Le bonheur des mots

Le bonheur des mots

Je peux leur poser 20 questions dans la journée sans obtenir une seule réponse. Mais, le soir, après un bon lavage de dents, deux ou trois lectures et une chanson débile (histoire de finir la journée par un éclat de rire), j’ai droit au résumé de leur journée.

Du côté de ma fille, qui est encore à la garderie, c’est variation sur la même phrase. TOUS les soirs, elle me lance d’un seul souffle : « Suis arrivée à la garderie, z’ai posé mon manteau, z’ai descendu, z’ai zoué, z’ai ranzé, z’ai manzé, z’ai dormi et puis papa est arrivé. »

P-a-l-p-i-t-a-n-t.

Même si je manque de m’endormir chaque fois, je reste fidèle au poste. Soir après soir quand elle me dit : « Maman, tu veux que je te raconte ma zournée? », je réponds invariablement oui. J’ose quand même une ou deux questions pour pimenter un peu le récit. En vain. Elle ne se souvient jamais de rien. Je ne lui en veux pas. Moi aussi, j’en perds des bouts quelquefois. En attendant, c’est moi qui parle. Je lui raconte ma journée, lui parle de ses poupées, de ce qu’on va faire le lendemain. Elle adore ça. Je sais que les mots que j’attends sont à deux doigts de se réveiller. J’ai semé les mêmes graines chez mes deux plus grands et j’en récolte aujourd’hui les fruits.

Mon fils, longtemps très timide, est aujourd’hui intarissable lorsque j’éteins la lumière de sa chambre. Il a vite compris que me raconter sa vie lui permettait de gagner quelques minutes de plus avant de dormir. Mais je crois sincèrement qu’il adore ça. C’est le seul moment dans la journée où il se livre vraiment probablement parce que je suis seule avec lui. Cote à cote, nos regards tournés vers son plafond illuminé d’étoiles, on se parle de tout et de rien. Quand il ne sait pas quoi dire, il me pose des questions, puis me raconte ses amours, ses amis, ses rêves. Il me parle de son jeu vidéo préféré. J’écoute de plus en plus. Je parle de moins en moins. Ça dure 5 minutes parfois un peu plus. Je savoure chacun de ses mots en espérant qu’une fois devenu grand, il fasse la même chose que sa grande sœur.

À 15 h tapante, mon ado me rejoint dans mon bureau, s’assoit en face de moi, m’embrasse et me raconte sa journée sans que je lui pose une seule question. Un vrai moulin à paroles. Je suis incapable d’en placer une! Les mots fusent. Humeur, anecdotes, bonne ou mauvaise note. Je la regarde s’agiter, rire, s’énerver. Je souris en me trouvant bien chanceuse d’avoir réussi à construire ce lien avec elle.

Si vous êtes comme moi : patience! Continuez d’écouter leur silence ou la même maudite phrase aussi souvent que vous le pouvez. Racontez-leur vos journées, vos rêves, vos histoires d’enfance. C’est le meilleur moyen de leur donner envie de parler et découvrir que le bonheur est dans les mots.

 

17 février 2012

Naître et grandir

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