Le masque: quel défi pour le développement du langage?

Le masque: quel défi pour le développement du langage?
Par Marie-Ève Bergeron-Gaudin, Orthophoniste
Le port du masque nuit-il au développement du langage des enfants? Nous avons posé la question à Marie-Ève Bergeron-Gaudin, orthophoniste.

Les couvre-visages sont maintenant obligatoires dans les lieux publics fermés. Certains craignent que le port du masque nuise au développement des enfants, notamment au développement de leur langage, parce que les tout-petits ne voient plus le visage de certains adultes autour d’eux. Qu’en est-il vraiment?

La question se pose surtout pour le temps passé en services de garde puisque les éducateurs et éducatrices doivent porter un masque une bonne partie de la journée. (Il est permis de l’enlever quand une distance de 2 mètres est possible avec les enfants pour une période significative.)

Les tout-petits passent donc une portion importante de leur temps en garderie à ne voir que le haut du visage des personnes qui prennent soin d’eux.

Le masque et la communication

Le masque complique bien entendu la communication, particulièrement pour les plus petits qui sont en apprentissage du langage ou pour ceux qui présentent déjà des difficultés (trouble du langage, trouble du spectre de l’autisme, etc.). L’Ordre des orthophonistes et des audiologistes du Québec a diffusé une courte vidéo à ce sujet et identifie trois raisons pour lesquelles le masque est un obstacle à la communication :

  • le masque rend la voix moins forte;
  • le masque cache les lèvres en mouvements quand on parle (lire sur les lèvres contribue à la compréhension des mots);
  • le masque cache les expressions du visage qui contribuent au message communiqué.

Des stratégies

Pour diminuer les difficultés de communication que peut occasionner le masque, l’adulte qui est avec un tout-petit peut :

  • limiter les bruits ambiants et s’assurer d’avoir un bon éclairage;
  • parler plus fort, sans crier, et plus lentement, en articulant bien;
  • attirer l’attention de l’enfant avant de lui parler et se placer à sa hauteur;
  • exagérer ses expressions faciales pour faire parler ses yeux;
  • faire plus de gestes.

Les parents, quant à eux, peuvent en profiter pour parler le plus possible avec leur enfant quand ils sont à la maison sans masque. Les conseils liés au soutien au développement du langage sont plus pertinents que jamais :

  • se placer à la hauteur de l’enfant et établir le contact visuel avant de lui parler;
  • être à l’écoute de ce qui l’intéresse et le laisser commencer l’échange afin de s’assurer de son intérêt;
  • utiliser un vocabulaire varié et des phrases bien structurées et reformuler les erreurs de l’enfant sur un ton positif, sans lui demander de répéter.

Et à long terme?

Les experts en santé publique jugent que le risque de transmission du coronavirus en services de garde est plus dommageable que les effets du masque sur le développement des enfants. Ils ajustent leurs consignes à l’évolution de la pandémie et des connaissances.

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) peut parfois permettre des adaptations, au cas par cas. Par exemple, certains milieux de garde ont pu utiliser des masques avec fenêtre transparente.

Dans tous les cas, je pense que nous vivons une situation exceptionnelle et que tous les enfants de toutes les époques qui ont vécu des événements hors norme n’ont pas connu exactement le même développement… mais la résilience des tout-petits est souvent impressionnante!

 

Mise à jour le 22 juillet :

Bonne nouvelle! 100 000 masques de procédure (chirurgicaux) à fenêtre transparente seront distribués dans le réseau de la santé, selon l’organisme Audition Québec. Plus de détails sur les travailleurs qui y auront accès restent à venir.

 

22 juillet 2020

Naître et grandir

 

Photo : GettyImages/SanyaSM

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