Pas de luxe, pas de fantaisie ni de caprice pour Francine et Jean-François, qui habitent à Montmagny avec leurs trois enfants âgés de 3, 4 et 7 ans. Pris à la gorge par le prix élevé des biens de consommation, les parents font preuve de beaucoup de discipline et de débrouillardise pour contrôler leurs dépenses.
Par Maude Goyer
Pas de luxe, pas de fantaisie ni de caprice pour Francine et Jean-François, qui habitent à Montmagny avec leurs trois enfants âgés de 3, 4 et 7 ans. Pris à la gorge par le prix élevé des biens de consommation, les parents font preuve de beaucoup de discipline et de débrouillardise pour contrôler leurs dépenses
« Il faut faire des acrobaties pour arriver. C’est un casse-tête quotidien. » Voilà comment Jean-François, qui gagne un salaire de 36 000 $ net par année comme peintre industriel, décrit la gestion du budget familial. « On dispose de peu de marge de manoeuvre, ajoute sa conjointe Francine, qui travaille à temps partiel comme agente de communication pour un organisme à but non lucratif et qui a un revenu annuel de 13 000 $ net. S’il nous arrive une dépense surprise, on est dans le trouble. ».
Vivre avec un faible revenu
Dans le bureau de l’Association coopérative d’économie familiale Rive-Sud de Québec, à Lévis, les parents écoutent avec attention la conseillère budgétaire Sylvie Fortin, qui a épluché leurs dépenses et leurs revenus.
Premier constat: avec un revenu familial annuel net de 49 000 $, avant l’aide des deux gouvernements, leur revenu est bien en dessous du salaire moyen annuel viable établi à 65 000 $ par l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) au printemps 2022. Surtout que ce montant a été établi pour une famille de deux adultes et deux enfants alors que Francine et Jean-François en ont trois. Le salaire viable représente, selon l’IRIS, un revenu qui permet de vivre dignement, de faire des choix et d’affronter les imprévus.
La famille de Montmagny n’est pas seule dans cette situation puisqu’au Québec, environ une personne sur cinq vit sous le seuil du revenu viable. Sylvie Fortin admet d’ailleurs être débordée par les demandes de consultations. « Ce sont maintenant les besoins de base des familles qui sont atteints. » Ce stress financier entraîne aussi de la détresse psychologique, observe celle qui a une formation de travailleuse sociale. Pour trouver des solutions, le papa aime bien parler avec d’autres parents. « Une de mes collègues a une fille du même âge que la mienne, dit Keven. On discute de l’éducation des enfants. On partage nos trucs. »
Prévoir un coussin financier
Heureusement, Francine et Jean-François, eux, gardent le moral. Mais ils ont peu de place pour l’improvisation et les surprises dans leur budget. L’analyse de leur situation révèle un revenu familial total (avec l’aide des gouvernements) de 75 390 $ et des dépenses totales de 70 830 $. Ce qui laisse à la famille un surplus annuel d’environ 4 560 $, soit 380 $ par mois.
« La voiture ne doit pas nous lâcher », lance Jean-François, en précisant qu’elle affiche près de 220 000 kilomètres au compteur. Le couple, qui a acheté sa maison en 2020, a aussi dû payer d’importantes réparations. Résultat: leur coussin financier n’existe plus.
Or, « idéalement, on essaie d’avoir de l’argent de côté pour être capable de payer l’équivalent de trois à six mois de dépenses », dit Sylvie Fortin. La conseillère suggère aux parents d’essayer de renégocier leurs assurances habitation et automobile afin de se dégager un peu d’argent pour un coussin financier.
Francine et Jean-François réussissent tout de même à épargner 250 $ par année, qu’ils distribuent dans un CELI et des régimes enregistrés d’épargne-études (REEE) pour leurs enfants. Comment y arrivent-ils ? Ils limitent le plus possible leurs dépenses, comme la nourriture, les vêtements et les sorties.
La famille court les friperies et recycle les vêtements d’un enfant à l’autre. Francine leur en confectionne aussi. Excellente gestion du frigo
Francine s’applique notamment à réduire au maximum les coûts d’épicerie de la famille autour de 140 $ par semaine. « Pour une famille de cinq, c’est exceptionnel ! », s’exclame Sylvie Fortin. La maman y consacre toutefois beaucoup de temps. Elle utilise notamment Flashfood, une application gratuite qui permet d’acheter à petits prix, dans des supermarchés, des produits et des aliments qui approchent de leur date de péremption. « Je vais les chercher, je les cuisine et je congèle », explique Francine. La famille a ainsi sauvé 5 300 $ en épicerie depuis le début de la pandémie.
Selon Recyc-Québec, une famille gaspille en moyenne l’équivalent de 1 300 $ en nourriture par année. Pas chez Jean-François et Francine. « Je ne perds rien, assure la maman. J’ai acheté un déshydrateur d’aliments alors si je ne peux pas cuire, mariner ou congeler un aliment, je le déshydrate. » De son côté, Jean-François croit beaucoup aux valeurs que cela inculque aux enfants. « On ne prend pas ce qu’on veut, mais ce qu’il y a, indique-t-il. Ça nous fait réfléchir aux gens qui sont très sélectifs ou capricieux. »
Peu de loisirs
Toutes les folies sont écartées du mode de vie de la famille. « On ne fait pas de voyage, dit Jean-François. Pour nos vacances, on profite des activités gratuites, on fait des pique-niques, on passe du temps ensemble dehors. »
En effet, leurs dépenses en divertissements sont bien minces, constate Sylvie Fortin. En ce sens, la conseillère budgétaire suggère aux parents de vérifier s’ils sont admissibles au programme Familles branchées du gouvernement fédéral. Cela pourrait leur permettre d’avoir accès à un forfait internet à 20 $ par mois au lieu de 80 $. Grâce à cette économie, la famille aurait un peu d’argent pour des activités.
Pour le reste, Francine et Jean-François doivent maintenir le cap, tout en augmentant, si possible, le remboursement de leurs prêts étudiants, avance Sylvie Fortin. « Mais somme toute, ça va bien, dit-elle. Et c’est parce que toute la famille fait des choix et des efforts ! »
Les finances de Francine et Jean-François
REVENUS ANNUELS |
Revenu net de Francine
|
13 000 $
|
Revenu net de Jean-François
|
36 000 $
|
Revenu familial total
(incluant allocations et
prestations gouvernementales)
| 75 390 $ |
PRINCIPALES DÉPENSES ANNUELLES |
Hypothèque
|
10 200 $
|
Réparations et entretien de la maison
|
10 200 $
|
Épicerie
|
7 270 $
|
Frais CPE et service de garde
|
6 950 $
|
Voiture
|
4 500 $
|
Soins de santé
|
4 000 $
|
Taxes municipales et scolaires
|
3 500 $
|
Remboursement prêts étudiants
|
3 240 $
|
Total des dépenses fixes et variables | 70 830 $ |
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