Garderie: où est « Lili »?

Garderie: où est « Lili »?
Par Dr Nicolas Chevrier, Psychologue

Ce matin, Leeloo est triste. Elle s’ennuie de « Lili », son éducatrice. Leeloo arrive au service de garde et la cherche partout, mais elle n’est pas là. « Lili » est en arrêt de travail. On a beau lui dire que « Lili » prend soin de sa fille qui est malade, notre petite continue de la réclamer chaque matin quand on est encore à la maison et à la chercher dès son arrivée à la garderie.

Cette situation illustre bien comment une petite fille de 2 ans et des poussières peut réagir à une situation de changement. Pour Leeloo, ce changement est considérable, car l’attachement entre elle et son éducatrice est très important. C’est même l’ingrédient qui nous assure le bien-être de notre fille pendant les heures passées au CPE.

Depuis quelques décennies, la façon d’élever les enfants a changé pour beaucoup d’entre nous. Autrefois, la famille proche prenait beaucoup de place dans le quotidien des familles. Aujourd’hui, la famille immédiate n’est plus le soutien principal des parents. Ainsi, la place des éducatrices en garderie est maintenant primordiale dans la vie de nos tout-petits.

C’est pourquoi il est normal de s’attendre à une réaction de la part de notre enfant lorsqu’une personne importante comme son éducatrice disparaît soudainement de sa vie. Dans notre cas, c’est assez clair : pleurs et protestations quand on la laisse le matin entre les mains d’une autre éducatrice et demandes répétées pour voir « Lili » à la maison quand elle s’ennuie. On remarque également une augmentation du nombre de morceaux d’omelette lancés au souper (il s’agit d’un indice mesurable du niveau d’irritabilité de Leeloo : plus elle lance de morceaux d’omelette, plus elle est irritable) et une obstination à ne pas vouloir manger autre chose que des yogourts.

Des stratégies d’adaptation

Tous les enfants ne réagiront pas de la même manière au changement. Certains auront de la difficulté à s’endormir, d’autres auront moins envie de faire des activités qu’ils aiment et d’autres iront faire pipi plus souvent. Quoi qu’il en soit, ces manifestations de stress sont parfaitement normales, même pour un tout-petit.

Ces manifestations sont d’ailleurs le signe d’une adaptation de l’enfant à une nouvelle réalité. Or, cette adaptation est parfaitement saine et permet à l’enfant de développer une habileté importante qui le suivra toute sa vie : la capacité à s’adapter à son environnement.

Ainsi, lorsque l’enfant perçoit un changement dans son environnement, il manifeste une certaine insécurité. Il fera des essais pour agir sur son environnement. Les essais seront d’abord de nature émotive : irritabilité, colère et tristesse. Puis, à force de remarquer que ces solutions ne fonctionnent pas, il va en essayer d’autres, plus efficaces. Par exemple, tenter de créer un attachement avec la nouvelle éducatrice, passer plus de temps avec son grand frère, se lancer dans les bras de son ami Alexandre qui a son âge… Ces stratégies d’adaptation vont lui permettre de retrouver un équilibre qui fera disparaître le stress. Car c’est toujours avec un retour de l’équilibre que le stress disparaît.

Je termine avec un message à toutes les éducatrices qui sont en arrêt de travail : « Ne vous inquiétez pas, vos enfants sont entre bonnes mains. Prenez soin de vous et des vôtres. On a bien hâte de vous revoir… surtout toi Lili! »

 

8 avril 2014

Naître et grandir

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