Pré-rentrée chaotique

Pré-rentrée chaotique
La maîtresse est jeune et jolie avec sa robe à fleurs, ses petites lunettes rouges et ses cheveux bien peignés. Ses yeux pétillent presque autant que ceux des papas qui la dévorent des yeux depuis qu’ils l’ont vue entrer dans la classe. Elle livre son discours de bienvenue. À nous, chers parents, assis bien sagement sur des chaises miniatures beaucoup trop petites pour la largeur de nos postérieurs.

Une fois les présentations d’usage terminées, elle nous explique que nous sommes là pour préparer les cahiers et ranger les affaires de nos enfants (qui sont restés bien sagement à la maison) afin que leur pupitre soit bien rangé et que tout soit prêt pour la vraie rentrée, qui aura lieu quelques jours plus tard.

« Tout le monde est prêt? C’est parti! Prenez le duo-tang bleu qui était sur la liste de matériel et insérez-y les feuilles rouges qui sont devant vous », dit-elle pleine d’entrain.

Ma voisine pâlit, lève la main, se confond en excuses et demande si elle peut prendre un noir à la place parce qu’il n’y avait plus de bleu au magasin. La maîtresse approuve avec un sourire bienveillant. Subitement, le papa de Gabriel lâche un gros sacre parce qu’il vient de faire tomber les 30 crayons à mine de son fils sur le sol en voulant prendre les « maudites feuilles à mard...oups. Scusez. »

La maîtresse écarquille les yeux.

Le papa de Michaël profite de la diversion pour se tourner vers mon conjoint et lui dire qu’avec tous ces mini-meubles autour et sous lui, il se sent comme « Obélix dans la maison des 7 naines! » Sa femme lui donne un coup de coude et lui fait signe de se taire en voyant la maîtresse arriver près de nous les sourcils froncés et le doigt sur la bouche en signe de silence. Je lève la main et lui demande si je dois vraiment écrire le nom de mon enfant sur tous ses feutres comme l’a fait ma voisine avec ceux de son fils. Elle me confirme que oui, mais que ce n’est pas le moment : « On s’occupera des crayons tout à l’heure. Pour l’instant, on termine avec le duo-tang bleu, noir ou ce que vous voulez. Peu importe! » Puis, elle se tourne vers la maman debout devant la porte qui veut savoir comment se rendre aux toilettes.

Un léger brouhaha s’installe. La maîtresse frappe dans ses mains pour réclamer le silence.

La mère de Charles-Antoine, assise au premier rang, lui demande (sans lever la main) comment sont gérées les punitions collectives. L’enseignante la regarde d’un air interrogateur. La mère renchérit : « Si la classe est punie, mais que son fils n’a rien fait, comment le saura-t-elle? Il est hors de question qu’elle punisse un innocent. Encore moins si c’est son fils qui, d’ailleurs, ne fait jamais de bêtises (sauf si on le provoque). »

La maîtresse prend une grande respiration, enlève ses jolies lunettes rouges, frotte frénétiquement son oeil droit (étalant du même coup son mascara sur sa paupière), reconnaît que c’est une bonne question, mais qu’on verra ça tout à l’heure, car « il y a beaucoup de choses à préparer pour les enfants et que ce serait bien que tout le monde se concentre sur le rangement ».

Le papa de Gabriel s’énerve : « Madame! Pourquoi ce sont pas les enfants qui font ça? Y a ben trop de feuilles! Ça rentre pas dans le duo-truc que vous m’avez fait acheter. C’est compliqué votre affaire! »

« Tu t’es trompé de paquet, c’est pour ça! », répond sa femme.

Je crois que c’est à ce moment-là que la maîtresse a demandé si quelqu’un avait de l’aspirine.

Quand, je suis rentrée à la maison, 1 heure plus tard, mon fils s’est dressé sur son lit avec son toutou serré dans ses bras et m’a demandé, inquiet :

« Alors maman, elle est comment ma maîtresse? »

J’ai répondu : « Fatiguée, mon chéri. Très, très, très fatiguée! »

 

31 août 2011

Naître et grandir

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