Entrevue: les musées, c'est aussi pour les tout-petits!

Entrevue: les musées, c'est aussi pour les tout-petits!
Entrevue: les musées, c'est aussi pour les tout-petits!

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Les conseils d’une maman pour profiter d’une visite au musée avec votre tout-petit.

26 décembre 2016 | Pour Stéphanie Jasmin, auteure, vidéaste, historienne de l’art de formation et mère de Clara, visiter un musée avec son enfant est un moment de plaisir et de partage privilégié, hors du temps et du quotidien. Elle nous parle de son expérience et nous donne quelques conseils pour profiter d’une visite au musée avec un tout-petit.

Pourquoi amener un enfant au musée?

Selon mon expérience, les enfants se montrent très réceptifs et ouverts d’esprit au musée. Les amener très tôt non seulement les éveille aux formes, aux couleurs, aux différents styles des artistes, mais les rend familiers avec l’art comme partie prenante de la vie. Cela crée une habitude qui leur restera plus tard.

Découvrir l’art permet à l’enfant de voir des représentations du monde : mythes, récits religieux, évènements et personnages, costumes, paysages.

Enfin, il faut insister sur le fait que, malgré l’abondance des images disponibles sur Internet et dans les livres, voir des oeuvres originales « en vrai » reste une expérience irremplaçable. C’est dans cette rencontre en direct avec les oeuvres que peuvent surgir chez l’enfant des émotions, des sensations palpables, qui deviendront pour lui une expérience sensible gravée dans sa mémoire.

À quel âge commencer?

Il n’y a pas d’âge minimum avec une poussette! Nous avons amené notre fille Clara dès l’âge de 2 ans dans un musée d’art précolombien au Mexique où elle s’est bien amusée. Comme nous voyageons beaucoup pour notre travail, nous avons pris l’habitude de visiter des musées dans les villes où nous séjournons. Je l’ai amenée au Louvre à 4, 5 et 9 ans; chaque fois, l’expérience était différente et captivante, car lorsqu’on visite une exposition avec un enfant, on le fait à travers ses yeux, son rythme et sa curiosité… À Montréal, elle voit régulièrement les expositions du Musée des beaux-arts, du Musée d’art contemporain et des galeries d’art.

Comment faire une première visite et combien de temps?

Il ne faut pas fatiguer l’enfant, toujours rester à l’écoute de son rythme et surtout ne pas forcer la dose. Ça doit rester un jeu, une exploration ludique. Il est bien de prendre des pauses, aller manger, sortir quand il y a une cour ou un jardin.

Parfois, il vaut mieux choisir une petite section (si c’est la collection permanente d’un musée par exemple) ou s’arrêter devant quelques oeuvres si c’est une exposition temporaire ou particulière.

Est-ce intéressant de demander à l’enfant de chercher par exemple les animaux dans un tableau?

C’est une bonne stratégie pour qu’il apprenne à observer tout en s’amusant. « Regarder », ça s’apprend. J’ai remarqué que les adultes ne s’arrêtent pas longtemps devant une oeuvre, le regard est souvent flottant, balayant. Les enfants, eux, peuvent être intarissables lorsqu’on leur demande ce qu’ils voient et très amusés si on leur propose de chercher des détails. Les tableaux anciens notamment contiennent des récits, que ce soit par leur sujet d’origine mais aussi par celui qu’on peut tenter de refaire soi-même seulement en l’observant. Pas besoin d’avoir fait de l’histoire de l’art pour réaliser une observation commentée avec un enfant, il suffit de regarder et plein de choses apparaissent.

Lorsque ma fille avait 5 ans, je lui ai proposé, dans une longue galerie, de s’arrêter devant chaque tableau qui l’intéressait (souvent les plus effrayants!) pour les observer plus attentivement. Ensuite, nous nous sommes assises avec un bloc de dessin et elle a choisi un tableau pour le dessiner à sa manière. Quand on dessine quelque chose, on doit regarder plus attentivement, on remarque alors plein de détails et ça devient fascinant. On explore littéralement le tableau de façon active, concrète, avec ses yeux mais aussi avec sa main…

Quel vocabulaire utiliser pour parler des tableaux?

J’aime bien commencer par faire parler l’enfant. Par exemple, pour un portrait lui poser des questions simples : où regarde le personnage? Vers toi? Vers un autre personnage? Au loin? Quelle est son expression? Est-il dans la lune? Comment est-il habillé? Tient-il un objet? Où est-il? Dans une pièce? Un château? Devant une fenêtre avec un paysage au loin? Est-ce qu’il y a beaucoup de couleurs? Quelles sont-elles? Est-ce qu’il y a différentes textures : plumes, perles, cheveux, velours, etc.? Est-ce qu’on sent des petits coups de pinceau ou tout est très lisse et « presque vrai »? D’où vient la lumière?

Il faut l’accompagner, confirmer ses intuitions, parfois expliquer, mais surtout l’encourager avec des mots qu’il peut comprendre. Enfin, il est important selon moi de nommer l’artiste pour que l’enfant prenne conscience que quelqu’un a pensé l’oeuvre et l’a réalisée. Que l’on rencontre l’imaginaire d’une autre personne et pas seulement une image ou une forme.

Pour une oeuvre contemporaine, je dirais qu’avant d’élaborer une interprétation, il est bien de commencer par la décrire et de l’explorer avec l’enfant. Et pas nécessairement lui faire dire ce qu’il « voit » dans une oeuvre non figurative, par exemple, mais au contraire, lui faire envisager cette abstraction comme une façon d’interroger ou d’exprimer quelque chose en soi. La dimension ludique, imaginaire, subversive, inventée, mêlant diverses techniques et formes plastiques de l’art contemporain trouve souvent un écho très direct avec les enfants, en général, ils adorent ça!

 

Propos recueillis par Danielle Jasmin - Revue préscolaire, vol. 54, n° 4, automne 2016

 

Pour d’autres conseils, consultez la fiche Pour une sortie réussie.

 

Photo : iStock.com/monkeybusinessimages

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