Adoption et procréation assistée: comment en parler à son enfant?

Adoption et procréation assistée: comment en parler à son enfant?
Adoption et procréation assistée: comment en parler à son enfant?
Raconter l’histoire de sa naissance à enfant adopté ou conçu par procréation assistée, c’est important. Comment le faire et à quel moment?

25 février 2020 | « Dis maman : c’est qui ma maman? » Cette phrase, Catherine l’a toujours en tête et elle se souvient très bien du jour où son enfant lui a posé cette question.

« J’étais à l’épicerie. Je m’y étais pourtant préparée, mais elle m’a complètement prise au dépourvu. Je ne savais plus quoi répondre », confie la maman de deux enfants adoptés. Expliquer l’adoption à son enfant, ce n’est en effet pas facile.

De même, expliquer sa naissance à un enfant conçu par don de sperme ou d’ovule, par exemple, peut faire peur à certains parents. Comment le dire? À quel moment? Il faut savoir trouver les bons mots, ne pas brusquer, et rassurer, soutient Dre Marie-Alexia Allard, psychologue. Mais surtout, elle conseille « d’être le plus transparent possible ».

Avant tout, par contre, les parents doivent s’approprier l’histoire de la naissance de leur enfant et se la raconter avant de la raconter, ajoute-t-elle. Ils n’ont pas non plus à attendre que l’enfant pose des questions sur sa conception ou son identité, ils peuvent commencer très tôt à en parler. « On peut raconter sa véritable histoire, même à un bébé. En choisissant des mots simples, des histoires courtes. "Nous sommes allés te chercher à tel endroit…" », affirme la psychologue.

Trouver les bons mots

Une démarche qu’encourage également Anne-Marie Morel, présidente de la Fédération des parents adoptifs du Québec : « Il faut en parler, sans nécessairement donner toute l’information au début. Expliquer que l’on a attendu longtemps l’enfant, qu’on était heureux d’aller le chercher. »

Ce conseil peut aussi s’appliquer aux familles monoparentales, homoparentales et hétéroparentales qui ont recours à un don de sperme ou d’ovule pour devenir parents. « Dans tous les cas, il est possible de raconter une histoire rassurante, dit Marie-Alexia Allard. Lorsque l’enfant est tout petit, l’utilisation d’images facilite sa compréhension. On peut dire, par exemple, "qu’un docteur nous a aidés à mettre des billes d’or ou des graines de vie dans le ventre de maman." »

« Quand l’enfant grandit, on peut expliquer "qu’il a été conçu grâce à quelqu’un qui voulait aider des personnes à devenir parents", poursuit la psychologue. Vers 7 ou 8 ans, on peut parler de "géniteur" à un enfant, car l’image des graines de vie n’est plus utile à cet âge-là. »

Pour sa part, Catherine a recours à des photos avec ses deux enfants adoptés. « Pour chacun, nous avons réalisé un album photo avec des images du voyage et du jour où nous avons été les chercher. On les regarde souvent ensemble. J’ai l’impression que ça les rassure. »

À éviter

Ne rien dire, ne pas répondre aux questions ou parfois même mentir peut sembler, sur le coup, plus simple pour certains parents, mais Marie-Alexia Allard et Anne-Marie Morel le déconseillent fortement. « Aujourd’hui, toutes les études montrent que ce n’est pas un bon choix. Le secret, c’est toujours lourd dans une famille », explique la psychologue, qui plaide pour un maximum de transparence.

« Pour l’adoption, l’enjeu le plus crucial, c’est l’attachement, précise de son côté la présidente de la Fédération des parents adoptifs du Québec. Ces enfants ont déjà perdu un parent, parfois des nounous… Il ne faut pas trahir le lien de confiance qui s’est recréé, c’est primordial. »

Prendre du recul

« C’est de ta faute! » « Tu n’es pas mon papa! » Même si on est bien préparé, certaines paroles prononcées par un enfant peuvent faire mal. Comme l’explique Anne-Marie Morel, les parents doivent apprendre à se détacher de leurs souffrances d’adultes pour « accueillir la colère de l’enfant ». Pas toujours facile, convient-elle toutefois.

« En tant que parents, nous sommes impliqués émotivement. C’est pour cela qu’il est conseillé de se faire aider », ajoute Anne-Marie Morel. Elle conseille particulièrement aux parents d’enfants victimes de violence ou de traumatismes de se faire accompagner par des professionnels.

Chercher des réponses

Selon son stade de développement, l’enfant peut aussi poser des questions qui peuvent être déstabilisantes. « En tant qu’adultes, il est alors possible de dire : "C’est une bonne question, je te réponds plus tard", si on n’est pas très à l’aise », estime la psychologue.

Plus tard, vers 8 ans, les parents peuvent faire évoluer l’histoire qu’ils ont commencé à raconter à l’enfant. « Au début, on raconte en fonction de ce que l’enfant peut comprendre et avec le temps, on peut apporter plus de détails », explique Marie-Alexia Allard. Pour s’aider, les couples peuvent se tourner vers la littérature jeunesse, très riche sur ces sujets, ajoute la psychologue.

Suggestions de livres sur l’adoption

  • La couleur de l’adoption, Manuelle Alix-Surprenant et Renaud Vinet-Houle, éditions Alias, 2018.
  • L’adoption : « Pis, comment ça se passe? », Nathalie Goyer, 2017.
  • S’apprivoiser mutuellement : l’adoption, Gwen Bobbé, 2018.

Suggestions de livres sur la procréation assistée

  • Comment on fait les bébés, d’Isabelle Hamesson et Maud Legrand, Les 400 coups, 2019.
  • D’où je viens? Le petit livre pour parler de toutes les familles, Serge Hefez, Stéphanie Duval et Isabelle Maroger, éditions Bayard, 2019.
  • Le mystère des billes d’or, Jules Asselin et Ninon Pelletier, 2016. (Pour familles hétéroparentales)
  • Little Treasure, Anat Georgy et Shahar Leibovich, 2011. (Pour familles monoparentales)
  • Ulysse et Alice, Ariane Bertouille et Marie-Claude Favreau, les éditions du remue-ménage, 2006. (Pour familles homoparentales)

 

Par Agathe Beaudouin

Naître et grandir

 

Photos : GettyImages/FatCamera et Geber86

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