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28 août 2009 – Se pourrait-il que l’acide folique (vitamine B9) - dont on enrichit la farine blanche, la semoule de maïs et les pâtes au Canada – serve de carburant à certains cancers? C’est ce que des scientifiques se demandent, à la lumière de récentes études portant sur la pertinence d’enrichir davantage d’aliments en acide folique (vitamine B9).
Des chercheurs irlandais ont récemment observé, chez des femmes enceintes et des hommes, qu’une partie de l’acide folique obtenu de l’alimentation - de 1,3 % à 2,25 % - n’était pas absorbée par l’organisme.
Or, ces acides foliques non métabolisés dans le sang pourraient accélérer la croissance des cellules cancéreuses chez des individus ayant des lésions précancéreuses – plus particulièrement dans l’intestin.
Selon les auteurs de l’étude, l’Irlande aurait tort de rendre obligatoire l’enrichissement de certains aliments en acide folique, comme le recommandait la Food Safety Authority en 2006. Une telle politique ferait augmenter de 12 % le taux d’acide folique sanguin non métabolisé au sein de la population. Et, potentiellement, faire augmenter le nombre de cas de cancers, croient-ils.
Leurs craintes reposent notamment sur une étude épidémiologique1 publiée en 2007. Les chercheurs avaient observé une augmentation de l’ordre de 4 à 6 cas de cancer du côlon par tranche de 100 000 personnes, dans les pays où la réglementation oblige l’enrichissement de certains aliments en acide folique (vitamine B9).
Récemment, une étude canadienne menée sur des rats indiquait que l’acide folique en surdose pourrait « nourrir » certains cancers, dont le cancer du côlon2.
Les résultats de cette étude ont eu des échos dans le monde. Si bien que les pays de l’Union européenne ainsi que la Nouvelle-Zélande hésitent, pour le moment, à adopter une politique d’enrichissement des aliments en acide folique. Au Canada et aux États-Unis, depuis 1998, dans le cadre d’une stratégie de santé publique, la farine blanche, la semoule de maïs et les pâtes sont systématiquement enrichies d’acide folique (vitamine B9).
Pourquoi de l’acide folique dans les aliments?
L’enrichissement de certains aliments en acide folique vise à augmenter, chez les femmes enceintes et celles désirant le devenir, les apports en vitamine B9 alimentaires afin de réduire le taux d’anomalies du tube neural (ATN) chez les nouveau-nés. Ces anomalies atteignent le cerveau et la moelle épinière des nourrissons (spina-bifida, anencéphalie). Cette mesure de santé publique permettrait de prévenir environ 2 cas d’ATN sur 10 000 naissances – une réduction de 50 % des cas d’ATN chez les bébés. |
Des doutes légitimes?
Malgré les doutes qu’expriment certains pays quant à la pertinence d’enrichir certains aliments en vitamine B9, Santé Canada continue de recommander un apport quotidien en acide folique de 400 µg (0,4 mg) aux femmes en âge de procréer. Par mesure de prudence, on déconseille toutefois de prendre un dosage supérieur.
Pour sa part, le pharmacien Jean-Yves Dionne juge que si l’augmentation des cas de cancers observée dans l’étude canadienne est bien réelle, « celle-ci est modeste et on ne sait pas si c’est bien l’acide folique qui est en cause ».
Selon lui, si l’acide folique renfermait une action néfaste, elle ne toucherait que les personnes chez qui le cancer est déjà existant.
« Il faut mettre les chiffres en perspective, conclut-il : on sait que l’enrichissement d’aliments en acide folique permet de réduire à 2 cas sur 10 000 les cas d’anomalies du tube neural chez les nouveau-nés, contre une augmentation potentielle de 2 cancers sur 100 000. »
Pierre Lefrançois et Martin LaSalle – PasseportSanté.net
1. Mason JB, Dickstein A et al. A temporal association between folic acid fortification and an increase in colorectal cancer rates may be illuminating important biological principles: a hypothesis.Cancer Epidemiol Biomarkers Prev. 2007 Jul;16(7):1325-9.
2. Sie KK, Chen J, et al. Folic acid supplementation provided in utero and during lactation reduces the number of terminal end buds of the developing mammary glands in the offspring. Cancer Lett. 2009 Jul 18;280(1):72-7.