Comment favoriser la santé mentale de votre tout-petit?

Tout ce que vous faites pour prendre soin de votre enfant l’aide à avoir une bonne santé mentale. Voyez comment l’affection et l’attention que vous lui donnez ainsi que les stimulations que vous lui offrez favorisent son bien-être psychologique.

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Les gestes du quotidien qui favorisent une bonne santé mentale

Dès la naissance, un lien d’attachement commence à se former entre un enfant et ses parents. Ce lien est essentiel pour permettre à l’enfant de se sentir en sécurité et bien se développer.

Par Julie Leduc

Dès la naissance, un lien d’attachement commence à se former entre un enfant et ses parents. Ce lien est essentiel pour permettre à l’enfant de se sentir en sécurité et bien se développer. « La qualité de la relation qu’un enfant a, en bas âge, avec ses parents va guider son développement psychologique », dit Nicolas Berthelot, psychologue et professeur au Département des sciences infirmières de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Il est en effet important de s’intéresser au bien-être psychologique des tout-petits, car les premières expériences et le milieu dans lequel un enfant grandit ont un impact sur sa santé mentale. Plus un tout-petit est stimulé, à la maison ou dans son milieu de garde, plus des liens se créent entre les neurones de son cerveau pour lui permettre d’apprendre.

En effet, de 0 à 5 ans, le cerveau se transforme rapidement, suivant les stimulations qui lui sont offertes. « Et le cerveau d’un enfant se développe mieux quand ses parents ont du plaisir à prendre soin de lui », ajoute George Tarabulsy, professeur titulaire à l’École de psychologie de l’Université Laval et directeur scientifique du Centre de recherche universitaire sur les jeunes et les familles.

Avoir une bonne relation avec ses parents peut diminuer le risque pour l’enfant de présenter des problèmes de santé mentale plus tard.

Chaque jour, lorsque vous prenez soin de votre enfant et que vous répondez à ses besoins, vous l’aidez à bien se développer. Voici les gestes que vous posez sûrement déjà sans y penser, dans chacune des sphères de développement, et qui contribuent à son bien-être.

Son développement physique et moteur

Lorsque vous répondez aux besoins de base de votre enfant comme ceux d’être nourri, soigné et protégé, vous veillez non seulement à son bien-être physique, mais aussi à son bien-être psychologique.

Lorsque vous répondez aux besoins de base de votre enfant comme ceux d’être nourri, soigné et protégé, vous veillez non seulement à son bien-être physique, mais aussi à son bien-être psychologique. Voici des exemples de bonnes habitudes à prendre.

  • Assurez-vous que votre tout-petit dort suffisamment. Cela l’aide à mieux gérer ses émotions. Un sommeil de qualité renforce aussi ses apprentissages en plus de l’aider à se concentrer et à mieux utiliser son raisonnement.
  • Proposez-lui chaque jour des activités pour bouger. « C’est essentiel pour développer ses habiletés physiques, mais aussi pour son bien-être psychologique », souligne la psychologue et autrice Geneviève Beaulieu-Pelletier. Bouger libère des tensions, diminue l’anxiété et stimule la sécrétion d’hormones qui l’aident à se sentir bien et calme.
  • Laissez-le explorer son environnement en toute sécurité. Cela lui permet de découvrir son corps et de développer sa confiance et son autonomie.
  • Jouez chaque jour avec votre enfant. C’est en jouant qu’il découvre le monde qui l’entoure et qu’il se développe. Avoir du plaisir avec votre tout-petit enrichit aussi le lien qui vous unit. « Avec un bébé, vous pouvez simplement lui sourire, imiter ce qu’il fait ou le laisser jouer avec votre doigt », mentionne George Tarabulsy.
  • Stimulez ses sens. Faites-lui toucher différentes textures, goûter différents aliments, écouter de la musique et sentir des odeurs variées.
  • Allez dehors avec lui le plus souvent possible. Votre enfant bouge plus quand il est dehors. Il peut aussi y relever des défis, ce qui développe sa confiance. « Le contact avec la nature est aussi reconnu pour ses bienfaits sur la santé mentale », indique Marie-Pascale Deegan, travailleuse sociale et coresponsable du programme Agir tôt au Nunavik.

