Quelles cochonneries ces maladies! J’ai eu les deux à la naissance de mon premier enfant.
Heureusement, le baby blues m’a tellement fait pleurer dans des circonstances étranges que j’ai fini par en rire. J’étais heureuse, mais je pleurais sans raison. Le présentateur de nouvelles disait : «Bonsoir mesdames et messieurs», j’éclatais en sanglots! Mon chum me racontait une blague à table. Je riais. Il se penchait pour ramasser sa fourchette. Je pleurais! Il oubliait de me regarder avant de partir au travail: mes yeux s’embuaient. J’observais mes dents dans le miroir: ma machine à pleurer se mettait en larmes. Sans raison (mes dents étaient très belles!) Heureusement, on a vite identifié le coupable alors mon homme et moi avons fini par en rire. M. Baby blues est allé voir ailleurs si j’y étais. J’en garde même un souvenir amusé.
Pour la dépression, c’est autre chose. Cette petite sournoise s’est infiltrée discrètement dans ma vie sans que je m’en aperçoive. Un jour, j’avais moins d’énergie, l’autre, je me trouvais moins jolie. Enfermée à la maison avec mon bébé, j’ai fini par penser que j’allais passer ma vie à changer des couches et faire le ménage à la maison avec mon ventre mou! Je sortais très peu. Aucune famille pour m’aider. Aucune activité extérieure. Comme j’avais un beau bébé en santé que j’aimais profondément, j’ai essayé de prendre sur moi. Je n’ai rien dit. J’ai souri. J’ai fait croire aux autres que tout allait bien.
Le silence est terrible vous savez. Il vous enferme dans votre fierté. Vous éloigne des gens qui pourraient vous aider. Je n’avais pas envie d’être faible. Je l’étais, mais j’ignorais pourquoi. Alors je tournais en rond dans ma tête en me sentant coupable pendant que cette terrible maladie me désagrégeait de l’intérieur. Elle m’a laissée croire que je ne valais plus rien. Que je n’avais plus envie de rien. J’étais si fatiguée que composer un numéro de téléphone était au-dessus de mes forces. Alors j’ai eu honte. Honte de moi-même. Heureusement, j’ai repris le chemin du travail plus tôt que prévu et, sans le savoir, cela m’a aidée à retrouver l’estime de moi. Passer un peu de temps en dehors de la maison et voir du monde m’a redonné le goût de moi-même. C’est seulement des années plus tard que j’ai compris que j’avais vécu une dépression durant cette période.
Si j’avais su.
Si j’avais su, j’aurais parlé. Si j’avais su quel nom portait mon ennemie, je me serais battue contre elle. Je me serais inscrite à des activités malgré l’hiver. Je me serais confiée à mon médecin. J’aurais rencontré plus souvent d’autres parents. Bref, j’aurais trouvé des alliés pour m’aider à profiter pleinement de ma nouvelle vie de maman. Lors de mes deux autres congés de maternité, je suis restée à l’affût des symptômes et croyez-moi, la petite sournoise est restée sur le palier!
8 mars 2013