Autorité parentale : comment l’exercer après la séparation?

Autorité parentale : comment l’exercer après la séparation?
Autorité parentale : comment l’exercer après la séparation?
Comment s’exerce l’autorité parentale au quotidien en cas de séparation.

16 octobre 2023 | Même lorsqu’ils sont séparés, les parents continuent d’exercer leur autorité pour prendre soin de leur enfant. Au quotidien, comment se prennent les décisions importantes au sujet de l’enfant dans un contexte de séparation? Les réponses d’une avocate à des questions courantes.

L’autorité parentale est un ensemble de droits et d’obligations que tout parent a envers son enfant pour prendre les décisions qui concernent son bien-être. « C’est un principe inscrit dans le Code civil du Québec qui décrit la façon dont les parents vont se partager ou se consulter sur toutes les décisions d’importance qui concernent un enfant mineur. Par exemple, en ce qui concerne la santé, l’éducation et le lieu de résidence de l’enfant », a expliqué Me Justine Lambert-Boulianne, avocate à l’aide juridique, lors d’un récent webinaire d’Éducaloi au cours duquel elle a répondu à des questions courantes.

Le parent qui n’a pas la garde a-t-il droit aux mêmes informations que l’autre parent en ce qui concerne l’école et la santé de son enfant?

« Oui, absolument. Le fait de ne pas avoir la garde exclusive ou même de ne pas avoir de contact avec son enfant n’entraîne pas la perte de son autorité parentale », précise Me Justine Lambert-Boulianne. Le parent qui n’a pas la garde de son enfant a le droit de consulter les bulletins scolaires, d’assister aux rencontres avec l’enseignant et d’obtenir des renseignements sur les soins médicaux que reçoit son enfant.

Un parent a la garde exclusive lorsqu’il assume plus de 60 % du temps de garde de son enfant.

« On encourage le parent à aller chercher directement l’information à la source, par exemple, en s’inscrivant sur le site de l’école pour recevoir les bulletins et en contactant l’enseignant de l’enfant, indique l’avocate. C’est important qu’il se mobilise pour aller chercher les informations auxquelles il a accès. Il reste toutefois beaucoup de situations où c’est seulement le parent avec la garde qui obtient de l’information, par exemple lors d’une conversation informelle avec l’enseignant de l’enfant ou avec son médecin lors d’un rendez-vous médical. Dans ces cas-là, il y a une obligation de transmettre les informations importantes à l’autre parent. C’est important de l’informer, principalement en cas de problème, si l’enfant est en échec scolaire ou s’il a un problème de santé. »

Comment s’applique l’autorité parentale pour des décisions concernant les activités spéciales à l’école et les activités parascolaires?

Il n’y a pas de réponse unique, précise Me Justine Lambert-Boulianne. « C’est du cas par cas. Ça dépend de la décision et de son impact, dit-elle. Par exemple, si un enfant a besoin d’une autorisation pour participer à un dîner-pizza à l’école, le parent qui a la garde ce jour-là peut prendre seul cette décision. »

En revanche, l’inscription à une activité parascolaire est une décision un peu plus importante parce qu’elle peut avoir un impact sur les droits d’accès de l’autre parent. « Si un parent décide d’inscrire son enfant à un cours de natation et qu’une fin de semaine sur deux il va falloir que l’autre parent l’amène à ses cours, c’est important de s’informer et de s’entendre », cite en exemple l’avocate. Dans ce cas, les parents doivent en discuter et prendre la décision ensemble.

Est-ce qu’un parent peut décider seul que son enfant devient végétarien?

Généralement, ce qu’un parent donne à manger à son enfant ne relève pas de l’autorité parentale, explique l’avocate de l’aide juridique. « Quand l’enfant est avec un de ses parents, c’est ce parent qui décide ce que l’enfant va manger, indique-t-elle. On ne consulte pas l’autre parent pour savoir si on fait du spaghetti ou du pâté chinois. »

Mais décider que l’enfant devient végétarien relève de l’autorité parentale. Ça devient une décision importante en raison de ce que cela implique pour l’enfant et pour l’autre parent. Un parent pourrait s’y opposer parce qu’il pense que ce n’est pas dans l’intérêt de l’enfant ou parce qu’il ne veut pas adopter ce régime alimentaire chez lui.

« Les parents doivent s’entendre et décider ensemble là-dessus. Ce qui arrive souvent comme entente, c’est que l’enfant mange comme ci chez un parent et comme ça chez l’autre parent », mentionne Me Justine Lambert-Boulianne.

