Mon fils rêve d’un chien, ma fille d’un chat, mon ado d’une sirène! Avant de transformer ma maison en zoo, j’ai commencé par leur acheter 2 poissons et un bocal. Un petit rouge nerveux que mon fils a baptisé Chocolat-Chaud et un joli blanc gracieux surnommé affectueusement Rozer-Bob par ma fille. Je sais, c’est magnifique, voire « full aquatique », selon mon ado (si vous comprenez de quoi elle parle, faites-moi signe). Eh bien, 6 jours après l’arrivée de ces petits hôtes, je vous annonce officiellement que, pour mon équilibre psychologique, notre maison-zoo n’ouvrira JAMAIS ses portes!
Jour 1 : Mes enfants surexcités s’agitent autour du bocal en poussant des cris de joie pendant que les 2 poissons font des bulles en nageant dans tous les sens à la recherche d’une sortie qui n’existe pas.
Jour 2 : Je demande à mon fils d’arrêter de taper sur la vitre et j’explique à ma petite que les poissons digèrent très mal les Playmobils et que ce n’est pas la peine de découper les cheveux de sa poupée pour les balancer dans le bocal. Si elle veut des algues comme dans Nemo, on ira en acheter au magasin.
Jour 3 : Roger-Bob n’a pas l’air dans son assiette. Il essaie d’entrer en communication avec moi pendant que j’épluche mes carottes. Il reste figé à la surface de l’eau en agitant mollement la bouche pendant que Chocolat-Chaud continue de chercher, en vain, une sortie de secours.
Jour 4 : Roger-Bob, découragé par mon incapacité à décoder son langage, stagne à la surface de l’eau ou dans le fond de son bocal en attendant que ça se passe. Son inertie m’inquiète. Je crains pour sa vie et j’ai soudain la vision angoissante de ma fille en train de découvrir le corps inerte de son poisson adoré. Non, mais quelle idée j’ai eue de faire entrer un animal chez nous! Mieux vaut prévenir que guérir, je décide de préparer mes petits à accepter l’inévitable. En apprenant la fin imminente de son « poisson mou », ma petite a les larmes aux yeux. « C’est pas zuste maman. Poukoi c’est le mien qu’est malade? » Sa tristesse me fend le coeur. Pour lui remonter le moral, je lui raconte qu’on lui fabriquera une jolie boîte multicolore sur laquelle on écrira son nom. On organisera aussi une grande fête pour célébrer sa mort, puis on ira l’enterrer dans le fond du jardin. Et, si elle veut, on pourra retourner au magasin pour acheter un autre poisson. Elle pourra même l’appeler Roger-Bob 2 en souvenir de l’autre. Ça marche. Ma fille hoche la tête en souriant puis embrasse le bocal en signe d’adieu avant de se précipiter sur sa boîte de feutres.
Jour 5: Mes enfants font de la haute surveillance. La journée passe. Roger-Bob tient le coup.
Jour 6 : Le futur disparu gobe des bulles. Je commence à me demander si la mollesse ne fait pas partie de son tempérament. Assise devant le bocal, ma fille me lance soudain à voix haute : « C’est long qu’il meurt mon poisson, maman! » Mon fils enchaîne aussitôt en disant que serait cool si son poisson mourait aussi, parce qu’il aimerait bien lui faire une boîte lui aussi. « Tu sais comment on peut les faire mourir plus vite? » Je blêmis.
Depuis, j’ai placé le bocal hors de leur portée! Ça m’apprendra à vouloir protéger mes enfants.
6 avril 2011