Environ une personne sur trois souffrira d’une maladie mentale au cours de sa vie. La dépression et les troubles anxieux (anxiété généralisée, trouble panique, phobie, trouble obsessionnel compulsif, stress post-traumatique) sont les troubles mentaux les plus courants.
Environ une personne sur trois au Canada souffrira d’une maladie mentale au cours de sa vie. La proportion est en constante augmentation depuis quelques années. La dépression et les troubles anxieux (anxiété généralisée, trouble panique, phobie, trouble obsessionnel compulsif, stress post-traumatique) sont les troubles mentaux les plus courants. Certaines personnes souffrent aussi de troubles mentaux chroniques, comme la schizophrénie, le trouble bipolaire ou encore le trouble de personnalité limite (borderline). Quant aux troubles de l’alimentation, ce sont surtout des filles et des femmes âgées de moins de 25 ans qui sont touchées.
Lorsqu’une personne vit un coup dur (deuil, séparation, accident, etc.), sa santé mentale peut être affectée. Cela ne signifie pas qu’elle fera forcément une dépression, par exemple. En fait, les causes exactes des troubles mentaux ne sont pas encore connues. Ce qu’on sait, c’est que ces troubles sont le résultat d’un mélange de facteurs génétiques, biologiques, psychologiques et sociaux. Mais, bonne nouvelle : les troubles mentaux se traitent. Il est donc possible, avec de l’aide, d’avoir une vie de famille satisfaisante même si on en souffre. Voici nos réponses à 20 questions sur la santé mentale.
J’ai un bébé en santé et un conjoint que j’aime, mais je suis triste et je vois la vie en noir. Qu’est-ce qui m’arrive?
De 15 à 20 % des nouvelles mamans souffriront de dépression post-partum après l’accouchement. Selon les études, le taux de dépression postnatale est, de manière générale, plus élevé trois mois après l’accouchement et diminue graduellement par la suite. Parmi les symptômes possibles : une grande tristesse, de l’irritabilité, une perte d’intérêt ou de plaisir pour les activités habituelles, des difficultés de sommeil, de la fatigue, un sentiment de vide, des pensées suicidaires, etc.
« La dépression post-partum nécessite une attention médicale immédiate, insiste la psychiatre Marie-Josée Poulin, chef médicale de la clinique de psychiatrie périnatale de l’Institut universitaire en santé mentale de Québec, du CIUSSS de la Capitale-Nationale. La nouvelle mère n’ose pas toujours demander de l’aide, car elle a honte d’être malheureuse. » Si le conjoint ou d’autres proches voient que la maman va mal, il est important de la soutenir et de l’amener à consulter.
La dépression post-partum n’a rien à voir avec le baby blues, une légère déprime passagère qui touche jusqu’à 80 % des femmes et qui apparaît souvent au troisième jour après l’accouchement. « Dans le cas du baby blues, la nouvelle mère est de mauvaise humeur et pleure sans trop savoir pourquoi. Toutefois, elle n’a pas d’idées noires et elle est capable de s’occuper de son bébé », explique la psychologue Nancy Verreault.
Par ailleurs, il existe une maladie rare et plus grave : la psychose post-partum. Elle se déclare dans les jours qui suivent l’accouchement. Elle se manifeste par de la confusion, des hallucinations, du délire, et parfois de l’agressivité. La mère doit consulter de façon urgente, car sa sécurité et celle de son enfant peuvent être compromises.
14 % des Québécois feront une dépression au cours de leur vie. Chez les jeunes de 12 à 24 ans, le pourcentage ne cesse d’augmenter. Chaque année, 5 % des adultes présentent une dépression majeure. Par ailleurs, 11 % des Québécois souffriront d’un trouble anxieux au cours de leur vie. |
Comment aider ma conjointe qui souffre de dépression? Sa santé mentale peut-elle affecter notre enfant?
Il est avant tout important de reconnaître la souffrance de votre partenaire. « Si vous diminuez l’importance de ce qu’elle ressent, elle se sentira encore plus coupable et incompétente, avertit la Dre Marie-Josée Poulin. La dépression peut alors empirer. » Il est conseillé de l’écouter sans la juger, puis de l’encourager à consulter et de lui demander comment elle pense que vous pouvez l’aider.
« Une mère qui souffre de dépression est moins disponible pour son enfant, dit la Dre Andrée-Anne Marcoux, pédopsychiatre au pavillon Albert-Prévost du CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal. Par exemple, elle peut avoir du mal à le réconforter, à lui donner de l’affection, à l’aider à gérer ses émotions ou à lui offrir la stimulation nécessaire au bon développement de son cerveau. Cela peut aussi nuire au lien d’attachement entre la mère et son enfant. » Il est donc important de donner à votre enfant beaucoup d’amour et d’attention le temps que sa maman aille mieux.
