Mettre au monde un parent

Mettre au monde un parent
Combien de temps faut-il pour mettre au monde un parent? Combien de nuits blanches à bercer un nouveau-né inconsolable? Combien de verres de lait renversés, de chutes de la balançoire et de baisers déposés sur les égratignures d’une main minuscule?

Combien de temps faut-il pour mettre au monde un parent?

Combien de nuits blanches à bercer un nouveau-né inconsolable et combien de matins lumineux de silence? Il les faut toutes pour arriver à les attendre toute la nuit, 20 ans plus tard; et soupirer de gratitude en entendant enfin le bruit de la porte d’entrée au petit matin?

Combien de verres de lait renversés, de chutes de la balançoire et de baisers déposés sur les égratignures d’une main minuscule? Il les faut tous pour être capable d’accompagner sa fille en chimiothérapie 10 ans plus tard?

Combien de temps faut-il pour mettre au monde un parent? Un père, une mère qui se tient debout, même quand la vie les met à genoux. Combien de fois Je n’en peux plus, avant de découvrir, ébahis, tout ce qu’on peut encore?

Combien de doutes et de moments de confusion faut-il connaître avant de laisser aller la quête de perfection et entrer dans l’aventure? Combien faut-il avoir fait d’erreurs, combien de regrets, combien de larmes faut-il avoir versées avant de trouver enfin un peu de compassion pour nous-même? Et combien d’autres en faut-il encore avant de trouver un peu de compassion pour les autres parents?

Ne faut-il pas tout cela? Et tout cela prend du temps. Il n’y a pas de raccourcis.

Le temps de la patience et du courage, mais aussi le temps des fous rires. Toutes les nuits de fatigue, de solitude et d’impuissance, mais aussi l’instant magique d’un bouquet de pissenlits inattendu.

Le temps de se laisser bercer entre les bras aimants d’une mère expérimentée qui frotte doucement notre dos secoué de sanglots; et puis l’instant bouleversant où nous sommes devenu le parent qui console les sanglots d’une autre.

Il faut beaucoup de temps et tout un village, pour nous aussi! La mère que je suis vient de tous ces jours de meilleur et de pire, partagés avec vous. J’ai eu besoin de chacun et chacune de vous, dans le cercle fécond des expériences qui nous mettent au monde, infiniment.

Les parents ne naissent-ils pas toujours des mains d’un autre parent?

 

8 avril 2016

Naître et grandir

Photo : iStock.com/Anne Clark

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