favorisez l’acceptation de cette différence chez lui et chez les autres.
  • Encouragez les activités physiques pour le plaisir de bouger. Aidez votre enfant à trouver des activités qu’il aime et bougez aussi avec lui. « Encouragez-le à faire son activité pour ses aspects positifs (c’est amusant, ça lui fait voir ses amis et ça l’aide à se dépasser) et non dans une perspective d’obligation ou de compensation pour perdre du poids », propose Édith Bernier.
  • Faites remarquer à votre enfant tout ce que son corps lui permet d’accomplir (ex. : se balancer, faire du vélo, courir, nager, faire des câlins).
  • Valorisez votre enfant pour ses qualités personnelles, comme sa générosité, son sens de l’humour, sa créativité. Parlez aussi de vous et des autres en mettant l’accent sur les qualités, les talents et les forces plutôt que sur l’apparence.
  • Misez sur le plaisir de manger. « Amenez votre enfant à découvrir les aliments avec ses sens et à les goûter pour le plaisir », indique la nutritionniste Andrée-Ann Dufour-Bouchard. Évitez de classer les aliments en bons ou mauvais aliments pour la santé. « Dites des fruits et des légumes au lieu des bons aliments de même que des chips, des bonbons, du chocolat au lieu des cochonneries pour ne pas accorder une valeur morale aux aliments », ajoute Édith Bernier.

Les bienfaits d’une image corporelle positive

Avoir une image corporelle positive, c’est reconnaître que notre corps est unique et accepter qu’il change, explique Andrée-Ann Dufour-Bouchard. « C’est normal d’aimer moins certaines parties de son corps ou d’aimer moins son apparence certains jours, précise la nutritionniste. L’important, c’est d’avoir globalement une perception positive de son corps même si tout pas parfait au quotidien. » Être satisfait de son apparence permet de traiter son corps avec bienveillance et d’avoir confiance en soi. Cela permet aussi de manger et de bouger pour le plaisir parce que ça fait du bien et non dans le but de modifier son apparence.

 

Pour en savoir plus, consultez notre fiche L’image corporelle chez les enfants

Ressources

Pour les parents

Pour les enfants

  • C’est mon corps!, Élise Gravel, Éditions Scholastic, 2022, 32 p.
  • Emma n’aime pas les moqueries, Marie-Michèle Ricard, Éditions Midi trente, 2019, 40 p.
  • Gloria sort du moule, Guylaine Guay, Les éditions de la Bagnole, 2022, 52 p.
  • Le Joli bedon rond de Marion, Renée Wilkin, Éditions Boomerang, 2022, 32 p.
  • Lili Macaroni : je suis comme je suis !, Nicole Testa, Dominique et compagnie, 2018, 24 p.
  • Lou aime le dessert, Marie-Michèle Ricard, Éditions Midi trente, 2019, 40 p.
  • Marlène baleine, Davide Cali, Éditions Tom’Poche, 2014, 32 p.
  • Tout le monde!, Élise Gravel, Éditions Scholastic, 2021, 40 p.

 

Julie Leduc – Équipe Naître et grandir

Naître et grandir

Photos : GettyImages/ stsmhn et Valeria Blanc

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