Son développement affectif

Lorsque votre tout-petit est aimé, écouté, compris et respecté, il se sent bien. Voici d’autres gestes qui l’aident à développer sa sécurité affective.

Lorsque votre tout-petit est aimé, écouté, compris et respecté, il se sent bien. Voici d’autres gestes qui l’aident à développer sa sécurité affective.

  • Répondez rapidement et chaleureusement aux besoins de votre enfant. Quand vous allez rapidement vers votre bébé qui pleure pour le réconforter, vous lui montrez que vous êtes là pour l’aider. « Faites-le en souriant, ajoute George Tarabulsy. Il voit que vous êtes content de le voir même quand il n’est pas bien. C’est très rassurant pour lui. »
  • Donnez-lui chaque jour de l’affection et de l’attention que ce soit avec des mots ou des gestes (ex. : le câliner, le bercer). Cela l’aide à comprendre qu’il est aimé et qu’il a une valeur. C’est ce qui construit les bases de son sentiment de sécurité et de son estime de soi.
  • Aidez votre enfant à apprivoiser ses émotions. Dès qu’il est bébé, commentez ses réactions en disant, par exemple : « Oh! Tu as fait un saut, tu as eu peur! » « C’est un début pour l’aider à comprendre ce qui se passe à l’intérieur de lui », explique Nicolas Berthelot. À mesure qu’il grandit, aidez-le à mettre des mots sur ce qu’il vit.
  • Accueillez ses émotions sans jugement et avec calme pour lui montrer qu’il est normal d’en vivre. Votre réaction influence sa gestion des émotions. « Dès qu’un enfant est anxieux, certains parents paniquent », constate par exemple Nicolas Berthelot. Or, l’anxiété est une réaction normale, dit-il.
  • Instaurez des routines et informez votre enfant des événements et des changements à venir. Savoir ce qui s’en vient donne une impression de contrôle à votre enfant. Cela réduit son stress et son anxiété en plus de favoriser son autonomie.
  • Évitez de crier et de réagir trop fortement devant votre enfant. Si vous le faites, excusez-vous et admettez que vous n’auriez pas dû crier. « Votre enfant comprend ainsi que ce n’est pas de sa faute et qu’il peut lui aussi faire des erreurs et les réparer ensuite », explique Chloé Gaumont, psychoéducatrice.

Son développement social

Lorsque votre enfant a un bon lien avec vous, il se sent en sécurité pour aller vers les autres. Il peut alors développer des relations qui favorisent son bien-être.

Lorsque votre enfant a un bon lien avec vous, il se sent en sécurité pour aller vers les autres. Il peut alors développer des relations qui favorisent son bien-être. Voici des idées pour l’encourager à s’ouvrir aux autres.

