Des milieux de garde qui font grandir

Quand un enfant va dans un milieu de garde, il ne fait pas que s’amuser, il apprend. Il découvre la vie en groupe, se fait des amis, apprend de nouveaux mots, développe sa motricité en bougeant... Voyez comment des services de garde de qualité peuvent avoir un effet positif sur les tout-petits.

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Vive la vie de groupe!

Dans un milieu de garde, il y a plein d’amis et, parfois, plus d’un adulte pour s’occuper d’un enfant. Un tout-petit doit donc apprendre à vivre en groupe.

Par Julie Leduc

Dans un milieu de garde, il y a plein d’amis et, parfois, plus d’un adulte pour s’occuper d’un enfant. Un tout-petit doit donc apprendre à vivre en groupe.

Le milieu qui a le plus d’influence sur le développement d’un enfant c’est, bien sûr, sa famille. Toutefois, comme la majorité des tout-petits passent beaucoup de temps au service de garde, ce milieu contribue aussi à leur développement.

Les services de garde sont comme une petite société. « Dans un milieu de qualité, l’éducatrice aide les enfants à entrer en contact les uns avec les autres, à jouer ensemble, à partager et à régler de petits conflits », indique Caroline Bouchard, psychologue et professeure à l’Université Laval.

Ça ne fait pas longtemps que le petit Louis, 14 mois, fréquente un milieu de garde. Pourtant, ses parents, Jean-François Lefebvre et Anne-Marie Lavoie-Pilote, voient qu’il apprend déjà à créer des liens avec les autres. « Il a commencé à faire des bye bye et à envoyer des becs soufflés, dit Anne- Marie. Ce n’est pas nous qui le lui avons montré, car on croyait qu’il était trop petit pour le faire. »

Un enfant qui se retrouve chaque jour dans un groupe apprend aussi à être sensible aux autres. C’est particulièrement le cas d’un tout-petit qui n’a pas de frère ou de soeur. « Un enfant de 18 mois qui tape un ami va vite voir les conséquences de son geste. Les éducatrices vont lui montrer la réaction de son ami, dit Nathalie Bigras, professeure au Département de didactique de l’UQAM. L’enfant devient donc rapidement capable de voir que l’autre existe et qu’il vit des émotions. »

Lorsqu’un tout-petit côtoie chaque jour d’autres enfants, il exerce ses habiletés sociales.

Julie Boucher, la maman d’Élisabeth, 4 ans, et de Michaël, 8 ans, remarque que sa fille apprend également à prendre soin des autres au service de garde. « Elle n’a pas de petit frère ni de petite soeur, mais elle aide parfois les éducatrices du groupe des bébés à servir la collation. Elle adore prendre soin des plus petits, raconte-t-elle. Il y a aussi un petit garçon en fauteuil roulant dans son groupe. Élisabeth l’aime beaucoup et elle adapte les jeux pour être avec lui. Elle apprend à accepter les différences des autres, une chose que je n’aurais pas pu lui montrer à la maison. »

 

Des bienfaits pour l’école

Les enfants qui ont appris à vivre en groupe ainsi qu’à suivre des routines et des règles en milieu de garde arrivent mieux préparés à l’école. Des études démontrent d’ailleurs que la fréquentation d’un service de garde de qualité peut avoir un effet positif sur la réussite scolaire à l’école primaire.

Des bienfaits sur le comportement

Au service de garde, les tout-petits suivent des consignes et des règles de groupe ainsi que des routines. Cela leur donne une stabilité qui peut avoir des effets positifs sur leur comportement. « Quand les attentes sont précises, claires et cohérentes, l’enfant se sent davantage en sécurité et sait comment se comporter dans la vie de groupe », indique Karine Busilacchi, orthopédagogue et responsable du contenu pédagogique au Centre d’aide et de soutien aux intervenants et organismes en petite enfance (CASIOPE).

Quand une éducatrice aide un enfant à mieux gérer ses émotions, elle l’aide aussi à améliorer certains comportements. C’est ce que Julie a observé quand son garçon avait 3 ans. « Quand un ami lui prenait un jouet, Michaël devenait très fâché. Son éducatrice lui a appris à dire pourquoi il était fâché et à trouver des solutions. Je ne pensais pas qu’il pouvait mettre autant de mots sur ses émotions à cet âge. On a reproduit cette façon de faire à la maison et ça l’a beaucoup aidé! Plus il parlait de ses émotions, moins il faisait de colères. »

Qu’est-ce qu’un milieu de garde de qualité?

« Les milieux de garde sont des endroits très stimulants. L’enfant y a des interactions avec beaucoup de monde, adultes comme enfants. Ces stimulations favorisent son développement », indique Nathalie Bigras, professeure au Département de didactique de l’UQAM et directrice de l’équipe de recherche Qualité des contextes éducatifs de la petite enfance. Et comme c’est durant la petite enfance que le cerveau de l’enfant se développe le plus rapidement, le tout-petit est très réceptif aux stimulations. C’est ce qui lui permet de faire des apprentissages.

