Apprendre à son enfant à pédaler sans petites roues, ça reflète exactement le travail des parents. On est présent, chaque jour, pour lui apprendre comment garder l’équilibre.L’été est passé en coup de vent. Entre baignades, grosse chaleur et popsicles qui nous fondent dans les mains, on se réveille en septembre. C’est lors d’un de ces derniers chauds samedis de l’année que j’ai allumé.
Mon gars a 6 ans et n’a pratiquement pas fait de vélo de l’été. Résultat? Il n’a pas une once d’habileté pour pédaler sans ses petites roues. Soudainement, me voilà pris d’une mission : mon gars saura comment faire du vélo sans petites roues d’ici l’hiver! Ou du moins, pour l’été prochain. La fin de l’été prochain en tout cas.
Après une légère négociation, on en vient à une entente mutuelle : on va jusqu’au parc et on revient. Le parc est à deux coins de rue. Mon gars roule paisiblement jusqu’au parc dans un angle de 30 degrés, accoté sur une de ses deux petites roues... Ça ne marchera pas. Je dois lui enlever les deux bouées sur lesquelles il compte beaucoup trop.
Le lendemain matin, on recommence. Cette fois-ci, finies les petites roues. Je lui dis que je tiendrai le siège pour l’aider, mais qu’il doit travailler son équilibre. On fait le même parcours que la veille. Je tiens son siège en attendant le bon moment pour le lâcher. Dès que je sens qu’il tient un peu son équilibre, je retire ma main du siège, mais la remets rapidement pour éviter la chute.
- WO, t’as lâché longtemps papa!
J’ai lâché 2 secondes, maximum.
Les deux coins de rue de la veille m’ont paru un peu plus longs. Arrivés au parc, j’ai chaud. Mine de rien, je joggais penché en tenant l’équilibre d’un enfant sur un vélo. Après m’être répété dans ma tête que je dois vraiment me remettre à la course, on repart, sens inverse, vers la maison.
En chemin, on croise des voitures qui se tassent et ralentissent. Les automobilistes sourient devant la scène. Ils doivent trouver ça beau, un père qui apprend à faire du vélo à son gars! On croise les voisins qui, eux, plus près de nous, sourient aussi, mais le font surtout en voyant réellement ce qui se passe : mon gars fier de faire du vélo à deux roues pendant que moi j’en arrache, derrière, hors de son champ de vision.
On arrive à la maison, mon gars est heureux. Hier, il avait 4 roues; aujourd’hui, juste 2 et, éventuellement, juste 2 sans papa derrière. Et moi, je souris finalement aussi.
Comme le travail de parent
Je me rends compte à quel point ces petites balades de 10 minutes en disent beaucoup plus qu’elles en ont l’air. Parce qu’elles reflètent exactement le travail de chaque parent. On est là, à montrer à nos enfants comment s’en aller tous seuls. On est présent, chaque jour, pour leur apprendre comment garder l’équilibre le mieux possible pour ne pas qu’ils tombent trop fort quand on ne sera pas là pour remettre à temps notre main sur le siège. C’est souvent essoufflant, parfois frustrant, mais c’est nécessaire et oh! combien valorisant de voir la fierté de nos enfants qui se sentent eux-mêmes grandir et évoluer.
Je ne sais pas si je vais réussir l’ultime mission que je me suis imposée, mais une chose est sûre, je vais essayer de sourire moi aussi aux automobilistes qui passent la prochaine fois.
Parce que c’est vrai qu’ils sont beaux ces moments-là.
28 septembre 2018
Photo : GettyImages/AleksandarNakic