Relations entre grands-parents et petits-enfants: la loi a changé

Relations entre grands-parents et petits-enfants: la loi a changé
Relations entre grands-parents et petits-enfants: la loi a changé
La loi qui encadre les relations des enfants avec leurs grands-parents a changé.

12 décembre 2022 | Des modifications ont récemment été apportées au Code civil du Québec au sujet de l’encadrement des relations entre un enfant et ses grands-parents. Qu’est-ce qui a changé et quelles sont les conséquences?

Les grands-parents n’ont habituellement pas besoin de lois pour voir leurs petits-enfants et développer une relation avec eux. Les changements apportés au Code civil n’ont donc pas d’impact sur les papis et les mamies pour qui tout se passe bien.

Toutefois, il peut arriver qu’un grand-parent s’adresse aux tribunaux pour avoir des contacts avec son petit-enfant parce que les liens sont coupés par exemple à la suite d’une séparation, d’un divorce, d’un conflit avec les parents ou d’un déménagement de la famille.

C’est dans ce genre de situations que la loi vient déterminer si des relations personnelles entre l’enfant et ses grands-parents peuvent être maintenues ou développées.

Que dit la loi?

Concrètement, l’article 611 du Code civil du Québec sur les relations entre grands-parents et petits-enfants a été complètement réécrit dans le cadre de la réforme du droit de la famille. L’un des grands changements concerne la notion de « motifs graves ».

« Avant, les parents pouvaient difficilement empêcher la relation de leur enfant avec ses grands-parents s’ils n’avaient pas un motif grave, comme de la violence corporelle ou tout autre comportement négatif du grand-parent pouvant nuire à l’enfant, explique l’avocate Ioana Bouquier du Centre communautaire juridique Laurentides-Lanaudière. C’était un peu comme si l’article 611 portait sur le droit des grands-parents plutôt que sur le droit des enfants. Désormais, il n’est plus nécessaire pour les parents de justifier leur refus avec un tel motif. »

La nouvelle version de la loi, entrée en vigueur le 8 juin dernier, indique plutôt que les relations entre l’enfant et ses grands-parents peuvent être maintenues ou développées si cela est dans l’intérêt de l’enfant. « C’est maintenant l’intérêt de l’enfant qui est mis de l’avant tandis qu’auparavant, il y avait une présomption favorable à l’égard des grands-parents », précise Me Ioana Bouquier.

Des grands-parents déçus

L’Association des grands-parents du Québec souhaitait pour sa part le maintien de ce point de vue favorable. « Nous sommes un peu déçus, car le fardeau de la preuve est renversé », reconnaît Luc Trudeau, membre du conseil d’administration de l’Association et avocat en droit de la famille. En effet, il revient désormais aux grands-parents de démontrer leur importance dans la vie de l’enfant.

Me Luc Trudeau souligne toutefois que l’intérêt de l’enfant a toujours été une priorité pour les tribunaux en raison de l’article 33 du Code civil. Cet article stipule que les décisions le concernant doivent être prises dans son intérêt et dans le respect de ses droits.

« Ça fait 18 ans que je représente des grands-parents. Je peux dire qu’avant la modification de l’article 611, les juges évaluaient déjà toutes les causes en fonction de l’intérêt de l’enfant. S’ils voyaient que la relation avec un grand-parent pouvait lui nuire, ils n’accordaient pas les droits d’accès. »

Plus difficile pour les grands-parents de voir leurs petits-enfants?

Comme les changements à la loi sont récents, on ne connaît pas encore l’impact que les décisions des tribunaux auront sur relations des grands-parents avec leurs petits-enfants. « Je pense que, dans certains dossiers, ce sera encore plus difficile qu’avant pour les grands-parents d’obtenir des accès, estime Me Luc Trudeau. Par exemple, dans les cas où il y a d’importants conflits entre parents et grands-parents. L’enfant risque alors de se retrouver dans un conflit de loyauté. »

En revanche, les grands-parents qui ont eu le temps de créer des liens d’attachement avec leurs petits-enfants pourraient être avantagés. « Si une grand-mère a pu voir sa petite-fille pendant un an, deux ans ou cinq ans, le juge va vouloir savoir pourquoi les parents ont changé d’avis et coupé les contacts, poursuit l’avocat. Et si la raison n’est pas assez sérieuse, le juge devrait conclure que le maintien de la relation est dans l’intérêt de l’enfant. »

Les enfants de 10 ans et plus ont leur mot à dire

Autre nouveauté à la loi : le tribunal doit dorénavant tenir compte de la volonté des enfants de 10 à 13 ans d’avoir ou non des contacts avec leurs grands-parents. Si un enfant de cet âge ne veut pas maintenir ou développer de contact avec ses grands-parents, ce sera au juge de décider ce qui est le mieux pour lui.

À partir de 14 ans cependant, le consentement est une condition essentielle à ces relations intergénérationnelles.  L’adolescent de 14 ans et plus a un droit de veto, explique Me Ioana Bouquier. « On ne peut pas l’obliger à voir ses grands-parents ni l’en empêcher », dit-elle. Un jeune de cet âge peut ainsi décider de mettre fin à une relation avec un grand-parent ou de reprendre contact avec un grand-parent qu’il ne pouvait plus voir.

 

Une place pour les ex-beaux-parents

L’article 611 ouvre aussi la porte plus grande aux ex-conjoints des parents qui voudraient continuer de voir l’enfant de leur ex après une rupture. Il était déjà possible pour les ex-beaux-parents de demander des droits d’accès en invoquant l’intérêt de l’enfant, mais maintenant c’est écrit dans la loi. « Aujourd’hui, il y a beaucoup de familles recomposées et les nouveaux conjoints sont parfois des deuxièmes parents pour les enfants, commente Me Ioana Bouquier. La loi reconnaît maintenant cela. » Pour que la relation soit maintenue, les ex-beaux-parents doivent cependant être significatifs pour l’enfant.

Pour avoir des conseils afin de maintenir de bonnes relations avec les grands-parents, consultez notre dossier Parents et grands-parents: favoriser l’harmonie.

 

Nathalie Vallerand – Équipe Naître et grandir

Naître et grandir

Photo : GettyImages/PeopleImages

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