Il est toutefois important que le service de garde soit de qualité pour favoriser le développement des enfants. Afin de savoir si un milieu de garde est de qualité, un parent devrait s’assurer que le personnel est formé; que les lieux sont sécuritaires et propres; que l’horaire est adapté au rythme de l’enfant; que la nourriture est de qualité et que les activités, le matériel de jeu et les livres proposés sont variés et adaptés à l’âge des enfants. Il devrait aussi y avoir de la place pour bouger à l’intérieur et à l’extérieur.

Dans un milieu de qualité, l’éducatrice propose des activités stimulantes à l’enfant. Elle est à son écoute, l’encourage et le réconforte. L’enfant se sent en sécurité et cela lui donne le goût d’explorer son milieu. Ce sentiment a des effets positifs dans tous les domaines du développement de l’enfant.

Un autre élément important favorise le développement d’un tout-petit : la qualité de sa relation avec son éducatrice. « Dans un milieu de garde de qualité, l’éducatrice est chaleureuse et sensible aux besoins des enfants. Elle a aussi des règles et des attentes claires que son groupe comprend bien », note Caroline Bouchard, professeure à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, psychologue et directrice de l’Unité mixte de recherche Petite enfance, grandeur nature.

 

Quand on joue, on apprend

En milieu de garde, un tout-petit entend beaucoup de monde parler autour de lui. De plus, les histoires, les comptines et les chansons lui apprennent beaucoup de mots et l’aident à comprendre le monde qui l’entoure.

En milieu de garde, un tout-petit entend beaucoup de monde parler autour de lui. De plus, les histoires, les comptines et les chansons lui apprennent beaucoup de mots et l’aident à comprendre le monde qui l’entoure.

« Dans un milieu de garde éducatif, les enfants se développent dans tous les domaines par l’exploration, l’observation et leurs interactions avec les autres », mentionne Karine Busilacchi, orthopédagogue. Par exemple, quand ils jouent à faire semblant d’être des vétérinaires, ils développent leur langage, leurs habiletés à faire des liens à partager, à manipuler du matériel et à exprimer leurs idées.

Michaël, le fils de Julie, est justement devenu un « spécialiste » des dinosaures grâce au jeu. « Il a commencé à s’intéresser aux dinosaures en jouant avec des figurines et en regardant des livres à la garderie, dit-elle. On a continué à lire des livres sur le sujet à la maison et il a appris presque tous les noms de dinosaures! » De son côté, sa fille Élisabeth, 4 ans, a commencé à apprendre l’anglais dans son milieu de garde. « Elle dit plusieurs chiffres et plusieurs couleurs en anglais, s’étonne Julie. Elle a appris simplement en jouant avec des amis anglophones de son groupe. »

Et même quand les tout-petits ne parlent pas encore, les éducatrices commentent leurs jeux. « Par exemple, si un tout-petit joue avec des blocs, son éducatrice peut dire : “Tu prends ton bloc bleu.” Petit à petit, elle lui apprend des mots tout en favorisant le développement de ses connaissances », explique Caroline Bouchard, psychologue.

Écrans et garderie : un usage encadré
Depuis 2022, des directives concernant l’usage des écrans ont été ajoutées au Règlement sur les services de garde éducatifs à l’enfance. Auparavant, le règlement autorisait les éducatrices et éducateurs à utiliser un téléviseur ou tout autre équipement audiovisuel si leur utilisation était liée au programme éducatif. À présent, en plus d’être liée au programme, l’utilisation d’un écran (ex. : téléviseur, ordinateur, tablette) en milieu de garde :
  • est interdite avec des enfants de moins de 2 ans;
  • ne doit pas dépasser 30 minutes dans une même journée;
  • doit se faire de temps en temps (et non régulièrement, par exemple pas tous les jours après le dîner ou pas tous les vendredis après-midi).
Comme l’utilisation des écrans en milieu de garde doit faire partie du processus d’intervention éducative, l’éducatrice ou l’éducateur devrait se trouver auprès des enfants pendant l’utilisation des appareils et faire ensuite un retour sur l’activité.

Un plus pour le langage

« Comme parent, on comprend vite nos enfants, remarque Julie. Je trouve que la garderie les aide à construire des phrases plus complètes. Ils doivent dire plus de mots à leur éducatrice pour se faire comprendre. »

Les éducatrices qui utilisent un vocabulaire riche, des mots justes et précis, et qui ajoutent parfois des mots aux phrases des enfants les aident à développer leur langage. Par exemple, si un tout-petit dit : « Je veux le camion » en montrant du doigt un camion de pompier, l’éducatrice peut en profiter pour dire : « Oui, tu peux prendre le camion de pompier rouge. » Ces stratégies aident à parler.

De plus, au service de garde, les enfants se font raconter des histoires. Ils chantent des chansons et récitent des comptines. Ces activités viennent aussi enrichir le langage. « À l’écrit, les mots sont souvent plus recherchés. Les histoires permettent donc aux enfants d’apprendre de nouveaux mots », dit la psychologue Caroline Bouchard.