Je suis un nouveau papa et je trouve cela plus difficile que je le pensais. Devrais-je consulter?
N’hésitez surtout pas! Une mauvaise santé mentale pourrait nuire à votre couple et au développement de votre bébé. Des études montrent que les pères dépressifs ont moins d’interactions positives avec leur tout-petit, ce qui pourrait entraîner des problèmes émotifs et de comportement chez l’enfant. Cela pourrait aussi nuire au lien d’attachement entre le père et son enfant.
Au cours des 12 mois suivant l’accouchement, la dépression post-partum est présente chez 9 % des pères. Par ailleurs, 10 % des pères seraient touchés par la dépression durant la grossesse. « Les hommes ont tendance à exprimer leur détresse par de la colère, de l’impatience et de l’énervement plutôt que par de la tristesse et des pleurs comme le font les femmes, signale Nancy Verreault, psychologue. Cette différence explique que les hommes eux-mêmes et leur entourage ne voient pas toujours qu’il s’agit d’une dépression. »
Mon conjoint souffre d’une maladie mentale. Est-ce que notre enfant risque d’en être atteint?
Votre enfant risque plus de développer un problème de santé mentale, mais ça ne signifie pas qu’il en aura systématiquement un. La plupart des maladies mentales ont une part génétique. L’enfant n’hérite pas de la maladie, mais il risque plus de la développer. « Cependant, si la maladie du parent n’est pas soignée ou stabilisée, cela ajoute un facteur de risque. En raison de ses symptômes, le parent peut avoir de la difficulté à offrir à son enfant l’attention et le milieu sécurisant dont il a besoin », indique la pédopsychiatre Andrée-Anne Marcoux. Comme cette situation fait vivre à l’enfant beaucoup de stress, cela le rend encore plus vulnérable à la maladie mentale.
Les organismes communautaires en santé mentale peuvent offrir du soutien aux proches de personnes souffrant de troubles mentaux. N’hésitez pas à leur demander de l’aide. |
Je m’inquiète toujours pour mon enfant. Est-ce que je souffre d’anxiété?
Il est normal de s’inquiéter de temps en temps pour son enfant. L’anxiété devient toutefois un problème quand on n’arrive pas à la contrôler, qu’elle nous envahit et qu’elle nous empêche de fonctionner dans notre vie de tous les jours, explique la psychiatre Marie-Josée Poulin. Il s’agit alors d’anxiété généralisée.
L’anxiété généralisée s’accompagne souvent d’autres symptômes : fatigue, irritabilité, difficultés à dormir et à se concentrer, agitation, palpitations au coeur, tremblements, nausées, etc. Si vous croyez en souffrir, n’hésitez pas à consulter.
Je suis la maman de deux jeunes enfants et je suis à bout de souffle. Suis-je à risque de faire un burnout?
« Déjà, mener de front le travail et la vie de famille, c’est essoufflant. Mais certaines femmes s’épuisent encore davantage à tenter d’être des mères parfaites, constate la psychologue Nancy Verreault. Elles idéalisent leur rôle parental. Cela peut mener à des déceptions, car la vie de parent n’est pas toujours facile. » Des parents en viennent à ressentir une fatigue physique et mentale intense, accompagnée de stress. C’est l’épuisement parental (aussi appelé burnout parental), qui touche au moins 5 % des parents. Comment prévenir cette situation? La clé, c’est de prendre des moments de détente et d’essayer d’avoir des attentes moins élevées. Vous gagnerez à écouter vos limites et à partager autant que possible les tâches et les responsabilités parentales avec votre partenaire. Si vous êtes un parent seul, n’hésitez pas à demander de l’aide à votre entourage.
Ma soeur a un trouble de personnalité limite et je m’inquiète pour elle. Comment l’aider?
Qu’il s’agisse d’un trouble de personnalité limite (aussi appelé TPL ou borderline) ou d’un autre problème de santé mentale, vous pouvez l’encourager à consulter ou à poursuivre ses traitements, lui offrir du répit en vous occupant de son enfant ou en l’aidant à faire des courses ou des tâches ménagères. « Par contre, il vaut mieux éviter de tout prendre en charge, car cela peut empêcher la personne malade de se responsabiliser et de se prendre en main », souligne Julie Desrosiers, travailleuse sociale au Cercle polaire, un organisme qui offre du soutien aux proches des personnes atteintes de maladies mentales. Il est aussi important de poser vos limites et de prendre soin de vous. Si vous êtes épuisé, vous ne serez pas très aidant pour l’autre.
