Dérapage matinal

Dérapage matinal

J’ouvre un oeil. La maison est silencieuse, prête à se laisser envahir par la routine matinale : douche, café, tartines, Internet, réveil des enfants, déjeuner, habillage, brossage de dents et décollage vers la garderie et l’école des petits. L’autobus scolaire se charge d’amener ma grande ado à son école. Tous les jours, la même routine.

Petit hic ce matin : une vilaine fée a transformé mon oreiller en grosse roche durant la nuit. J’ai le cou en feu et je me sens souple comme un balai. M. Torticoli, sortez de ce corps! J’ai une famille à gérer. Pas le temps d’être malade.

Je me traîne dans la douche après avoir avalé un anti-inflammatoire. Deux coups de savon plus tard, la porte s’ouvre brusquement sur ma fille emmitouflée dans son manteau qui me lance d’un air paniqué : « Maman, j’ai raté mon autobus! » Pas d’autobus signifie pas d’école. C’est le seul moyen de transport possible dans mon coin. À part l’auto de maman.

Évidemment.

Je raye les cases « café », « Internet » et « tartines » pour passer directement à la case « j’enfile un vieux jogging, je réveille les petits en catastrophe et j’avale un 2e anti-inflammatoire ». Pendant que ma fille nourrit son frère et sa soeur, je prépare la boîte à lunch. Pendant qu’elle leur lave les dents, je m’enfonce le mascara dans l’oeil. Pendant qu’elle aide l’un à s’habiller et l’autre à enfiler son cartable, je cherche mes clés de voiture. Dix minutes plus tard, tout le monde est prêt à partir. Sauf mon auto.

Forcément.

Le pare-brise est recouvert d’une épaise couche de glace hyper dure à gratter (Impossible de trouver mon grattoir). J’arrive quand même à m’en sortir de peine et de misère et je file déposer ma tribu aux quatre coins de la ville. Malgré tous mes efforts, je dépose mon ado bougonneuse devant une cour de récréation vide. La cloche ayant sonné depuis longtemps. Arrivée à la garderie, ma petite éclate en sanglots. Elle voulait regarder son émission de télé préférée, « manzer 2 tartines, pas zuste une! », ses chaussettes sont toutes ratatinées dans le fond de ses bottes et elle n’a pas sa combinaison de « neize! ». Je la console tant bien que mal avant de la laisser aux bons soins de son éducatrice. Son frère s’énerve de peur d’être en retard lui aussi. Je le rassure et le dépose à l’heure de justesse à son école. Fiou!

La porte de mon auto se referme sur la sainte paix malgré la raideur persistante de mon cou. Peu importe. Je sens déjà l’odeur du café envahir mes narines. 

Coincée dans mon entrée depuis 5 minutes, je crois rêver. C’est un complot. La fermeture éclair de mon manteau refuse obstinément de s’ouvrir jusqu’au bout. Je me tortille donc comme je peux pour m’extirper en gémissant de douleur. Les anti-inflammoires devaient être périmés ou bien j’ai dû confondre avec la boîte de vitamines. La douleur de mon cou ne fait qu’empirer.

Une fois dans la cuisine, je sors mon pot de café. Le téléphone sonne.

La secrétaire de l’école m’annonce que mon fils n’a pas ses patins à glace pour l’activité prévue depuis des semaines… et qui commence dans 10 minutes.

Oui. J’ai raccroché, j’ai retiré la cafetière du feu et j’ai récupéré les patins de mon fils. Oui, je me suis ré-entortillée de douleur dans mon manteau et, oui, une fois les deux mains sur le volant, j’ai CRIÉ très fort. Comme une folle.

J’avoue que pour soulager les douleurs, c’est plus efficace que les anti-inflammatoires!

 

28 février 2012

Naître et grandir

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