Les éducatrices utilisent également les livres pour faire réfléchir les tout-petits. « Elles leur posent des questions sur l’histoire, leur demandent d’imaginer la suite, dit Caroline Bouchard. Cela les amène à parler, mais aussi à développer leur pensée. »

Un atout pour les familles défavorisées

Plusieurs études ont démontré les bienfaits des services de garde de qualité sur le développement de l’enfant, en particulier pour les tout-petits venant de milieux défavorisés et pour ceux qui ont un tempérament difficile. Se retrouver dans un milieu plein de stimulations, où on lui parle beaucoup, aide l’enfant à bien se développer, notamment sur le plan du langage. Avoir une bonne relation avec son éducatrice lui permet aussi de trouver la sécurité nécessaire pour faire des apprentissages.

 

Il faut que ça bouge!

Lorsqu’il joue dans son milieu de garde, un enfant rampe, marche, court, saute... Ces habiletés l’aident à connaître son corps, à devenir agile et même à se préparer pour l’école.

Lorsqu’il joue dans son milieu de garde, un enfant rampe, marche, court, saute... Ces habiletés l’aident à connaître son corps, à devenir agile et même à se préparer pour l’école. 

Pas de doute pour Anne-Marie Lavoie-Pilote : son petit Louis, 14 mois, devient de plus en plus habile physiquement depuis qu’il va dans un milieu de garde. « Il a fait ses premiers pas à 13 mois, à la garderie, dit-elle. Je crois que ça l’a encouragé de voir d’autres enfants de son groupe marcher. Il se tenait déjà debout à la maison, mais il avait peur d’avancer. »

Des études ont toutefois révélé que les enfants ne bougeaient pas assez dans les services de garde et qu’ils passaient une grande partie de leur temps à faire des activités calmes qui ne font pas beaucoup bouger. Mais les choses seraient en train de changer. « Les éducatrices sont encouragées à faire plus d’activités physiques avec leur groupe, dit Nathalie Bigras, professeure à l’UQAM. Si on veut que les enfants soient actifs, ils doivent bouger pour découvrir leur corps », dit-elle.

Un enfant qui a l’occasion de bouger dans son milieu de garde découvre son corps et prend confiance en ses capacités.

D’ailleurs, dans le milieu de garde de Louis, les éducatrices font souvent faire de petits parcours aux enfants. « Elles les encouragent à se promener entre des obstacles, comme des coussins, explique Anne-Marie. Je vois que ça a développé chez lui d’autres habiletés : Louis est devenu un bon grimpeur! Il monte maintenant seul sur le divan et il peut grimper sur une marche d’escalier à quatre pattes. »

Développer sa motricité

Quand un enfant fait des jeux de poursuite, des courses à obstacles, des jeux de ballon ou quand il s’amuse sur une trottinette ou un tricycle, il exerce son équilibre, sa coordination et son endurance. Il renforce aussi ses muscles, dépense son énergie et libère ses petites tensions.

Et la motricité fine? Bien sûr, un enfant va l’exercer grâce à des activités comme les casse-têtes, le dessin et le bricolage. Ce qu’on réalise moins, c’est qu’un tout-petit peut aussi développer sa motricité fine en faisant des activités plus physiques.

« Lorsqu’un tout-petit s’amuse à ramasser des roches ou à faire des traces dans le sable avec ses doigts, il exerce aussi sa motricité fine, précise Karine Busilacchi, orthopédagogue. Même chose quand il installe son matelas pour la sieste, quand il lave ses mains ou quand il attache son manteau. » Toutes ces occasions d’exercer ses habiletés créent des bases solides qui l’aideront plus tard à l’école, lorsqu’il apprendra à lire et à écrire.

Oui au jeu à l’extérieur!

« Chaque jour, ma fille Élisabeth va dehors avec son groupe, se réjouit Julie. Les enfants jouent dans une grande cour où il y a du gazon, des carrés de sable, des pelles, des seaux, des ballons, des tricycles… Les éducatrices les amènent aussi souvent faire de petites promenades. Quand je vais la chercher, elle a du sable partout et c’est parfait! » En effet, jouer dehors apporte de nombreux bienfaits aux tout-petits. « Quand ils sont à l’extérieur, les enfants bougent davantage, dit Nathalie Bigras. Ça les amène à prendre de petits risques, à connaître leurs capacités physiques et à prendre confiance. »

 

À retenir
  • Fréquenter un milieu de garde de qualité peut avoir des effets positifs sur le développement d’un enfant.
  • Il est important que l’éducatrice soit chaleureuse et à l’écoute des besoins de l’enfant.
  • Dans un service de garde de qualité, un tout-petit développe son langage, en plus d’exercer ses habiletés sociales et motrices.

 

Naître et grandir

Source : magazine Naître et grandir, mars 2019
Recherche et rédaction : Julie Leduc
Révision scientifique : Christa Japel, professeure titulaire, département d’éducation et formation spécialisées, UQAM

En cours de mise à jour

 

RESSOURCES

 

Photos : Nicolas St-Germain