À l’âge de 3 mois et demi, la maladie a frappé*. Puis, les traitements se sont enchaînés, les effets secondaires ont suivi et il y a eu ces interminables hospitalisations. Survivre à la place de vivre. C’était le quotidien de mon bébé.
Du haut de ses 7 mois, mon petit bonhomme avait tout d’un enfant de 2 mois. Non seulement il avait cessé d’évoluer, mais son état l’avait fait régresser. Les pédiatres, les physiatres, les neurologues, les ergothérapeutes, les physiothérapeutes avaient beau dire qu’un enfant de cet âge peut rattraper le temps perdu assez rapidement, personne n’avait de garantie à nous offrir.
Puis, le matin de ses 8 mois, mon garçon a dit pour la toute première fois « Maman ».
Ces 2 syllabes n’étaient pas que son premier mot. Pour moi, elles symbolisaient le début d’un temps nouveau (petite pensée pour la chanteuse Renée Claude ici). Ce jour-là, je venais d’assister à quelque chose de rare : une seconde naissance.
Oui, le jour de ses 8 mois, mon enfant est né une deuxième fois.
Pour avoir la chance d’assister à cette renaissance, j’ai dû y croire et toujours regarder en avant. Avec maman, j’ai souffert. Ce travail-là, nous l’avons fait à deux, mais il y en a un qui a trimé encore bien plus dur que nous.
J’ai crié, j’ai pleuré, j’ai blasphémé. J’ai eu mes contractions.
J’ai été tantôt détrempé, tantôt gelé jusqu’aux os.
Gelé de terreur, gelé d’impuissance, gelé de crainte. Gelé devant l’inconnu.
Sa naissance a été, tout comme pour mon premier, un moment mémorable, extraordinaire, rempli d’émotions fortes. Mais sa renaissance a quelque chose de bien particulier à mes yeux. Parce que pour renaître, mon enfant a dû vivre une première fois. Il a dû bûcher, travailler d’arrache-pied, déjouer des pronostics.
Cette renaissance, il ne l’a pas volée.
Et maintenant, il est reparti.
Comme dirait Buzz Lightyear : « Vers l’infini et plus loin encore! »
Un enfant peut effectivement rattraper très vite le temps perdu et nous surprendre jour après jour.
Non, lors de cette deuxième naissance, je n’ai pas coupé le cordon qui reliait mon enfant à ma conjointe. J’ai fait bien mieux.
J’ai sectionné la chaîne entre mon garçon et la maladie.
*Hospitalisé au CHU-Sainte-Justine pendant une semaine, Éli-Noam a reçu un diagnostic d’épilepsie infantile à l’âge de 3 mois et demi. Après quelques visites à Montréal et 3 tentatives infructueuses de médications, il a reçu pendant 66 jours des injections de corticostéroïdes. Ces dernières ont permis de contrôler les spasmes épileptiques, mais ont provoqué de nombreux effets secondaires. Il a dû être hospitalisé de nouveau pendant 1 mois, puis quelques jours plus tard pendant 1 mois supplémentaire en raison de problèmes respiratoires et dysphagie qui l’ont mené vers un gavage à la maison pour une période toujours indéterminée.
2 septembre 2013