  • Offrez à votre enfant des occasions de développer ses habiletés sociales. « C’est aussi simple que de l’amener à l’épicerie dès qu’il est bébé pour qu’il vous voie interagir avec les autres », indique Geneviève Beaulieu-Pelletier. Amenez-le aussi au parc ou invitez un ami à la maison pour qu’il apprenne à partager, à attendre son tour et à régler de petits conflits.
  • Respectez le rythme et la personnalité de votre enfant. « Si un enfant a un tempérament plus réservé, il faut éviter de lui coller une étiquette de "timide", car cela nuit à l’estime de soi », avertit Nicolas Berthelot. Le psychologue conseille de continuer à favoriser les activités sociales et de donner le temps à l’enfant de devenir plus à l’aise.
  • Faites des jeux de rôle pour lui montrer comment entrer en contact avec les autres. Par exemple, déguisez-vous et faites semblant d’être un commerçant pour exercer votre tout-petit à dire bonjour, au revoir et merci.
  • Aidez votre tout-petit à se connaître et à s’affirmer. Laissez-le prendre des décisions, comme choisir ses vêtements ou un jeu pour l’amener à connaître ses préférences. « Aidez-le aussi à faire respecter ses limites », dit Marie-Pascale Deegan. Par exemple, s’il n’aime pas les bisous et les câlins, il a le droit de les refuser.
  • Encouragez la générosité et l’entraide. « Vous pouvez, par exemple, cuisiner des biscuits avec votre tout-petit et en offrir à un proche », suggère la psychoéducatrice Chloé Gaumont. C’est une façon de développer son empathie et de l’aider à voir les conséquences de ses actions.
  • Limitez les écrans. Plus votre enfant passe du temps devant un écran, moins il en a pour interagir avec les autres. Les écrans lui enlèvent plein d’occasions de se développer. « Il n’est pas en train de bouger et il est moins porté à aller découvrir le monde autour de lui », illustre Geneviève Beaulieu-Pelletier. Rappelez-vous aussi que les tout-petits de moins de 2 ans ne devraient pas être exposés à la télévision ou à tout autre écran. Et après 2 ans, ils ne devraient pas y être exposés plus d’une heure par jour.
On ne peut pas tout prévenir…
Les problèmes de santé mentale dépendent de plusieurs facteurs, dont les antécédents familiaux et les événements de la vie. Même si vous êtes un bon parent, votre enfant n’est pas à l’abri de vivre des situations difficiles pouvant affecter sa santé mentale plus tard (ex. : séparation, décès d’un parent, intimidation). « Toutefois, lorsqu’un enfant a un attachement sécurisant avec ses parents en début de vie, il fait preuve de résilience, note George Tarabulsy. Ça ne veut pas dire qu’il va toujours aller bien, mais il a ainsi des chances de mieux s’en sortir s’il va mal. »

Son développement cognitif et langagier

Lorsque votre enfant développe sa mémoire, son raisonnement et son langage, il arrive mieux à réguler ses émotions, ses pensées et ses comportements.

Lorsque votre enfant développe sa mémoire, son raisonnement et son langage, il arrive mieux à réguler ses émotions, ses pensées et ses comportements. Voici des gestes qui l’aident à développer ses capacités cognitives et son langage.

  • Regardez des livres avec votre enfant dès qu’il est bébé. La lecture stimule son langage et favorise votre lien d’attachement. Grâce aux livres, votre tout-petit en apprend plus sur le monde et développe son imagination.
  • Parlez avec votre enfant chaque fois que vous êtes avec lui. Le simple fait d’entendre des mots active son développement cognitif et langagier. « Parler ou chanter une chanson doucement à un bébé stimule plusieurs parties du cerveau, note George Tarabulsy. C’est fascinant de le voir regarder notre bouche et bouger sa bouche en réponse. C’est la preuve qu’il décode activement une foule d’informations. »
  • Laissez-le exprimer ses besoins et ses limites. « Apprenez-lui aussi des mots pour faire ses demandes, comme "du lait" et "dodo" », dit Marie-Pascale Deegan.
  • Favorisez le jeu libre. Lorsque votre enfant choisit et organise ses jeux, il développe sa pensée et son imaginaire, en plus d’apprendre à se connaître. « Laissez-le aussi s’ennuyer, poursuit Chloé Gaumont. Cela renforce son autonomie et sa créativité. »
  • Donnez-lui des responsabilités. Selon son âge, votre enfant peut accrocher son manteau ou placer les napperons sur la table. En plus de favoriser son autonomie, cela exerce ses capacités de planification et d’organisation.
  • Encouragez votre enfant à trouver des solutions aux difficultés qu’il rencontre. Cela lui apprend à réfléchir et à persévérer. « Posez-lui des questions pour lui donner des pistes et demandez-lui son avis », suggère Chloé Gaumont.

Les problèmes de santé mentale durant la petite enfance

Les problèmes de santé mentale sont rares dans la petite enfance, mais certains peuvent se manifester.

