Devenir parents après 40 ans: des joies et des défis

Devenir parents après 40 ans: des joies et des défis
Devenir parents après 40 ans: des joies et des défis
Quelle est la réalité des parents qui ont un ou des enfants après 40 ans? Des parents et des spécialistes apportent leur éclairage.

6 février 2024 | Au Québec, le nombre de naissances chez les femmes de 40 ans et plus a plus que doublé en 20 ans. Comment l’arrivée d’un enfant en milieu de vie influence-t-elle le vécu des familles? Des parents et des spécialistes apportent leur éclairage.

Cynthia Dubé présente fièrement une photo de son « petit clan ». Devant le sapin de Noël, ses deux aînés, Victoria, âgée de 19 ans, et Caleb, 17 ans, portent dans leurs bras les deux plus jeunes de la fratrie : Louka, 3 ans et la petite Livia, qui vient juste d’avoir 6 mois. C’est durant la pandémie que Cynthia, séparée du père de ses deux grands, a rencontré son compagnon Benoît Labrecque et que la famille s’est agrandie.

Maman à 20 ans d’intervalle

Cynthia, âgée de 42 ans, a maintenant 20 ans de plus qu’à la naissance de sa première fille. Elle se rappelle avoir vécu du stress et avoir ressenti un besoin de performance dans les premières années de vie de Victoria : « À l’époque, je voulais me réaliser dans ma carrière et à la maison. Et comme tous mes amis avaient leurs enfants en même temps que moi, j’avais le sentiment de devoir me prouver. »

La société tend à véhiculer l’idée qu’il y a un âge pour tout, constate Laurence Charton, socio démographe et chercheuse à l’Institut national de recherche scientifique (INRS) et directrice de la revue internationale Enfance Famille Générations. « Cette représentation est très forte : il y a un temps pour faire ses études, pour trouver un travail, vient aussi “le bon âge” pour avoir ses enfants. Les personnes intègrent d’autant plus ces normes qu’elles sont renforcées par les discours médicaux qui peuvent mettre en garde sur les risques d’avoir un enfant trop tôt ou trop tard. »

L’avantage de l’expérience de la parentalité

Aujourd’hui, Cynthia aborde l’éducation de ses deux jeunes enfants avec davantage de calme et de bienveillance. Un recul qu’elle dit tenir de l’expérience de ses premières maternités, mais aussi de son cheminement. « Je me sens plus établie en tant que femme. »

Un sentiment que partage Laëtitia Charlet, devenue maman d’un petit Isha à l’aube de ses 41 ans. Bien qu’il s’agisse pour elle d’un premier bébé, Laëtitia estime que son expérience de vie lui permet d’élever son fils de manière réfléchie et détachée du regard des autres. « Cet enfant, je l’ai porté dans ma tête avant de le porter dans mon ventre. Quand il est arrivé, je savais exactement dans quel contexte je voulais le voir grandir. »

Les parents âgés de 40 ans et plus ont souvent atteint une forme de maturité dans leur propre développement, confirme Carl Lacharité, psychologue et professeur émérite à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Une évolution qui s’accompagne également d’une plus grande disponibilité des parents vis-à-vis de leurs enfants. « Souvent, ils sont à un moment de leur vie où l’installation et la carrière, qui sont des enjeux pour les jeunes adultes, ne le sont plus pour eux », indique-t-il.

Les défis des parents plus âgés

Bien sûr, devenir parent tardivement n’apporte pas que des avantages. On a qu’à penser à l’augmentation des risques biologiques liés à l’âge des parents, et surtout des mamans. Élever un jeune enfant demande aussi beaucoup d’énergie. « Les parents doivent composer avec des exigences physiques auxquelles ils ne peuvent plus répondre comme autrefois », souligne Carl Lacharité.

De 2002 à 2022, la proportion de naissances chez les femmes de 40 à 49 ans et plus est passée de 2 % à 4,7 %.
Source : ISQ

Benoît Labrecque, le partenaire de Cynthia, peut en témoigner. À 49 ans, le papa voit régulièrement le podomètre de son téléphone s’emballer tandis qu’il court à gauche et à droite pour sa famille. « C’est sûr qu’on n’a pas la même énergie que lorsqu’on était plus jeunes. Mais notre fatigue est physique et non mentale, c’est une bonne fatigue », estime le papa.

Il arrive également que les parents, pris dans leur nouveau rôle, observent un décalage avec leur entourage. « Les enfants de mes amis sont tous adolescents, témoigne Cynthia. On était une gang de parents habitués à aller manger au resto ensemble, à retrouver une certaine liberté. » La maman s’est donc mise en contact avec d’autres mamans de jeunes enfants avec qui elle peut partager des activités.

Des questions face à l’avenir

Parmi les craintes des nouveaux parents de plus de 40 ans, Carl Lacharité souligne celle de partir trop tôt ou de devenir un fardeau pour leurs enfants plus tard. Cynthia, dont les aînés sont très proches de leurs jeunes frères et soeurs, pose sur cet enjeu un regard confiant. « Plus je vois le lien qui se développe entre eux, plus je sais que les petits vont être bien entourés, peu importe ce qui peut arriver », dit la maman.

De son côté, Laëticia se pose beaucoup de questions : comment va-t-elle vivre le départ de son fils unique de leur maison alors qu’elle aura l’âge de cesser ses activités professionnelles? Aura-t-elle la chance de devenir grand-mère et de profiter de ses petits-enfants? « J’ai parfois peur de vivre ces deuils en même temps et de me retrouver dans un vide immense », confie-t-elle.

En attendant, la maman profite de sa vie de famille et s’amuse du « flou générationnel » qui entoure sa parentalité. « Dans la rue, les gens pensent-ils que je suis sa maman, sa grand-maman? On m’a posé la question qu’une seule fois », raconte en riant Laëticia qui admet que ça ne l’a pas fait sauter de joie.

Perrine Larsimont – Équipe Naître et grandir

Naître et grandir

Photo : GettyImages/Mindful Media

Partager