Votre enfant remet en question toutes vos décisions! Comment intervenir?
Il est normal qu’un enfant s’oppose à l’occasion aux règles qui lui sont imposées. Cependant, certains tout-petits le font plus souvent ou avec plus d’intensité que d’autres. Comment intervenir avec un enfant qui argumente sans cesse?
Pourquoi un enfant argumente-t-il?
Plusieurs raisons peuvent expliquer pourquoi un enfant argumente :
- À partir de 3 ans, l’enfant maîtrise de mieux en mieux le langage. Il devient alors plus habile à exprimer ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas. Il est aussi capable de répéter les arguments qu’il entend. Ainsi, il peut s’en servir pour négocier et dire, par exemple : « Je ne veux pas ramasser mes jouets parce que ça me fatigue. »
- Le tout-petit peut se sentir frustré parce qu’il doit se plier à beaucoup de règles et parce qu’il a peu de contrôle sur son quotidien. Pour s’affirmer et sentir qu’il a un peu de pouvoir, il peut se mettre à contester les règles.
- Il est plus conscient de ce qui se passe autour de lui et plus sensible aux injustices, ce qui peut l’amener à argumenter. Par exemple, il peut vous dire : « Pourquoi je dois aller me coucher alors que toi et maman, vous restez debout? » Ou encore, il réalise que vous utilisez des écrans le soir alors que cela lui est interdit et il argumente pour avoir le droit de faire comme vous.
- C’est dans sa nature. Un enfant qui parle beaucoup ou qui est impulsif ou extraverti peut avoir tendance à argumenter davantage qu’un enfant plus raisonnable ou timide. Cela peut être une question de tempérament ou d’intérêts. Par exemple, un tout-petit qui a développé rapidement son langage peut argumenter plus qu’un autre.
- Les règles ne sont plus adaptées à l’âge de l’enfant. Il peut même parfois avoir raison d’argumenter. À 6 ans, par exemple, il est normal pour un enfant de vouloir choisir ses vêtements seul. Ou encore, à 7 ans, il est normal qu’un enfant argumente parce qu’il ne veut pas donner la main avant de traverser la rue.
- L’enfant utilise l’argumentation pour éviter de faire la tâche demandée. C’est surtout vrai avec les enfants de 5 ans et plus. Si vous abandonnez votre demande dès que votre enfant argumente parce que vous n’avez pas le goût de vous chicaner avec lui pour défendre votre point de vue, il va comprendre qu’il peut utiliser l’argumentation pour éviter de faire ce que vous lui demandez.
Comment intervenir quand votre enfant argumente?
- Essayez de comprendre pourquoi votre enfant argumente. Encouragez-le à parler de ce qu’il veut et à mettre des mots sur ses émotions. Cela vous aidera à mieux comprendre sa réaction. De plus, lorsque vous vous intéressez à ce que votre enfant vit et que vous le faites parler, vous lui donnez l’occasion de s’exprimer sans argumenter.
- Reconnaissez son désir. Par exemple, s’il veut continuer à jouer lorsque c’est l’heure du bain, dites-lui : « Je sais que tu voudrais jouer encore, mais il est tard et il faut maintenant aller prendre ton bain. » Ce n’est pas magique, mais déjà s’il se sent compris, il sera probablement plus coopératif.
Votre rôle de parent vous autorise à prendre certaines décisions sans avoir à toujours vous justifier longuement.
- Expliquez-lui les raisons de votre demande afin qu’il les comprenne bien. Par exemple, vous pouvez lui expliquer qu’à son âge il a besoin de plus d’heures de sommeil et qu’il a besoin de dormir pour être en forme pour la garderie ou pour l’école.
- Proposez-lui des choix. Dites-lui par exemple : « Quel pyjama veux-tu mettre? Le bleu ou le vert? » En le laissant choisir, vous lui donnez un peu de contrôle. Ça ne marche pas à tous les coups, mais ce sentiment de pouvoir peut amener certains enfants à collaborer plus et à argumenter moins.
- Soyez ferme lorsqu’il s’agit de règles auxquelles vous tenez. C’est souvent le cas avec les règles de sécurité, comme regarder avant de traverser la rue, ne pas courir en se brossant les dents et ne pas se baigner dans la piscine sans la surveillance d’un adulte. Si vous manquez de constance dans l’application des règles, votre enfant essaiera davantage de négocier pour contourner la règle. Adaptez toutefois vos règles à son âge et à son développement. Vous pouvez, par exemple, accepter qu’il arrête de vous tenir la main pour traverser la rue quand vous jugez qu’il est prêt pour cela.
- Respectez vos limites sans vous justifier. Assurez-vous que votre enfant a bien compris ce que vous voulez, mais après ne répétez pas plus que deux ou trois fois votre demande. Souvenez-vous aussi qu’il est préférable de dire clairement ce que vous voulez dans le calme au lieu d’attendre et ensuite de crier pour mettre vos limites. Dites par exemple : « J’en ai assez de répéter. Tu as compris ce que je te demande. Même si tu m’en parles encore, ça ne changera pas. » Vous pouvez ensuite ne pas répondre à ses arguments pour mettre fin aux négociations.
