Le jour où mes garçons se sont tus grâce à une chanson

Le jour où mes garçons se sont tus grâce à une chanson
J’entends les premiers accords de ladite chanson à la radio et je commence à chanter. Silence total. Mes deux loups me regardent.

Mon plus vieux, âgé de 4 ans, a dû subir, lorsqu’il avait 4-5 mois, une opération pour enlever un kyste qu’il avait au petit intestin grêle.

Ceux qui sont passés par là savent à quel point on peut se sentir impuissants. On voudrait aider, mais on ne peut qu’observer. Nous aidons par notre présence, par la douceur de nos câlins, par le son de notre voix.

C’est lors de ce petit séjour que j’ai commencé à chanter des chansons sous forme de berceuse à mon garçon, parce que je ne connaissais pas tant de berceuses (à l’époque, je précise, car maintenant je connais les 4 couplets d’Au clair de la lune). Je lui chantais surtout The Middle de Jimmy Eat World. Cherchez les paroles, vous allez voir, c’est un beau texte plein d’espoir. En voici un petit extrait :

Live right now
Just be yourself
It doesn’t matter if that’s good enough for someone else

J’espérais secrètement que les paroles et leur sens résonnent longtemps dans sa tête de futur préadolescent. Je tentais en quelque sorte l’expérience un brin métaphysique de créer de quelconques connexions dans son cerveau, qui se transformeraient éventuellement en quelque chose de beau. Je sais, je sais, c’était TRÈS vague comme approche.

Tout s’est bien passé à l’hôpital, le guerrier est sorti en pleine forme. Mais j’ai continué à lui chanter cette chanson pour le calmer quand les nuits étaient féroces ou quand la peine chargeait son petit coeur. Et puis son frère est arrivé. Nous n’avons heureusement pas eu de séjour à l’hôpital dans son cas, mais cela ne m’a pas empêché de lui servir la même médecine. Si je le fais pour un, je le fais pour l’autre.

Le temps passe et on se retrouve à l’été 2016. Les enfants sont un peu plus vieux et The Middle se fait moins entendre. Il nous manque des légumes pour le souper, alors ma conjointe va à l’épicerie pendant que j’attends avec les cocos dans l’auto. Ça rit, ça chiale, ça fait du bruit, bref, ça vit! J’entends alors les premiers accords de ladite chanson à la radio, je monte juste un peu le son et je commence à chanter.

Silence total.

Mes deux loups, qui habituellement m’implorent d’arrêter quand j’improvise un duo avec la radio, me regardent. Ils m’écoutent chanter comme si les paroles de la chanson étaient la phrase secrète qui activait la petite puce implantée lors de leurs premiers mois de vie. J’ai chanté TOUTE la chanson, en retenant de plus en plus le motton d’émotions qui s’installait dans ma gorge. L’émotion de les voir m’écouter et de voir que mon plan avait peut-être marché finalement.

Suffit maintenant qu’ils apprennent l’anglais pour comprendre le sens des paroles. Je me vois mal débarquer dans la cour d’école au secondaire pour leur chanter la chanson afin d’activer la puce...

 

21 octobre 2016

Naître et grandir

Photo : iStock.com/Helen_Field

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