Les problèmes de santé mentale sont rares dans la petite enfance, mais certains peuvent se manifester (ex. : trouble de l’attachement, troubles du comportement, troubles du développement, troubles anxieux et symptômes dépressifs). « Les professionnels préfèrent attendre avant de poser un diagnostic, précise la psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier. Durant la petite enfance, ils évaluent davantage s’il y a des enjeux liés au développement de l’enfant. Ils voient ensuite si des interventions peuvent améliorer la situation et éviter que cela évolue en trouble de santé mentale. »

Certains signes peuvent toutefois indiquer qu’un tout-petit vit des difficultés. Si vous remarquez, par exemple, que votre enfant s’isole, n’a plus le goût de jouer, devient plus irritable ou agressif, a perdu l’appétit ou a du mal à dormir, cela pourrait indiquer qu’il va moins bien psychologiquement.

Si ces difficultés durent dans le temps ou vous inquiètent, il est préférable de consulter un professionnel de la santé (ex. : psychologue, médecin, infirmière, travailleur social). Si votre enfant vous fait vivre de fortes émotions (ex. : il vous met en colère régulièrement), vous pouvez aussi demander de l’aide pour améliorer votre relation.

Pensez aussi à vous
Il est essentiel de prendre soin de vous pour bien vous occuper de votre tout-petit. Si vous n’allez pas bien, « l’important est d’aller chercher de l’aide et des moyens pour traiter votre condition et faire en sorte qu’elle n’affecte pas vos interactions avec votre enfant », indique le psychologue Nicolas Berthelot.

Si vous souffrez d’une maladie mentale, votre enfant a aussi plus de risque de développer un problème de santé mentale, mais ce n’est pas systématique. « Par exemple, des études ont montré que quand les parents dépressifs prennent soin de leur condition et qu’on les aide à agir de manière chaleureuse et bienveillante avec leur enfant, les enjeux de dépression ne se transmettent pas ou peu à l’enfant », rassure George Tarabulsy.
À retenir
  • Le lien entre un enfant et ses parents commence dès la naissance. Une relation chaleureuse et rassurante l’aide à bien grandir et à mieux faire face aux défis plus tard.
  • Répondre à ses besoins, lui donner de l’affection, jouer avec lui et lui offrir une routine stable… Les gestes que vous posez tous les jours ont un impact positif sur la santé mentale de votre tout-petit.
  • Prendre soin de soi et demander de l’aide quand on en a besoin permet d’être plus disponible et bienveillant avec son enfant.
Naître et grandir

Source : magazine Naître et grandir, mars-avril 2025
Recherche et rédaction : Julie Leduc
Révision scientifique : Sylvana Côté, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal et chercheuse au CHU Sainte-Justine

Photos (dans l’ordre) : GettyImages/PeopleImages, Iuliia Zavalishina, O2O Creative, klebercordeiro, VIJ, FilippoBacci et FatCamera

RESSOURCES

  • Bébé arrive, M.-J. Martel et autres, Éditions du CHU Sainte-Justine, 2023, 220 p.
  • Favoriser la santé mentale de mon enfant, Centre RBC d’expertise universitaire en santé mentale
    sante-mentale-jeunesse.usherbrooke.ca
  • Info-Social 811
  • La santé mentale de votre enfant, Soins de nos enfants
    soinsdenosenfants.cps.ca
  • Première Ressource, aide aux parents
    premiereressource.com
  • Reconnaître les signes d’un trouble mental chez l’enfant, Gouvernement du Québec
    quebec.ca
  • Troubles mentaux chez les enfants et les adolescents : prévenir, repérer tôt, intervenir, L. Ben Amor et autres, Éditions du CHU Sainte-Justine, 2017, 384 p.
  • Trucs de psy : guide pratique pour s’aider soi-même, G. Beaulieu-Pelletier, Les Éditions de l’Homme, 2024, 296 p.