Des attitudes à éviter
- Évitez d’argumenter. Plus vous répétez vos explications et répondez aux arguments de votre enfant, plus la situation risque d’empirer. Si vous répondez à chacun de ses arguments, il aura l’impression qu’il peut poursuivre la négociation. Vous pouvez lui dire : « Tu sais très bien pourquoi je te demande ça. La discussion est finie. C’est moi le parent et, là-dessus, c’est moi qui décide. »
- Évitez les menaces. Dire par exemple : « Si tu ne ranges pas tes jouets, je vais les jeter » crée de la peur et de la colère chez votre enfant, ce qui ne l’encourage pas à vous écouter. De même, si vous ne mettez pas vos paroles en application, il comprendra que ce que vous dites est sans conséquence et il en viendra à penser que ce n’est pas important de respecter ce que vous dites.
- Évitez de marchander. Les phrases du type : « Si tu t’habilles maintenant, tu pourras jouer 10 minutes de plus sur la tablette » apprennent à votre tout-petit qu’il peut négocier pour obtenir des privilèges.
Pour diminuer la fréquence des négociations
Pour diminuer la fréquence des négociations, tentez de diminuer la frustration de votre enfant. Voici comment y parvenir.
- Faites des jeux de rôle où votre tout-petit est le parent et vous l’enfant. Il aura peut-être envie de vous donner des ordres comme : « Viens prendre ton bain! Range tes jouets! Arrête de courir! » N’hésitez pas à répliquer comme il le ferait : « Plus tard. Ça ne me tente pas. Pourquoi je dois prendre mon bain et pas toi? » Montrer un peu d’autorité le temps d’un jeu permet à votre enfant de mieux tolérer les situations réelles où il doit suivre des règles ou répondre à une de vos demandes.
- Essayez de passer chaque jour de bons moments avec votre enfant. Il peut s’agir de faire un petit jeu, de cuisiner ensemble, de faire un casse-tête ou de lire une histoire. C’est une façon de lui montrer qu’il est important pour vous. Si ses besoins affectifs sont comblés, il collaborera davantage.
- Faites des demandes claires. Plus vos demandes sont courtes et précises, moins elles laissent place à l’argumentation. C’est aussi plus facile pour votre enfant de comprendre ce que vous attendez de lui. Par exemple : « Range tes bottes sur le tapis » est une consigne beaucoup plus claire que : « Ramasse tes choses qui traînent dans l’entrée ».
- Prenez l’habitude d’aider votre enfant à mettre des mots sur ses émotions pour comprendre ses réactions. Invitez-le par exemple à dessiner comment il se sent quand il est fâché. C’est un bon moyen de lui montrer à exprimer ce qu’il ressent. Commentez son oeuvre en insistant sur l’émotion qui en ressort, par exemple : « Ce monstre est très gros et il a l’air vraiment fâché. Il fait peur! » Petit à petit, votre enfant pourrait vous dire comment il se sent quand il vit une frustration au lieu d’argumenter.
- Félicitez votre enfant lorsqu’il répond à une demande sans argumenter. Dites, par exemple : « Bravo! Tu as mis ton pyjama sans négocier même si ça ne te tentait pas. J’aime ça quand ça se passe comme ça, c’est plus agréable. » Vos bons commentaires donnent à votre enfant le goût de répéter ce comportement positif. S’il réalise que l’ambiance familiale est bonne et plus détendue quand il collabore, il aura tendance à moins argumenter.
Savoir argumenter : une qualité pour plus tard À l’école et sur le marché du travail, savoir argumenter permet de défendre ses idées et de convaincre les autres. C’est une bonne chose!
Si, après avoir entendu les arguments de votre enfant, vous vous rendez compte qu’il a raison, n’hésitez pas à revenir sur votre décision. N’ayez crainte : vous ne perdrez pas votre autorité de parent. Au contraire, il appréciera de voir que vous l’écoutez. En plus, vous l’aiderez à bâtir sa confiance en lui. |
Quand s’inquiéter?
Certains enfants tiennent toujours tête à leurs parents et refusent de se plier à chacune de leurs demandes en plus de rechercher le conflit. Si la situation ne s’améliore pas malgré vos interventions, que votre enfant argumente aussi à la garderie ou à l’école et que vous vous sentez dépassé, consultez un professionnel (médecin, psychologue). Il pourrait s’agir d’un trouble d’opposition.
À retenir
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Un enfant peut argumenter, entre autres, pour exprimer une frustration, pour sentir qu’il a un peu de pouvoir ou pour éviter de faire ce qu’on lui demande.
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Il est bon d’essayer de comprendre pourquoi votre enfant argumente, car se sentir compris et écouté peut l’amener à collaborer davantage et à moins argumenter.
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Expliquez bien vos règles à votre enfant et privilégiez les demandes courtes et précises, car elles sont plus faciles à comprendre et elles laissent moins de place à l’argumentation.
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Ressources et référencesPour les parents : - BOURCIER, Sylvie. L’agressivité chez l’enfant de 0 à 5 ans. Montréal, Éditions du CHU Sainte-Justine, 2008, 224 p.
- HAMMARRENGER, Benoît. L’opposition, ces enfants qui vous en font voir de toutes les couleurs. Éditions Midi trente, 2016, 232 p.
- NEUFELD, Gordon et Gabor MATÉ. Retrouver son rôle de parent. Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2005, 416 p.
- GEORGE, Gisèle (Dr). Mon enfant s’oppose. Que dire? Que faire? Paris, Les Éditions Odile Jacob, 2002, 269 p.
Pour les enfants : - CATHALA, Agnès et Tristan MORY. Dina dit non : un livre qui parle de l’opposition. Éditions Milan, 2016, 26 p.
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