Il semble que la grossesse sympathique atteint près de 20 % des hommes. Nicolas Chevrier, psychologue, en a fait lui-même l’expérience.Lorsque l’on a appris que ma conjointe était enceinte la première fois, on a tous les deux dû faire un peu de ménage dans nos habitudes de jeune couple branché. Dans mon cas, une résolution longuement reportée qui m’attendait sans équivoque : l’arrêt de la cigarette!
J’ai donc procédé, à l’aide de plusieurs timbres de nicotine et une centaine d’expressos doubles, à la purification de mon système circulatoire. Il m’en a coûté une bonne quinzaine de livres (7 kilos). J’ai donc attribué cette prise de poids au prix que l’on doit payer lorsqu’on arrête cette mauvaise habitude qu’est la cigarette.
Quatre ans plus tard, j’attendais mon deuxième enfant. Le résultat après 9 mois : 15 livres de plus garnissent mon abdomen… J’ai alors compris que ma prise de poids n’a rien à voir avec la cigarette (à tout le moins, pas cette fois-ci), que c’était plutôt ce que certains appellent une grossesse sympathique ou une couvade!
Il semble que la grossesse sympathique atteint près de 20 % des hommes. J’ai appris également que plusieurs autres symptômes peuvent être ressentis par le père durant la grossesse de sa conjointe. D’abord, une certaine anxiété due à la difficulté de s’adapter au changement. Avoir des enfants implique des changements importants dans la vie d’un individu et certains pourraient ressentir de l’anxiété à l’idée de cette nouvelle vie qui commence.
Les nouvelles responsabilités envers la conjointe et l’enfant à venir peuvent également amener certains pères à vivre d’importantes périodes d’inquiétudes durant la grossesse. D’ailleurs, les pères qui ont tendance à la sur-responsabilisation* sont particulièrement à risque. Ces inquiétudes peuvent créer de l’anxiété qui, à son tour, peut provoquer certains malaises gastriques, incluant des nausées, des sautes d’humeur importantes, une baisse marquée de la libido et des tensions musculaires.
Pourquoi le partenaire prend du poids?
Les explications à ces manifestations vont des plus saugrenues (les hommes prennent ainsi du poids par jalousie de la conjointe, car ils veulent garder le statut de partie la plus imposante du couple!) aux plus rationnelles. Pour ma part, j’aime bien garder mon bon vieux sens critique et prêcher par observations empiriques.
Ce que j’ai observé dans mon cas est assez pragmatique : ma conjointe a toujours eu beaucoup de nausées dans le premier trimestre et je me bats depuis des années avec une croyance irrationnelle selon laquelle on ne doit pas gaspiller de nourriture. Vous voyez venir l’interaction? Lorsqu’elle s’élance à la salle de bain après 2 bouchées, papa s’occupe en attendant de l’assiette de maman, car il croit qu’on ne doit pas jeter de bons aliments!
À cela, on peut ajouter les crèmes glacées nocturnes, les ailes de poulet, les fromages « fins » du second trimestre. En bon conjoint qui soutient sa femme, je n’allais pas refuser ces mets riches en gras et en sucre…
N’empêche que c’était un peu ma participation à ce que vivait difficilement ma conjointe. Ce qui importe ici, je crois, c’est le soutien. Soutenir sa conjointe, c’est vivre ensemble les hauts et les bas de sa grossesse. C’est lui donner l’impression qu’elle n’est pas seule dans cette aventure.
Ainsi, on pourrait dire qu’au travers de ces nombreuses collations, j’ai démontré ma présence et mon soutien envers ma conjointe. Je ne dis pas que c’était nécessaire de partager sa crème glacée à 23 h, mais je sais que ça lui faisait plaisir…
*Sur-responsabilisation : Surestimer notre niveau de contrôle sur un situation, ce qui a pour effet de provoquer beaucoup d’anxiété.
Mise à jour le 28 octobre 2021
Publiée originalement le 28 juin 2014
Photos : GettyImages/Andrey Zhuravlev