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Les recommandations sur le port du masque pendant l’accouchement manquent de clarté, selon des organismes de soutien à l’accouchement.
12 novembre 2020 | La pandémie a entraîné la mise en place de mesures de prévention dans les hôpitaux, ce qui peut affecter le déroulement de l’accouchement. De plus en plus, des voix s’élèvent toutefois pour réclamer des assouplissements, en particulier concernant le port du masque.
C’est une recommandation du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) qui sème la confusion. Selon un document du MSSS, le port du masque est non requis, mais recommandé lors de l’accouchement pour les femmes enceintes qui sont COVID négatives ou dont le statut est inconnu. Pour les femmes enceintes COVID positives, le port du masque est nécessaire en tout temps en présence du personnel. Le MSSS précise toutefois qu’il pourrait être acceptable que la femme qui accouche ne porte pas le masque de procédure pendant le travail si elle ne le tolère pas.
Une pétition ayant récolté près de 10 000 signatures revendique d’ailleurs le droit d’accoucher sans masque. Plusieurs organismes de soutien à l’accouchement ont également fait valoir leurs inquiétudes dans un communiqué publié en ligne le 7 novembre dernier.
Selon Josyane Giroux, sage-femme et présidente du Regroupement Les sages-femmes du Québec, c’est l’ajout de la mention « mais recommandé » qui pose problème dans la directive du MSSS. « Il y a une certaine confusion quant à l’interprétation des recommandations, confirme Annick Bourbonnais, présidente de l’Association québécoise des accompagnantes à la naissance. Elles sont appliquées différemment dans les établissements. Certains vont dire qu’ils n’obligent pas les femmes à porter le masque, mais que c’est chaudement recommandé. Qu’est-ce que cela veut dire? »
Par exemple, au CHU de Québec, il est demandé depuis peu aux femmes qui accouchent de le porter « autant que possible ». Au CHU Sainte-Justine, tant que la patiente n’a pas reçu le résultat de son test de dépistage, par mesure de précaution, l’infirmière peut lui demander de porter un masque. Le délai pour recevoir le résultat peut prendre 24 heures.
Par ailleurs, des femmes enceintes qui ont témoigné sur les réseaux sociaux se sont fait dire qu’elles devaient porter le masque lors de l’accouchement alors que d’autres non.
Anxiété et stress
Dans d’autres hôpitaux, on demande aux femmes de porter le masque en spécifiant qu’elles pourront l’enlever si elles ne le tolèrent plus. « Il semble y avoir de plus en plus de pression pour qu’elles le portent le plus longtemps possible, souligne Josyane Giroux. C’est quand même insidieux pour une femme qui accouche de devoir faire ce choix. Cela amène une réflexion difficile en plein travail actif. »
La confusion autour du port du masque a beaucoup augmenté l’anxiété et le stress dans les familles qui attendent un bébé, ajoute Annick Bourbonnais. « De nouveaux parents me contactent parce qu’ils ont peur de ce qui se passe actuellement. Ils aimeraient avoir un suivi sage-femme ou les services d’une accompagnante. Certains songent même à ne pas se rendre à l’hôpital pour accoucher. »
Selon Josyane Giroux, de plus en plus de groupes se forment d’ailleurs sur les réseaux sociaux pour partager de l’information sur les accouchements non assistés. « Pour accoucher, une femme a besoin de se sentir en sécurité à l’hôpital, explique-t-elle. Si ce n’est pas le cas et qu’elle vit déjà beaucoup d’anxiété, elle peut se mettre à réfléchir à cette possibilité. » La sage-femme rappelle donc qu’il est important que les professionnels soient vigilants si une famille semble envisager cette option et qu’ils l’informent des risques qui y sont associés.
Des répercussions sur le déroulement de l’accouchement La respiration est un outil très important pour la gestion de la douleur pendant le travail, souligne Josyane Giroux. « Il n’y a pas encore d’études sur le port du masque pendant l’accouchement. Nous savons toutefois que les femmes ont besoin de rester calmes, de bien respirer, de faire des sons pendant le travail. C’est certain qu’avec un masque, cela peut devenir très inconfortable, en particulier quand les contractions sont très fortes. » Les auteurs de la pétition soulignent pour leur part que l’accouchement est un effort physique d’une extrême intensité et que le port du masque pourrait provoquer des malaises comme l’hyperventilation, l’accélération du rythme cardiaque, des vertiges ou des vomissements. |
Rendre les directives sur le masque plus claires
« Je crois que le ministère donne des recommandations ambivalentes », déplore Annick Bourbonnais. Celle-ci estime que des directives plus claires permettraient de rassurer tout le monde. Les signataires du communiqué demandent pour leur part que la Direction de la santé publique ainsi que la Direction santé mère-enfant du MSSS s’assurent que les établissements comprennent bien que le port du masque n’est pas requis pour les personnes qui accouchent, en particulier pour les femmes qui ne sont pas COVID positive ou dont le statut est inconnu.
Selon Josyane Giroux, il faut aussi envisager d’autres options comme des équipements de protection individuelle adéquats pour le personnel soignant ou des façons d’accélérer les tests de dépistage. En mettant le bien-être des familles au cœur des réflexions, il serait possible pour les femmes d’accoucher sans masque tout en garantissant la sécurité des autres personnes dans la pièce.
En attendant que la question se règle, Annick Bourbonnais suggère aux futures mères de bien se préparer avant le jour de l’accouchement. Elles peuvent par exemple partager leurs craintes avec le professionnel de la santé qui suit leur grossesse et se renseigner sur les procédures en place dans l’établissement où elles vont accoucher. « En connaissant leurs options avant, elles pourront prendre des décisions éclairées et réfléchies, souligne-t-elle. Elles doivent également se rappeler que le port du masque n’est pas requis et qu’elles sont libres de ne pas le porter si elles sont inconfortables. »
Sources : MSSS, Change.org, Accoucher en temps de crise et Radio-Canada
Kathleen Couillard – Naître et grandir
Photo : GettyImages/FatCamera