Parfois, les enfants vivent des émotions sans trop savoir pourquoi. Même les parents n’ont pas toujours les explications. Témoignage de Keven Beauregard, papa.Mon garçon prend énormément de temps à s’endormir le soir. Il a de la difficulté à dompter le petit hamster qui se met à courir dès qu’il touche l’oreiller. Même s’il nous appelle moins qu’avant, sa petite tête ne manque pas de se soulever lorsque ma conjointe ou moi passons tout près de sa chambre.
Le hamster peut faire défiler des projets emballants, des idées de jeux avec ses amis, des souvenirs joyeux de la journée. Mais parfois, c’est l’angoisse qui prend toute la place, ou un mélange d’émotions difficilement identifiables, même du haut de ses 8 ans.
C’est que mon plus vieux vit avec des émotions un peu intenses pour son âge. Des émotions qui débordent parfois par les yeux, sans qu’il comprenne trop pourquoi. On apprend à gérer ça, lui et nous. Notre job de parent est de comprendre un peu à sa place et lui expliquer avec des mots simples. Et on en a passé des mots! Car mon plus vieux veut tout savoir, tout comprendre! Alors on explique.
Mais parfois, les mots ne viennent pas, les explications non plus.
Comme l’autre soir. Il devait être près de 22h, heure où mon garçon ne dort jamais. Il est couché, mais il ne dort pas. J’entends des petits pas qui font couiner le plancher. Je me retourne en sachant très bien ce que je vais voir, dans la pénombre du corridor : mon p’tit gars, incertain de ma réaction, qui s’avance vers moi les mains jointes près de sa bouche.
- Qu’est-ce qu’il y a mon homme?
- Je sais pas trop...
L’incertitude dans son visage laisse place à une tristesse, une mélancolie dont je suis maintenant un peu habitué. Je lui fais signe de venir me voir. Il accélère le petit pas et vient se blottir contre moi. On forme une boule sécurisante. J’en profite autant que lui sachant très bien qu’en vieillissant, ces petits moments seront moins fréquents. Les minutes passent, des minutes où le silence règne, agissant comme un baume à tout ce qui pourrait être la source de sa mélancolie. Je ne sais pas combien de temps s’est écoulé. 1, 5, 15 minutes? Un moment donné, mon garçon s’est relevé la tête, m’a regardé avec un petit sourire, m’a embrassé la joue.
- Bonne nuit papa.
- Bonne nuit mon loup.
Et il est reparti se coucher, la mélancolie en moins, morte dans la boule d’amour que nous avions faite.
On en passe du temps à expliquer, à répéter, à décortiquer le simple pour le rendre encore plus simple. On veut repousser les doutes et les peines en analysant encore et encore. Notre premier réflexe est toujours de rationaliser.
Mais, des fois, tout ce qu’on à faire, c’est d’être présent pour l’autre. Lui faire sentir qu’on est là. Et c’est souvent tout ce que nos enfants ont besoin de comprendre.
28 août 2020
Photo : GettyImages/gradyreese