Comment choisir une école quand un parent déménage?

Les parents doivent décider ensemble dans quelle école inscrire leur enfant, même dans le cas où un parent a la garde exclusive de l’enfant. Le parent qui a la garde exclusive peut décider du lieu de résidence de l’enfant, mais le choix de l’école reste la décision des deux parents.

« Dans le cas d’une mère avec la garde exclusive qui déménage de Montréal à Terrebonne, ça se peut que le père qui reste Montréal ne veuille pas que l’enfant fréquente une école trop loin de chez lui pour pouvoir aller le conduire pendant ses jours de garde », illustre l’avocate.

Dans quels cas un parent peut se voir retirer son autorité parentale?

C’est le tribunal qui peut rendre la décision de retirer à un parent son autorité parentale. C’est ce qu’on appelle la déchéance parentale. Il s’agit d’une mesure exceptionnelle qui se fait pour des motifs graves comme la violence ou l’abus sexuel d’un enfant par son parent.

« On peut aussi voir une déchéance parentale pour motif d’abandon, dans le cas où un parent est complètement absent, ajoute Me Justine Lambert-Boulianne. Cela se fait généralement lorsqu’un parent a volontairement abandonné son enfant depuis 5 à 7 ans. »

Il peut également arriver qu’un parent se voie retirer certains aspects de son autorité parentale. C’est ce qu’on appelle le démembrement de l’autorité parentale.

« Cela peut par exemple se produire dans le cas d’un parent qui ne reconnaît pas un problème de santé chez son enfant, qui refuse systématiquement que l’enfant voie un professionnel, qu’il reçoive des soins ou prenne des médicaments, dit l’avocate. À terme, le tribunal pourrait dire que ce parent n’est plus en mesure de prendre des décisions adéquates en ce qui concerne les soins de santé de son enfant. Le tribunal donnerait alors le droit à l’autre parent de prendre seul toutes les décisions qui concernent la santé de l’enfant. »

Est-ce que les nouveaux partenaires des parents ont une certaine autorité parentale?

Non, l’autorité appartient aux parents qui se trouvent sur l’acte de naissance. Ils demeurent les seuls à pouvoir prendre les décisions importantes qui concernent leur enfant.

« Dans la pratique, un parent peut toutefois déléguer un des attributs de son autorité parentale à son conjoint de façon informelle, précise Me Justine Lambert-Boulianne. Par exemple, une maman séparée peut permettre à son nouveau conjoint de partir au chalet avec son fils pour la fin de semaine. » C’est comme si elle lui déléguait temporairement la garde de son enfant.

Les parents peuvent aussi déléguer certaines tâches du quotidien à leur nouveau partenaire, comme aller chercher l’enfant à la garderie. Mais ce n’est pas le rôle du nouveau conjoint de décider à la place des parents ce qui est le mieux pour l’enfant. C’est la même chose pour les grands-parents : ils n’ont pas d’autorité parentale reconnue.

Dans certaines circonstances qui le justifieraient, un tribunal pourrait cependant accorder l’autorité parentale (en partie ou en entier) à un autre adulte que le parent. « Par exemple, si pour une raison X, une grand-maman s’occupe à temps plein de sa petite-fille, il va falloir à un certain point qu’elle soit capable d’exercer l’autorité parentale pour l’inscrire à l’école et l’amener voir le médecin », explique l’avocate. Il faut toutefois aller devant le tribunal pour effectuer ce changement.

Quand les parents ne s’entendent pas…

La médiation familiale est l’avenue privilégiée pour aider les parents séparés à trouver un terrain d’entente lorsqu’ils sont en désaccord sur un aspect de leur autorité parentale. Lorsqu’aucune entente n’est possible, les parents peuvent faire une demande en justice pour qu’un juge tranche et prenne la décision pour eux.
Le juge devra alors évaluer ce qui est dans le meilleur intérêt de l’enfant. « C’est la seule chose qui importe, précise Me Justine Lambert-Boulianne. Ce qu’un parent veut et ce que l’autre veut, ça n’intéresse pas le tribunal. Tout ce qui l’intéresse pour rendre une décision, c’est l’intérêt de l’enfant, c’est-à-dire ce qui est le mieux pour lui. »

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter notre dossier : L’enfant au coeur de la séparation.

D’autres ressources :

Julie Leduc – Équipe Naître et grandir

Naître et grandir

Photo : GettyImages/ urbazon

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