Mon roi des forêts

Mon roi des forêts

J’ai craqué. D’habitude, je l’achète 15 jours avant le grand déballage des cadeaux, histoire d’avoir un beau sapin gonflé d’épines plutôt qu’un tronc sans vie desséché par le chauffage (j’oublie tout le temps de l’arroser). Mais là, en lisant la dernière aventure de Danny et en voyant la neige recouvrir les maisons, j’ai eu l’envie subite d’aller chercher mon bout de forêt. Un beau grand sapin tout rond. Aussi rond que les yeux de mes enfants devant l’objet de leur désir planté dans un coin du salon.

-    « Mamaaaaan! Je veux t’aider à le décorer! » a lancé mon ado avant de combler le vide de sa bouche par trois gros biscuits au chocolat.
-    « C’est Noël! C’est Noël! Je vais avoir mon bracelet lance-toile d’araignée qui va tuer le pas beau tout vert qui pue le Batman » a crié mon joyeux Spider-garçon.
-    « Booooo! Pin Pin hfiwue », a bafouillé ma petite dernière, la bouche remplie du dernier biscuit échappé à terre par sa grande soeur.

Ravie de tous ces cris du coeur, j’ai sorti les boîtes de décorations et les bas de Noël. Musique d’ambiance, distribution des tâches et c’était parti! J’ai essayé d’avoir l’air organisé. On y est allé par ordre de grandeur : les petits s’occupant du bas, la plus vieille du milieu et moi du haut. Tout le monde chantonnait en accrochant ici et là boules et guirlandes en se tortillant le derrière au rythme de la Compagnie créole (rien trouvé de mieux à la radio). Une belle image, comme dans les magazines. Jusqu’à ce que cette maudite boule rouge vienne s’écraser en mille morceaux sur le plancher.

-   « Alerte rouge! Rangez vos pieds! Tout le monde sur le sofa! »

Trois coups de balai plus tard, on a tous repris nos déhanchements décoratifs jusqu’à ce que Spider-garçon, attaqué par une vague de testostérone, décide d’enfoncer son bas de Noël sur la tête de sa petite soeur...

Non, ma vie n’est pas un long fleuve tranquille. Quoi que je fasse, elle dérape toujours du magazine... au vaudeville. Mais j’avoue que ce petit bout de réalité a bien plus de saveur que toutes les belles images auxquelles je rêve parfois et, apparemment, je ne suis pas la seule à le penser.

Une heure plus tard, mon homme est entré à la maison.

Quand il a vu son fils attaché à la chaise avec des guirlandes. Il n’a rien dit.

Quand il a vu ma grande tournoyer sur elle-même au milieu des miettes de chocolat avec deux boules accrochées aux oreilles, tout en fredonnant Le p’tit renne au nez rouge, il n’a rien dit.

Quand il a vu notre petite dernière en train d’essayer d’arracher la tête du petit Jésus avec ses dents, il n’a rien dit.

Et quand il m’a vu moi, les cheveux en bataille et l’air découragé, en train d’essayer de redresser le sapin à moitié décoré, il s’est approché, m’a serré dans ses bras et a murmuré tout bas :

« Je crois que le bonheur, c’est ça! »

 

2 décembre 2009

Naître et grandir

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