Dois-je expliquer à mon enfant que je souffre d’un problème de santé mentale?
Votre maladie fait partie de la vie de votre enfant. Il a donc besoin de savoir ce qui se passe. Par exemple, dès qu’il a 3 ans ou 4 ans, vous pouvez lui expliquer que vous avez une maladie qui vous donne parfois l’impression d’avoir de gros nuages dans la tête et dans le coeur. Un organisme spécialisé en santé mentale peut vous aider à trouver les bons mots en fonction de l’âge de votre enfant. Il est très important de lui dire que ce n’est pas sa faute si vous êtes malade. Offrez-lui aussi la possibilité d’exprimer ses émotions, ses pensées et ses questions à propos de la maladie. Vous pouvez également donner l’occasion à votre enfant d’être en contact avec d’autres adultes importants pour lui, comme une grand-mère ou un oncle.
Est-ce que je risque de perdre la garde de mon enfant parce que je souffre d’un trouble mental?
Ce n’est pas une raison suffisante pour qu’on vous retire la garde de votre tout-petit, affirme Isabelle Laviolette, psychologue au Programme jeunesse du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. « La Direction de la protection de la jeunesse intervient seulement lorsque la sécurité ou le développement de l’enfant est compromis », précise-t-elle. Si c’est le cas, vous avez tout à gagner à collaborer avec l’intervenant et à accepter l’aide qu’on vous offre.
Pour éviter d’en arriver là, vous pouvez faire attention à votre santé mentale en respectant votre traitement et en étant attentif aux signes qui annoncent une rechute. Il est aussi suggéré de faire un plan d’urgence qui indique qui pourrait vous aider et qui pourrait s’occuper de votre enfant en cas de besoin.
Comment expliquer à un tout-petit que son papa ou sa maman est à l’hôpital en raison de sa santé mentale?
Parlez-lui avec des mots simples, comme vous le feriez pour n’importe quelle maladie : « Papa (ou maman) est malade dans sa tête et il (ou elle) est à l’hôpital pour que les médecins le (ou la) soignent. » L’important, c’est de rassurer l’enfant en lui disant que son parent reçoit de l’aide, mais aussi qu’il pense très fort à lui. L’enfant peut s’inquiéter des conséquences de l’hospitalisation sur sa vie de tous les jours. Il faut donc lui dire ce qui sera fait pour assurer le plus possible la continuité de sa routine. Il est aussi important de lui permettre de continuer à jouer et à avoir du plaisir. Même si l’un de ses parents est malade, il reste un enfant.
Puis-je être un bon parent malgré mon problème de santé mentale?
Bien sûr, à condition de faire ce qu’il faut pour guérir ou pour stabiliser votre état. « Une des étapes essentielles est d’accepter le diagnostic et de reconnaître que certains aspects de la maladie peuvent nuire à vos capacités parentales, estime la psychologue Isabelle Laviolette. Avec la volonté d’améliorer vos compétences, vous pouvez aller chercher de l’aide pour travailler sur vos difficultés et développer de meilleures habiletés parentales. »
Je viens d’apprendre que mon enfant a un retard de développement. Comment accepter la situation?
Déni, colère, tristesse, sentiment de culpabilité… Il est normal d’être envahi par ces émotions après une telle nouvelle. « Les parents doivent faire le deuil de l’enfant rêvé, dit la psychologue Nancy Verreault. Ce processus est difficile et prend du temps. » Pendant cette période, il vaut mieux éviter de vous isoler. Vous confier à des personnes pouvant vous offrir soutien et réconfort vous fera peut-être du bien. Même si cela peut paraître difficile au début, vous devriez aussi essayer de continuer à faire des activités que vous aimez. Vous éviterez ainsi de glisser dans la dépression et vous serez plus disponible pour accompagner votre tout-petit dans ce qu’il vit. Peu à peu, vous surmonterez le choc et vous vous adapterez au problème de santé de votre enfant.
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Si votre santé mentale ou celle d’un proche vous inquiète, adressez-vous à votre médecin de famille, à une clinique médicale, à votre CLSC ou à votre programme d’aide aux employés (si vous en avez un). La situation sera évaluée et vous pourriez recevoir certains soins. Si nécessaire, vous serez ensuite dirigé vers un service spécialisé en santé mentale. Vous pouvez aussi appeler la ligne Info-Social 811. Un intervenant psychosocial pourra répondre à vos préoccupations et vous orienter vers d’autres ressources au besoin. Des groupes de soutien pourraient aussi vous aider. |